LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Avec de la persévérance et de l’endurance, nous pouvons obtenir tout ce que nous voulons.” Mike Tyson

Vox Christi à la 12e édition du « World Choir Games » en Corée du Sud : Deux médailles et à la clé un rang dans le classement mondial des chorales

Publié le jeudi 3 août 2023 à 22h15min

PARTAGER :                          
Vox Christi à la 12e édition du « World Choir Games » en Corée du Sud : Deux médailles et à la clé un rang dans le classement mondial des chorales

Narcisse Wendpouiré Wermi, professeur de musique. Il est le président fondateur et directeur technique du chœur « Vox Christi ». Le chœur Vox Christi était en Corée du Sud, plus précisément dans la ville de Kangnŭng où il a participé à la 12e édition du « World Choir Games ». Malgré un groupe restreint, le chœur est parvenu à arracher deux médailles dans deux catégories. Dans cet entretien que M. Wermi a bien voulu nous accorder, il revient sur les difficultés financières pour convoyer le groupe et sur les péripéties de ce voyage. Il fait également un clin d’œil à tous ceux qui ont soutenu le groupe pour qu’il puisse prendre part à cette compétition mondiale de chorales dont l’issue leur permettra d’être logé dans un classement mondial.

LeFaso.net : Parlez-nous un peu de votre séjour en Corée du Sud

Wendpouiré Narcisse Wermi : Le chœur « Vox Christi » a été repéré et choisi pour représenter le Burkina Faso à la 12e édition de « World Choir Games » en Corée du Sud, précisément dans la ville de Kangnŭng. C’est une compétition qui équivaut à la coupe du monde ou si vous voulez, aux jeux olympiques des chorales.

Comment s’est passé ce repérage ?

Ça a été un travail de longue haleine. La préparation a commencé depuis 2020 au Ghana où j’ai eu l’opportunité de rencontrer de grands noms de la musique de chorale. Ensuite nous avons essayé de construire ensemble une équipe au plan international pour des suivis. Parce qu’il fallait atteindre un certain niveau pour participer aux compétitions. Et pour ce suivi, il a fallu que de grands maîtres viennent au Burkina, par moment, pour voir le travail. Il y en a deux qui sont passés dans ce sens. Et cette année, nous avons été jugés aptes à prendre part à cette compétition.

Comment avez-vous trouvé le peuple sud-coréen ?

C’est un peuple qui est très accueillant, très aimable. Après la compétition, nous avons eu la chance d’être accueilli par une paroisse à Séoul pour un bref séjour. Et ils nous ont fait visiter des endroits historiques de la ville de Séoul. Ce que nous avons apprécié, c’est la discipline des Sud-Coréens. Ce sont des gens très disciplinés et ils sont fiers de leur culture. Ils se sont très bien occupés de nous. Nous avons même eu l’opportunité de donner un concert dans une des églises de la ville. Nous avons rencontré également l’archevêque de la Corée du Sud qui n’a pas manqué de souligner que son pays entretien des relations sur le plan catholique avec l’Église catholique du Burkina Faso. Il nous a même demandé au passage, de transmette ses hommages au cardinal Philipe Ouédraogo lorsque nous serons de retour chez nous.

Vous êtes revenus avec deux médailles. Parlez-nous-en…

Il faut dire qu’il y avait 346 chorales de 46 pays dans plusieurs catégories. Quand on prend par exemple dans le cas des jeux olympiques, il y a la natation, il y a les 100 mètres, il y a plusieurs disciplines. Donc dans le chant, il y avait aussi plusieurs disciplines et nous avons compéti dans ce que l’on appelle le "Chamber Choir " catégorie C7. On a aussi participé à la catégorie de chant folklorique qui est la catégorie C27. En effet, le chant folklorique c’est un peu des chants de chez nous mélangés au rythme traditionnel. Donc, c’est dans ces deux grandes catégories que nous avons eu des médailles d’argent.

Qu’est-ce que ces médailles représentent pour vous ?

Je tiens à souligner que l’on aurait aimé avoir des médailles d’or. Mais les médailles que nous avons reçues sont aussi un couronnement pour nous : pour tant d’effort que nous avons fourni, pour le travail qui a été fait. Ces médailles nous indiquent également que des efforts supplémentaires restent à consentir. C’est pour nous une petite victoire et nous devons nous préparer pour une plus grande victoire. Donc ces médailles valorisent un tant soit peu notre travail. Nous en sommes fiers, parce qu’on se rend compte que nos efforts sont en train de porter des fruits. Et cela nous donne beaucoup plus d’énergie pour aller de l’avant.

Quelles sont les opportunités, les portes que ces médailles peuvent vous ouvrir ?

Aujourd’hui, le groupe est reconnu comme étant une chorale répondant aux normes internationales. Et cela est une fierté pour tout le Burkina Faso. Dans les prochains jours, il y aura un classement sur le plan mondial et nous serons dans ce classement. Il aura par conséquent, un rang sur le plan mondial. Je ne sais pas quel rang nous allons occuper mais une chose est sure, nous aurons un rang dans cette liste pour avoir participé à la compétition et remporté deux médailles d’argent. Désormais nous sommes suivis et cela nous ouvre les portes pour d’autres compétitions. Maintenant, cela va dépendre des formes de soutien que nous allons avoir de la part de notre ministère de tutelle pour pouvoir honorer toutes ses compétitions. Sinon aujourd’hui, le groupe a la capacité de participer à toute forme de compétition de chant choral à travers le monde et les invitations vont venir. Nous espérons que le ministère pourra nous soutenir pour que nous puissions participer et représenter le Burkina Faso valablement.

Quelles sont les perspectives immédiates de Vox Christi ?

Actuellement, ce qui nous tient à cœur c’est de pouvoir partager ce que nous avons eu comme expérience avec les autres chorales du Burkina Faso. Nous allons essayer de faire un programme dans ce sens et voir comment nous allons pouvoir nous repartir pour appuyer ceux qui sont intéressés. Ensuite, nous allons essayer de nous réorganiser pour travailler sur d’autres opportunités qui sont devant nous, d’autres défis à relever. Donc il y a du travail qui nous attend.

Est-ce que vous avez eu des contacts d’autres chorales étrangères qui sont prêtes à venir au Burkina Faso ?

Lorsque j’ai commencé avec le groupe, il y avait des chorales sur le plan international qui nous suivaient. A chaque fois, je prenais des vidéos pour montrer aux autres. Et nous avons eu cette opportunité de rencontrer ces grandes chorales. Nous avons fait également des partages et des échanges. Beaucoup sont intéressés. A chaque fois que nous les invitions, c’était des moments de grande joie pour eux. Il y a environ une centaine de chorale qui est intéressée de venir au Burkina Faso. Donc pourquoi pas, on pourrait créer des occasions pour faire venir ces chorales et c’est le tourisme burkinabè qui va en bénéficier car ces personnes pourront faire des visites et découvrir les choses.

Vous êtes allés présenter les médailles au ministre, quels ont été ses propos à votre endroit ?

Le ministre (Ndlr : Rimtalba Jean Emmanuel Ouédraogo) a vu comment nous nous sommes préparés. Nous l’avons également rencontré à plusieurs reprises. Il était satisfait de notre participation. Il nous a beaucoup encouragé à ne pas baisser les bras. Il nous a en outre exhorté à persévérer et à défendre les couleurs du drapeau du Burkina Faso partout où besoin sera. Ces propos ont essentiellement porté sur ces mots de félicitations et d’encouragement à notre endroit. Car il estime que c’est une prouesse au regard de nos conditions de préparation. Il s’est dont réjoui et a encouragé à aller de l’avant.

Quels sont vos projets à long terme ?

Vox Christi entend d’abord contribuer au développement du chant choral au Burkina Faso. Dans ce sens, si les moyens nous le permettent, nous comptons ouvrir un institut de formation spécialisé dans le chant choral.

Pour rallier la Corée du Sud il vous faut forcément des partenaires. Pouvez-vous nous en dire un peu plus ?

Il faut noter que ce n’était pas facile. Nous avons quelques partenaires auprès de qui nous sommes allés pour expliquer le projet et demander leur appui. Il y en a qui se sont manifestés et d’autres étaient un peu réticents. Mais nous les comprenons parce qu’avec le contexte actuel du Burkina Faso, c’est assez difficile. Il y a d’autres aussi qui ont décliné l’offre. Mais c’est essentiellement deux structures à savoir le ministère en charge de la culture et le Bureau burkinabè des droits d’auteurs (BBDA) qui nous ont accompagnés. Il y a aussi un mécène qui souhaite garder l’anonymat, qui nous a soutenus.

Vous étiez combien de choristes pour cette aventure en Corée du Sud ?

Nous sommes allés avec 20 choristes sur 40. Il faut noter qu’initialement, nous avions prévu d’emmener 30 personnes. Mais eu égard aux difficultés financières, nous avons dû nous contenter d’une vingtaine.

Est-ce que cela n’a pas joué sur votre rendement ?

Bien-sûr cela a pesé négativement sur le rendu. Je vous explique. C’est comme si le Burkina Faso devait affronter sur le plan du football une autre équipe. Et le Burkina au lieu de présenter 11 joueurs au départ, pour des soucis, il n’y a que 7 joueurs qui doivent croiser une équipe de 11 joueurs. Vous voyez alors le déséquilibre. Et à ce moment il faut essayer de modifier le plan de jeu et c’est ce que nous avons dû faire. Nous avions préparé des chants avec 30 personnes et à l’arrivée, comme nous étions que 20, il fallait tout modifier. Donc c’est cela qui a pesé négativement sur nous et ne nous a pas permis de mieux faire. Nous nous sommes préparés pendant un certain temps avec l’effectif, deux ou trois jours avant, il a fallu tout modifier.

Et ceux qui n’ont pas pu effectuer le déplacement ; ne se sont-ils pas sentis frustrés ?

Je pense qu’ils comprennent mais de façon humaine le moral peut prendre un coup. Mais vu les difficultés du groupe, je pense que tout un chacun a compris. Au Brésil, nous avions pu nous déplacer avec un bon effectif. Nous étions à cette compétition au nombre de 30 choristes.

Nous avons appris que vous êtes allés par vague ?

En fait, quand on a eu les billets d’avion, il manquait de la place dans les compagnies et c’est pour cela qu’on a dû s’organiser pour aller par vague. Pour la première vague nous avons eu onze places. Ensuite, il y a eu une place pour un élément qui nous a rejoints deux jours après. Ensuite, il y a 5 personnes qui sont venus avec un autre vol. Au retour aussi, c’était un peu comme ça. Et pour la première compétition, la catégorie C17, on était 14 sur la scène. C’est après que les autres sont venus pour la catégorie C27. A notre arrivée, quand nous avons vu le drapeau du Burkina Faso flotter au milieu des autres drapeaux du monde, on était fiers. Alors on s’est dit et si on n’était pas venu ?

Sur place comment vous êtes organisé pour les répétitions et avez-vous un local pour cela ?

Nous répétons essentiellement deux fois par semaine au Musée national sis à Dassasgho ou nous sommes en location et c’est à temps partiel. Il y a des jours ou d’autres viennent aussi louer le cadre et nous sommes obligées d’annuler la répétition du jour ou changer carrément de cadre de travail. Nous répétons les mercredis pendant deux heures et les dimanches, nous avons 4h de répétitions.

Mais quand nous avons de grands programmes, nous déterminons un 3e jour de répétition. On essaie souvent de faire des veillées de répétition. On est à la recherche d’un local propre à nous, plus adéquat pour les répétitions. Un cadre ou on pourra faire de l’acoustique. Ce sont de véritables soucis mais les choristes sont tellement passionnés si bien qu’ils font preuves d’une belle résilience. Il y a aussi le manque criard d’instruments de musique. Donc tous ceux qui pourraient être sensible à ces difficultés, leurs soutiens seront les bienvenus. Aussi, il y en a qui pense que le groupe est fermé. Je profite de cet entretien pour dire que le groupe est tout à fait ouvert. Les personnes qui voudraient expérimenter le chant peuvent nous contacter via notre page Facebook. Nous allons donnez-les conditions pour pouvoir rejoindre le groupe.

Avez-vous un appel à lancer ou des mots de remerciement ?

Je voudrai dire un grand merci aux premières autorités du pays. Merci au ministre de la culture qui est toujours à notre écoute. Je voudrais dire merci aussi au BBDA pour son appui, à M. Apollinaire Compaoré, PDG du Groupe Planor Afrique, Abdoul Karim Bandé, DG de Elite RH. Je dis aussi merci à BF1 qui nous accompagne depuis 2020 dans la communication, sans oublier notre mécène. Je dis particulièrement merci à tous les parents de nos choristes parce qu’il y en a qui sont très jeunes et les parents ne cessent de les soutenir dans leur passion de venir à la répétition, rentrer à des heures tardives.

Propos recueillis par Obissa Juste Mien

PARTAGER :                              
 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique