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Communalisation intégrale : Les limites díun processus

Publié le samedi 20 janvier 2007 à 08h14min

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La décentralisation intégrale est en marche au Faso. Après les municipales d’avril 2006 suivies des euphoriques et pompeuses cérémonies d’installation des conseils municipaux et régionaux, l’heure des réalités a sonné. Le gouvernement était attendu au pied du mur pour cette année 2007.

Populations et élus avaient hâte de savoir si les longs discours des dirigeants allaient se concrétiser dans les actes. Très précisément, il était important de savoir si les communes allaient être dotées de moyens à la hauteur des ambitions que les uns et les autres nourrissent pour la communalisation intégrale.

Or, pour le budget 2007, la loi de finances a prévu autour de neuf milliards pour accompagner la décentralisation. Cette somme servira aux frais de fonctionnement et d’équipement des communes et des régions d’une part, et à la construction des sièges des communes rurales, d’autre part.

Certes, cette prévision vient renforcer les actions déjà engagées en 2006, mais, pour le vaste chantier que constitue la communalisation intégrale, beaucoup reste encore à faire. La décentralisation étant avant tout un transfert de compétences de l’Administration centrale vers les pouvoirs locaux, avec ce que cela comporte comme exigences de part et d’autre, la mise en place des instances dirigeantes des communes devrait par exemple signifier la fin de l’intervention à tout va de l’Etat central. Si cela donne le pouvoir de décision aux populations à la base, il s’accompagne aussi d’une contribution de leur part à la vie de la commune.

En termes clairs, les habitants de la commune rurale doivent entièrement assumer les charges de fonctionnement et les dépenses liées à la construction d’infrastructures socio-économiques. Cela suppose donc que d’importants impôts soient collectés pour bâtir dispensaires, écoles, routes, etc.

Dans cette ambiance de pauvreté généralisée, on peut douter de la capacité des citoyens des communes rurales à faire face aux nouvelles taxes qui leur seront imposées. Très vite, elles les assimileront à l’impôt de capitation et commenceront à douter du bien-fondé de la décentralisation.

Déjà que les citadins, pourtant plus instruits et donc dans de meilleures dispositions d’esprit pour s’acquitter de leurs devoirs civiques, en font voir de toutes les couleurs aux fisc, avec les ruraux, ce sera à coup sûr la croix et la bannière. Et pourtant l’acte de citoyenneté est indispensable à la vie des communes rurales car une trop grande intervention de l’Etat central biaiserait l’esprit et la lettre de la décentralisation.

Coincés entre cette exigence de faire de leurs populations les actrices directes et quotidiennes de la communalisation et la situation d’indigence financière de ces dernières, certaines communes n’hésiteront pas à faire le grand écart, c’est-à-dire à se tourner vers les « enfeuillés » de la localité. Si de prime abord cela ne constitue pas un problème en tant que tel, il faut reconnaître qu’à la longue cela risque de conduire à la « privatisation » de nos communes.

Selon le sacro-saint principe des opérateurs économiques qui est qu’on ne fait rien pour rien, les communes rurales se transformeront lentement mais sûrement en propriétés privées des bienfaiteurs, qui poseront des conditions pour chacun de leur geste. Autant les bailleurs de l’Etat lui imposent leur diktat, autant les mécènes des communes pourront exiger des passe-droits.

Les plus gourmands pourront même transformer leurs familles en une dynastie de conseillers. On refusera difficilement à un magnat qui a assuré la construction des infrastructures d’avoir son mot à dire pour la constitution des listes électorales ou d’être consulté sur toutes les questions d’importance de la localité.

Adam Igor

Journal du jeudi

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