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Islam et langue arabe : Deux pratiques dissociables

Publié le mardi 16 janvier 2007 à 07h37min

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Difficile, dans nos contrées et même dans les pays arabes, de penser arabe sans islam. Mais dans l’article ci-après, M. Adama Ouédraogo, attaché de recherche à l’INSS/CNRST, démontre que les deux ne sont pas forcément indissociables.

La langue arabe est une des anciennes langues sémitiques comme l’hébreu. Avant l’islam, elle était parlée uniquement dans la péninsule arabique par les tribus arabes et dans les régions dont les peuples avaient des contacts avec les Arabes. L’arrivé de l’islam au VIIe siècle a favorisé son expansion dans le monde et son emploie dans différents domaines.

Au début de l’islam au VII ème siècle, il y a eu une distinction entre la période préislamique (djaahiliyat[u]) représenté par les Arabes et leurs productions et activités intellectuelles et religieuses et l’époque islamique (islamiyat[u] ) qui regroupe tous ce qui a été produit par les musulmans, arabe ou non arabe, au début de l’islam jusqu’à la fin de règne du dernier calife ‘aly, selon certains historiens de la littérature arabe ou jusqu’à la chute du califat ottoman selon d’autres.

Les adeptes de la nouvelle religion « l’islam » ont contribué à la fois à propager la foi islamique et la langue qui la véhicule hors de la péninsule arabique. En quelques années, avant la fin du VII ème siècle, la langue arabe s’est étendue dans différents pays et zones où l’islam existe ; la Syrie, l’Iraq et l’Egypte en 661( André Miquel. La littérature arabe), en Afrique noire par des arabes, des Maures, des Berbères et ensuite par les Africains sub sahariens convertis à l’islam.

Parmi les facteurs qui a aidé à la conservation de la langue arabe et son expansion dans le monde, il y a le Coran et les Hadiths. Ils sont les principaux textes de références de l’islam et aussi des sources importantes de la langue arabe. Dès la révélation du Coran, les arabes, surtout les poètes, considéraient le Coran comme un gros œuvre littéraire à cause de son style rythmé et rimé (sadj`).

A cause de ce style, le Prophète Mohammad fut taxé de devin, parce que dans la tradition littéraire arabe, la prose rythmée et rimée était considérée comme une œuvre de devin (kaahin). A cause de cette expression coranique, les musulmans : théologiens, linguistes et littéraires, depuis au VII e siècle, ont considéré le Coran comme un texte qui n’a aucune commune mesure avec les autres productions littéraires arabe. Cette considération a fait naître plus tard le terme « i`djaaz(u) l-Quraan », c’est-à-dire l’inimitabilité du Coran, dans sa forme et dans son contenu.

Le Coran et les Hadiths ont facilité, jadis, l’intercompréhension entres les tribus arabes de la péninsule arabique : `asad, Kinaana, Qurayö etc., et ceux des pays arabes actuels : Arabie Saoudite, Egypte, Maroc, Libye du fait qu’ils contiennent des mots et des expressions de divers dialectes, et ils sont aussi les premiers textes ( prose) arabe écrits. Ces textes religieux ont introduit également un vocabulaire religieux islamique dans la langue arabe afin de répondre aux besoins de l’islam tels :

Au niveau de la littérature(al-‘adab en arabe), le Coran n’a pas interdit sa production. Il a distingué « les poètes égarés à cause de leur mauvaises langue » et les « poètes non égarés » (Sourate les poètes, verset 226 et 227). Les musulmans, depuis le temps du Prophète, ont utilisé la poésie et la prose pour défendre l’islam ou expliquer certains versets du Coran. Quant aux poètes, les historiens de la littérature arabe, les ont classés en trois (04) groupes :

1-äu`araa’u l-Djahiliyat(i), les poètes qui ont vécu avant l’islam ou ceux qui ont vu naître l’islam et qui ne l’ont pas embrassé. 2- äu`araa’u l-muxadramiin, ceux qui ont connu la période préislamique et islamique et qui se sont converti à l’islam. 3-äu`araa’u l-islamiyyiin, les poètes musulmans nés au moment de l’apparition de l’islam. 4- äu`araa’u `aörul hadith : les poètes contemporains qui sont ceux du IXX èmè siècle comme le premier groupe était composé par des arabes de la péninsule arabique.

Leurs œuvres s’inspiraient de la tradition de l’Arabie préislamique. Ainsi, certains d’entre eux ont employé la poésie pour attaquer l’islam et défendre leur tradition. Le deuxième et le troisième groupes sont des musulmans arabes et non arabe.

Ils ont abandonné certains thèmes anciens tels que la satire, le thrène etc., pour s’inspirer de l’islam. Ils mettaient leurs œuvres au service de l’islam. Quant au dernier groupe, ce sont des musulmans et des non musulmans. Leurs littératures traitent des thèmes de faits de la société : politique, pauvreté, éducation, la femme, l’enfance.

La prose arabe ( an-Nathru) a été influencée par l’islam. Depuis son apparition, elle est toujours introduite par bismi l-Laahi et al-Hamdu lil-Laahi et se termine par cette dernière expression ou une autre équivalente ayant un sens religieux. De nouveaux thèmes sont introduits tels que les discours religieux prônés dans les mosquées (xutbat[u]), les discours politico religieux et social que les califes et ulémas prononçaient pendant leurs installations dans les localités qu’ils vont administrer.

La littérature arabe a continué à évoluer ainsi avec l’apport considérable des autres peuples voisins : Perse, Kurde, Arménien. Au XVIII ème siècle, les misions scientifiques entre le monde arabe et l’occident ont fait naître des poètes qui s’inspirent des écoles et tendances littéraires européennes tels le surréalisme, le naturalisme, le symbolisme.

Au VII e siècle, au moment de la révélation du Coran, les versets étaient aussitôt écrites sur des morceaux de cuir, des tessons de poteries et mémorisés par des huffaz ( pluriel de haafiz celui qui mémorise le Coran). En 603, suite à la bataille ’aqrabaa , dans laquelle plusieurs haafiz sont morts, le calife Abu bakr, sur conseil de `Umar Ibn Xattab autorisa les scripteurs à réunir les révélations et à les écrire sur des feuilles (suhuf) sous forme d’un livre « mushaf ».

Cette mesure avait une grande importance à la fois linguistique et politique. L’objectif visé était la cohésion de la communauté musulmane et l’unification du contenu coranique. Des diacritiques ont été inventés ; il s’agissait de mettre des points sur les consonnes par exemple les deux points sur le Ê /t/.

Des écoles ont été créées, premièrement dans les mosquées, ensuite hors des mosquées, Au VIII e siècle, pendant la période Abbasside. La medersa de la Nizaamiyat(u) à Bagdad, l’une des premières et importantes établissements a été fondée. Des cours d’arabe y étaient dispensés par des professeurs venant de différents pays.

Après, d’autres medersas ont vu le jour comme : al-Azhar en Egypte, Kairouan au Maroc, la Kayseri en Turquie et à Tombouctou. Au XIX ème siècle, des medersas modernes sont apparues dans le monde arabo-islamique. Elles sont structurées en plusieurs cycles comme l’école classique française. Dans les pays arabes et dans certains établissements de pays non arabophones, les cours y sont dispensés en langue arabe comme le Burkina Faso.

Certains pays ont opté la langue arabe comme langue officielle telles que la Syrie, les pays du Maghreb en Afrique. Le nombre des locuteurs en arabe varient d’un pays à l’autre, selon l’importance numérique des musulmans et sa proximité des pays arabes.

Présentement, la langue arabe se distingue des autres domaines d’études, elle peut être étudiée sans l’islam. Ainsi, il y a l’arabe commercial, l’arabe d’affaire, l’arabe diplomatique et scientifique. Toutefois, l’islam est beaucoup diffusé en arabe.

OUEDRAOGO Adama
INSS/CNRST
01 BP 3606 Ouagadougou 01
E-mail adama_oueder @ yahoo.fr

L’Observateur

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