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Hépatite B : Une maladie dont le traitement peut durer toute la vie

Publié le lundi 28 août 2023 à 23h00min

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Hépatite B : Une maladie dont le traitement peut durer toute la vie

L’hépatite B est une maladie qui peut conduire au cancer du foie et même à la mort. Le traitement avec des acteurs de la pharmacopée a de plus en plus sa part de responsabilité dans la mort de patients atteints d’hépatite B. Dr Nogogna Zouré, médecin hépato-gastroentérologue au Centre hospitalier universitaire Sourô-Sanou de Bobo-Dioulasso, donne plus de détails sur cette maladie.

Lefaso.net : Qu’est-ce que l’hépatite B ?

Dr Nogogna Zouré : L’hépatite B, c’est comme son nom l’indique, est une inflammation du foie (hépatite), qui est due à un virus qu’on appelle virus de l’hépatite B.

Quelles en sont les causes ?

La cause se retrouve dans son nom. Quand on parle d’hépatite, on parle d’inflammation du foie et l’inflammation peut être causée par plusieurs agents dont des agents infectieux, mais on peut également avoir les agents chimiques. Mais dans le cadre de l’hépatite B, c’est une inflammation du foie qui est de cause infectieuse due au virus de l’hépatite B.

L’hépatite B peut-elle conduire à la mort ?

Oui, l’hépatite B peut malheureusement conduire à la mort. Dans ses manifestations aiguës, elle peut se compliquer, évoluant vers une hépatite fulminante qui peut tuer le patient. Dans 1% des cas, ça arrive. Dans ce cas, le patient peut mourir d’insuffisance hépatique sévère dont notre plateau technique ne permet pas la prise en charge, qui consiste en une transplantation hépatique.

Dans un second temps, par ses complications qui surviennent tard comme la cirrhose qui peut conduire à la mort par l’insuffisance hépatique grave ; mais aussi à travers d’autres complications de la cirrhose notamment les hémorragies digestives, les complications infectieuses qui peuvent conduire à la mort. Il y a également la complication comme le cancer du foie qui peut conduire à la mort.

Quels sont les symptômes de l’hépatite B ?

Pour l’hépatite B, c’est en phase aiguë qu’on a le plus souvent les symptômes, mais l’hépatite B même peut passer inaperçue. La personne n’a pas su qu’elle a fait une infection. Dans certains cas, ça peut donner de la fièvre, des douleurs articulaires ou musculaires, le mal au ventre, des troubles digestifs comme la nausée et les vomissements, des maux de ventre et le corps qui gratte, les selles qui peuvent être décolorées, des urines qui sont foncées, les yeux qui deviennent jaunes. Dans la plupart des cas, ça va passer inaperçu et ces symptômes seront absents. Tout peut se passer comme une simple grippe ou un paludisme.

Dans l’hépatite chronique, on peut ne rien sentir comme signes, il n’y a rien. On ne sent rien ou dans certains cas, on peut sentir plus de fatigabilité, les yeux qui peuvent devenir jaunes de façon passagère dans les cas de la réactivation de la maladie. Sinon, elle est le plus souvent sans symptômes jusqu’à ce qu’on fasse un examen de dépistage et qu’on trouve que la personne a l’hépatite B. C’est dans les phases de complications qu’on a encore des symptômes mais ça, ça vient plus tard quand aucune prise en charge n’a été instaurée.

L’hépatite B est-elle contagieuse ?

L’hépatite B est très contagieuse, plus contagieuse que le VIH, d’après des études. Elle se transmet soit par le sang soit par les rapports sexuels non-protégés. Par le sang, c’est par exemple l’utilisation commune d’objets tranchants, l’utilisation commune de brosse à dents chez les enfants (comme on peut souvent saigner de la bouche), l’utilisation commune d’aiguilles, de lames de rasoir ou de tout autre objet pouvant être souillé par le sang. Enfin, de la mère à l’enfant, au cours du dernier trimestre de la grossesse et pendant l’accouchement.

Mais ce qui n’est pas contagieux, c’est la salive. La salive ne transmet pas l’hépatite B, sauf si elle contient du sang. Donc se faire des bisous ne transmet pas l’hépatite B, manger ensemble ou utiliser des objets comme les ustensiles de cuisine ne transmet pas l’hépatite B, ni les objets de table (cuillères, fourchettes…), ni les habits, ni les salutations. Il n’y a pas non plus d’études qui montrent qu’elle se transmet par les moustiques.

Quelles sont les conséquences de l’hépatite B ?

L’hépatite B peut évoluer pour donner la cirrhose. La cirrhose va se compliquer d’ascite, de complications rénales, d’encéphalopathie, d’infections, d’hémorragies digestives. Et toutes ces complications sont individuellement mortelles. L’autre complication mortelle est le cancer du foie. Nous avons peut-être des compétences humaines mais pas un plateau technique permettant une prise en charge adéquate de ces cas. Il ne faut pas oublier la souffrance familiale qui découle de la mort de personnes qui sont le plus souvent jeunes. Il s’agit souvent de responsables de famille, de cadres de l’administration, de grands opérateurs économiques. Donc les conséquences sociales de l’hépatite B sont très énormes.

Quels sont les différents traitements pour guérir de l’hépatite B ?

Pour tous ceux qui ne connaissent pas leur statut sérologique pour l’hépatite B, c’est de faire le dépistage afin d’être vaccinés si on n’a pas le virus dans le corps. Et pour ceux qui ont le virus dans le corps, un bilan sera fait afin de savoir s’ils doivent être simplement suivis ou prendre un traitement. Le médicament pour le traitement est disponible à la CAMEG et son coût est subventionné par l’État burkinabè.

Le traitement permet d’empêcher le virus de se multiplier et si le virus ne se multiplie pas, l’organisme ne va pas détruire le foie. Il y a des patients qui doivent être mis impérativement sous traitement. C’est pourquoi quand le patient vient, on demande un bilan qui se trouve malheureusement coûteux pour la plupart, parce qu’ils doivent payer ça de leur poche. Quand à l’issue du bilan on se rend compte que le patient n’a pas besoin de traitement, on le surveille parce qu’à un moment donné, il peut être nécessaire de le mettre sous traitement.

Qu’on mette ou pas le traitement, il y a des patients qui guérissent. Il y a des patients qui n’ont pas besoin de traitement et qui guérissent seuls sans aucune intervention.

Sous traitement, il y en a qui vont guérir, ça prend du temps, mais c’est bien possible. Il y en a qui ne guérissent pas et doivent rester sous traitement pour éviter l’évolution vers des complications qui sont irréversibles. L’objectif, quand on met le patient sous traitement, c’est d’empêcher le virus de se multiplier parce que s’il continue de se multiplier, l’organisme va détruire le foie et ça va entraîner des complications comme la cirrhose et le cancer chez le patient.

Comment évolue l’hépatite B et qui sont les personnes qui doivent être traitées ?

Quand on fait une hépatite B, on passe par une phase aiguë. Cela concerne les six premiers mois de l’infection. À l’issue de cette phase, on peut guérir complètement et développer des anticorps de protection sans aucune intervention, surtout quand la personne est adulte, a une bonne immunité, n’a pas d’autres facteurs de maladie hépatique comme l’alcool. Généralement dans les six mois, les patients adultes vont guérir ; on n’a pas besoin de traiter mais de surveiller et d’éviter tout ce qui peut entraîner des complications.

Après les six mois, quand la personne n’est pas guérie, on parle d’hépatite chronique. Dans hépatite chronique, il y en a qui vont guérir seuls sans traitement. Il y en a qui ne vont pas guérir et qui n’auront même pas besoin de traitement parce que leur organisme empêche le virus de se multiplier et le foie est normal. Donc eux ils n’ont pas besoin de traitement mais ils ont besoin d’une surveillance.

Il y en a, leurs organismes ne peuvent pas empêcher le virus de se multiplier et le foie est malade. Dans ce cas, il faut mettre un traitement. Et quand on met le traitement, il y en a qui vont guérir et s’ils guérissent, ils n’auront plus besoin de prendre de médicaments. Ils vont même développer des anticorps pour lutter contre le virus comme je l’ai dit plus haut.

Il y en a qui ne vont pas guérir et qui auront besoin de traitement pendant longtemps pour empêcher le virus de ne plus se multiplier. Chez eux, le traitement peut durer pendant longtemps, ça peut durer toute une vie.

Il ne faut donc pas se laisser berner parce que nous commençons à recevoir beaucoup de patients à l’hôpital qui disent "on m’a dit d’aller faire un traitement pharmacopée, et on m’a dit que dans 6 mois je vais guérir". Cependant, quand ils refont le test ça ne marche pas. En réalité, il y a des personnes véreuses maintenant qui exploitent l’information d’ici que nous donnons par rapport à l’infection à l’hépatite B. Comme ils ont appris que pour le virus de l’hépatite B on peut guérir seul au bout de six mois quand on l’attrape, alors ils donnent également un traitement de six mois. Mais malheureusement, ça ne se passe pas comme ça et certaines personnes qui ont le virus dans leur corps mais n’ont pas besoin de traitements vont payer cher en pharmacopée et ne se rendent pas compte souvent qu’elles ne sont pas guéries. Dans certaines situations, il y en a qui ont la chance de guérir mais de toute façon, traitement ou pas, ils allaient guérir seuls. Mais il y en a qui malheureusement ont besoin de traitements et comme on leur a promis la guérison au bout de six mois, ils pensent qu’ils sont guéris alors que non. Et nous les voyons souvent tard à la phase de cancer de foie ou avec une maladie qui est devenue grave.

Souvent, il y en a aussi qui vont arrêter le traitement que nous mettons parce que nous ne promettons pas la guérison à six mois, alors qu’on leur a dit qu’il y a un traitement qui peut guérir au bout de six mois. Ils vont prendre ce traitement et comme ils ont arrêté le traitement qu’ils doivent prendre, vous le revoyez six mois après avec une cirrhose ou pire avec un cancer. Donc c’est cette sensibilisation qu’il faut faire au niveau de la population. Peut-être qu’il y a des pharmacopées qui guérissent ; je n’en connais pas, mais je ne peux pas dire que ça n’existe pas. Mais il serait bien quand on fait un traitement de pharmacopéee, qu’on n’oublie pas qu’on peut toujours aller consulter et faire des examens pour être sûr qu’on est guéri ou pas. Il ne faut pas oublier aussi que certains traitements de la pharmacopée sont à l’origine même des complications d’une maladie qui n’était pas déjà compliquée. Et ça peut donner d’autres complications en dehors du foie, notamment les maladies rénales. Ces informations sont très importantes parce qu’il y a maintenant des gens qui exploitent ce filon devenu un moyen pour gagner de l’argent. Partout à tous les feux, on voit des affiches "Traitement de l’hépatite’’.

Comment éviter cette maladie ?

Déjà pour l’éviter, il y a des mesures communes et il y a des mesures individuelles. Tout le monde doit faire le dépistage. La vaccination contre l’hépatite B existe et est faite chez les enfants depuis 2006, mais à partir de deux mois. Mais la nouvelle politique du gouvernement fait qu’elle est faite maintenant chez les enfants à la naissance et c’est ce qui est meilleur. Les autres mesures, c’est de ne pas utiliser les objets tranchants en commun, de protéger les rapports sexuels.

La vaccination comporte trois séries de vaccins. Après la première dose, on fait à un mois une deuxième dose et un rappel à six mois. Quand on le fait, il faut vérifier si ça a marché. Si ça a marché, dans ce cas, le taux des anticorps anti HBs sera élevé dans le sang et c’est pour toute la vie. On n’a pas besoin de refaire la vaccination.
Les mères qui vont à la CPN (consultation prénatale) doivent se faire dépister, se faire suivre pour qu’on puisse à temps mettre le traitement si c’est nécessaire, afin d’éviter la transmission à l’enfant parce qu’il y en a qui sont dépistées mais qui ne viennent en consultation qu’après l’accouchement.

Le dépistage peut se faire à tout moment pour toute personne. Il y a des associations qui interviennent dans le domaine de la lutte contre les hépatites B, elles organisent des campagnes de dépistage. Mais individuellement on peut aller dans un centre et à travers son médecin ou à travers son infirmier ou sage-femme, on peut demander le test de dépistage qui peut être fait dans un laboratoire. Actuellement, il y a l’association Assaut Hépatite qui est très active dans le domaine de la lutte contre les hépatites virales qui fait la vaccination à des coûts accessibles à la population.

Quelles sont les statistiques des personnes atteintes d’hépatite B dans la région des Hauts-Bassins ?

Dans les Hauts-Bassins, la prévalence est entre 9,1 et 10%. Nous n’avons pas de statistiques exactes sur la part de mortalité due à l’hépatite B, mais les plus grandes causes de mortalité dans notre service sont dues à la cirrhose et au cancer du foie.
Y a-t-il des mesures préventives prises au niveau de l’hôpital Sourô-Sanou ?
Les mesures préventives, c’est déjà à travers la sensibilisation, les actions que vous, journalistes, menez par exemple ; la sensibilisation au dépistage, la vaccination. C’est ce qu’on peut faire parce qu’on sait que le vaccin est protecteur. Donc pour ceux qui ne sont pas vaccinés, c’est de les dépister d’abord pour voir s’ils n’ont pas le virus, et faire la vaccination pour ceux qui n’ont pas le virus dans le corps. Pour ceux qui ont le virus dans le corps, c’est de bénéficier d’un suivi et d’un traitement quand c’est nécessaire afin d’éviter l’évolution vers des complications.

Quel est votre dernier mot ?

Le dernier mot, c’est de dire que l’hépatite B est une réalité, mais à côté, le virus de l’hépatite B n’est pas la seule cause de l’hépatite. Il y a d’autres virus dont le Delta qui peut surinfecter ceux qui ont déjà l’hépatite B. Il y a l’hépatite C également et ces trois virus donnent une hépatite qui va devenir grave et qui va évoluer vers une maladie chronique qui donnera la cirrhose et le cancer. Il y a d’autres hépatites virales dont l’hépatite A et E qui peuvent aussi être mortelles dans certaines circonstances mais qui n’évoluent pas pour devenir chroniques. Donc c’est de savoir que ça existe et quand on fait le dépistage pour l’hépatite B, qu’on le fasse en même temps pour l’hépatite C aussi. Actuellement, le gouvernement a rendu le traitement pour l’hépatite C gratuit et c’est un traitement qui entraine la guérison. Il y a aussi l’alcool, l’obésité et des traitements par automédication qui sont causes d’hépatites aussi graves que les virus.

Propos recueillis par Haoua Touré
Lefaso.net

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