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Lotissement à Bogodogo : « Ils ont vendu leurs champs et veulent des parcelles »

Publié le jeudi 19 octobre 2006 à 08h00min

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18 000 parcelles pour plus de 53 000 recensés, voilà la tâche à laquelle s’attelle la commission de suivi, de contrôle et d’attribution dans les zones nouvellement loties des secteurs 28, 29 et 30 de l’arrondissement de Bogodogo.

Lassané Tapsoba, membre de la commission ad hoc de l’opération, que nous avons rencontré fait le point de la situation en évoquant aussi les problèmes qui ne manquent pas, comme un peu partout où il est question de lotissement.

Après 48 heures avec une équipe d’attribution de parcelles en août dernier, au secteur 29, où en êtes-vous aujourd’hui avec l’opération ?

• Je voudrais d’abord au nom de Madame le maire de l’arrondissement de Bogodogo, remercier votre journal qui suit de très près le travail que nous faisons sur le terrain depuis un certain temps dans le cadre du lotissement des secteurs 28, 29 et 30. Vous avez effectivement une équipe, qui a passé quelques jours avec nous et dont le reportage a été apprécié par nos services. Aujourd’hui, vous venez encore à nous et nous vous en sommes reconnaissants.

Cela dit, malgré la pluie qui perturbe de temps à autre nos sorties sur le terrain, le travail se poursuit normalement. Et je peux vous assurer qu’à l’heure actuelle, plus de 1000 parcelles ont été attribuées au secteur 29.

Est-ce à dire que l’attribution s’est déroulée sans le moindre accroc ?

• Nous avons rencontré des difficultés dès le départ et cela était dû à un problème de communication et d’interprétation des textes. Il y a un groupe de personnes se réclamant d’une association dénommée Rakièta, qui a voulu s’immiscer dans notre travail. Mais des résidants réels se sont opposés à leur façon de voir les choses et nous avons pu continuer tranquillement notre travail.

La commission ad hoc de suivi et de contrôle du lotissement mise en place est ouverte à tous. Nous avons demandé à tous ceux qui veulent que le travail se fasse dans la transparence, de venir à la mairie pour avoir des informations. Des gens l’ont fait et nous leur avons demandé à notre tour d’informer les autres dans leurs secteurs respectifs. Le groupe dont je parlais tantôt voulait travailler d’une autre manière en cherchant à nous mettre des bâtons dans les roues. Mais on s’est compris par la suite et le boulot a pu se poursuivre dans de bonnes conditions.

On sait que sur une parcelle de 250 m2, il y a parfois 2 voire trois ménages. Ceux qui doivent bouger parce qu’ils ne sont pas « anciens » sont sur une liste d’attente pour être attributaires d’une autre parcelle ailleurs. Ces gens ont-ils été maintenant satisfaits ?

• La forte concentration des concessions est une réalité si fait que sur une parcelle de 250 m2, on a souvent plusieurs ménages qui veulent la même parcelle. La commission évite de se mêler ou de prendre parti pour telle ou telle personne. Sur le terrain, c’est simple : l’équipe arrive sur la zone et en fonction du lot, quatre personnes placent des piquets sur les bornes.

Quand ce travail est terminé, nous appelons les propriétaires des maisons qui se trouvent dans la parcelle sur place avec leurs papiers pour commencer les répartitions. Je précise que les résidants réels sont prioritaires. On passe alors aux confrontations et c’est au plus ancien résidant que revient la parcelle.

Après cette étape, nous listons tous ceux qui n’ont pas eu de parcelles. Ils sont concernés par la phase de réinstallation qui n’a pas encore commencé. Chacun sera satisfait le moment venu et j’invite les habitants à être patients, et à ne pas écouter les ragots. Tous ceux qui ont payé les 50 000 et 100 000 FCFA n’ont pas à s’inquiéter.

Il y a aussi le cas de ceux dont les concessions ne sont pas concernées par les bornes. C’est-à-dire ceux qui sont sur des voies ou des réserves. A quelle sauce seront-ils mangés ?

• Ils sont dans la même situation que ceux qui n’ont pas été positionnés. Ceux dont les maisons sont sur des voies ou des réserves et la voie ferrée, seront pris en compte. Nous verrons tout cela sur le plan. Mais, à défaut de parcelles disponibles à côté de leurs habitations, nous serons obligés de les réinstaller ailleurs.

Au secteur 28, l’affichage des numéros fait des gorges chaudes et ces temps-ci, Madame le maire de Bogodogo est interpellée dans les journaux. Que se passe-t-il exactement ?

• Nous avons effectivement publié début septembre, la liste de ceux qui résident dans ce secteur. Et comme vous le dites, les plaintes n’ont pas manqué. Mais il y a des gens qui pensent qu’ils peuvent tromper tout le monde. Au secteur 28, ils sont nombreux ceux qui possèdent déjà une parcelle dans l’arrondissement.

Et là, nous, nous avons tout simplement appliqué une des dispositions de la RAF, c’est-à-dire la réforme agraire et foncière. Ce décret, qui a été promulgué par le président du Faso, stipule qu’on ne peut pas avoir deux parcelles dans la même ville. Avec plus de 53 000 recensés pour 18 000 parcelles à dégager, il nous fallait scrupuleusement respecter les textes en la matière.

Beaucoup de gens ignorent cela et pensent qu’on veut les brimer. Depuis 1999, tout ce que nous avons fait comme attribution, figure dans nos fichiers. Au niveau du 28, il y a ainsi plus de 80 personnes qui sont des résidants réels, mais qui avaient lors du lotissement au secteur 30 bénéficié chacun d’une parcelle. Nous avons tous les documents les concernant à notre niveau.

Selon la RAF, ils ne peuvent donc plus prétendre à une parcelle et nous les avons listés à part. Il faut que les gens comprennent une chose, on peut acheter autant de parcelles qu’on veut mais il ne faut pas contourner les textes. Quand on paye un numéro avec un recensé, il faut laisser la procédure se poursuivre ; c’est-à-dire que le dossier doit aller au domaine où le PUH est fait au nom du premier attributaire avant de faire la mutation.

C’est ce qu’on appelle un achat de parcelle en bonne et due forme. Maintenant, ceux qui ont acheté des numéros avec des recensés et qui ont trouvé un système pour se faire attribuer une parcelle ont tout simplement contourné le fisc. Ils n’ont pas payé les taxes qu’il faut au domaine. En faisant une mutation directe par des voies détournées, l’administration ne fait qu’appliquer la mesure.

L’autre difficulté sur le terrain, c’est avec les propriétaires terriens. Comme je le disais, il y a eu plus de 53 000 recensés par le Cabinet Epur à qui on avait confié le travail de recensement Malheureusement, on nous a annoncé 18 000 parcelles à attribuer. Or, le ministère nous a donné des instructions pour qu’on puisse prévoir la gare et la voie ferroviaire.

Ce qui nous a fait perdre plus de 5000 parcelles alors que dans les 53 000 recensés, nous n’avons pas tenu compte des propriétaires terriens bien que la RAF ait prévu que quand il y a un lotissement dans un village, tout enfant de 15 ans a droit à une parcelle. On a pris cette disposition parce que les habitants perdaient leurs champs et ne savaient plus où aller.

C’est donc un autre groupe qui n’est pas pris en compte. Les propriétaires terriens, qui ont tout vendu, veulent qu’on pense à leurs enfants. Nous leur avons fait savoir qu’ils ont vendu tous leurs champs et que, par conséquent, ils nous gêneraient dans notre travail. Ils sont revenus à la charge pour nous annoncer qu’il y a des gens qui ont divisé leurs concessions dans la perspective d’avoir 2 ou 3 parcelles.

Ils se sont même montrés disponibles pour nous faire le point et plus tard ils nous ont fait parvenir plus de 150 numéros. Pour ne pas avoir ces gens sur notre dos, nous avons décidé d’aller vérifier tout cela sur le terrain. Résultat, il y a des résidants réels, mais certains ont effectivement séparé leurs concessions et ça sautait aux yeux. La commission a apprécié et nous avons recensé la plupart des propriétaires terriens qui ont bénéficié de parcelles comme les autres, sauf les enfants.

La troisième catégorie concerne les nouvelles constructions habitées (NCH). A ce niveau, il y a eu beaucoup de plaintes et des gens sont venues à la mairie pour nous dire qu’ils sont dans la zone non lotie depuis 15 à 20 ans. Nous ne balayons pas cela du revers de la main mais depuis 2000, nous avons demandé à la population de ne plus investir parce que le 28, le 29 et le 30 sont en voie de lotissement.

Quand le Cabinet Epur a mis les numéros sur le mur de chaque concession, beaucoup de gens avaient entre temps construit d’autres maisonnettes. Nous étions obligés au vu des 53 000 numéros de mettre en place une commission ad hoc constituée de chefs coutumiers, d’élus locaux, de responsables d’association au niveau des zones à lotir et des propriétaires terriens.

La commission a tourné et il ressort qu’il y a de nouvelles constructions qui ont été faites. Les nouveaux travaux ont été pris en NCH parce que des gens, après avoir appris qu’il y a un lotissement, sont venus rapidement faire des toilettes, des murs et autre chose dans la précipitation. Nous pensons que ce n’est pas sérieux tout ça, même si certains ont fait honnêtement des aménagements pour que les pluies ne fassent pas des dégâts.

Des écrits qui paraissent dans les journaux ne reflètent pas la réalité. Nous avons par exemple lu l’article d’un Ayo Ben ; mais, ce monsieur en question a son nom sur une liste qui n’a pas été déposée. Il lui suffisait de nous présenter son reçu de 1000 FCFA et sa CIB pour qu’on le rétablisse dans ses droits.

Il ne va pas vérifier à la base et il se répand en invectives dans les journaux. Nous l’avons reçu et il a reconnu son erreur. Ils sont nombreux ceux qui sont dans son cas et qui n’écoutent que les ragots.

A quel moment peut-t-on commencer les travaux sur une parcelle qui a déjà été attribuée ?

• En principe, dès qu’un résidant a eu sa parcelle, il peut commencer à construire. Mais s’il a un voisin qui doit se déplacer, il lui faut attendre quelque temps pour éviter les problèmes. Nous sommes en train de prendre des dispositions pour qu’on libère les grandes voies pour permettre aux gens d’exploiter leurs parcelles.

Ceux qui ont eu la chance d’être en 4 bornes, s’ils ont les moyens ils sont libres de commencer leurs travaux. Soit dit en partant, dans le cadre de l’amélioration des conditions de vie dans les quartiers périphériques, l’Agence française de développement (AFD) a apporté une aide financière à la mairie de Ouagadougou.

Notre arrondissement qui n’a pas été oublié a prévu une adduction d’eau et l’ouverture des voies pour permettre à la SONABEL d’installer ses poteaux en vue de l’électrification.

Quand prendra fin cette opération de lotissement ?

• Selon le maire de Ouagadougou, Simon Compaoré, qui est le coordonnateur du lotissement, nous ne devons pas dépasser 2007. Mais je vous avoue que c’est un travail colossal que nous abattons à Bogodogo. Une opération de lotissement, ça demande de la persévérance.

Nous avons demandé 50 hectares dans le village de Balkuy pour installer ceux qui n’auront pas de parcelles dans les secteurs 28, 29 et 30. C’est en bonne voie et si tout va bien, nous finirons en 2007.

Entretien réalisé par Justin Daboné

Observateur Paalga

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