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Gestion des conflits : Le cas de Kampala, une expérience réussie

Publié le mardi 24 janvier 2006 à 07h15min

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Le 30 novembre 2004, un litige opposant les agriculteurs et les éleveurs de Mationgou, un village de Kampala, localité située à une vingtaine de kilomètres à l’Est de Pô, province du Nahouri, a fait deux morts, de nombreux blessés et des dégâts matériels. Les autorités administratives et locales se sont investies dans l’apaisement de la crise et la résolution du problème. Quand on parle de Kampala, certains penseraient à cette ville ougandaise.

Au Burkina, ce Kampala n’est rien d’autre que cette localité de six mille (6 000) habitants située à une vingtaine de kilomètres à l’Est de Pô. Composé de huit villages : Badongo, Dongo, Fanian, Gôho, Gougogo, Mationgo, Nakoum et Yago, Kampala est « réputé » pour ces litiges fonciers entre agriculteurs et éleveurs. Les cas de Dongo et de Mationgou sont illustratifs.

Courant 2004, ces deux hameaux de culture ont connu des conflits meurtriers. Des dévastations de champs d’agriculteurs par des troupeaux d’éleveurs ont été à l’origine de ces différends. Que faire face à une telle situation quand on sait que les deux parties sont contraintes à vivre ensemble ? Les autorités ont alors trouvé des terrains d’entente .

Ainsi, selon M. Marcel Bambara, préfet de Pô, la médiation a été un parcours de combattant et a mobilisé les ministres de l’Administration territoriale et de la Décentralisation, de l’Action sociale et de la Solidarité nationale, les autorités locales et la gendarmerie qui a fait le guet jusqu’à l’apaisement de la situation.

Un cadre de concertation a été mis en place dès le lendemain de la crise et a regroupé les agriculteurs, les éleveurs, les autorités coutumières et religieuses et le comité villageois de gestion des terroirs. C’est avec ce cadre dit-il que « nous avons négocié le retour des éleveurs (qui avaient été contraints à déguerpir les lieux) la base des clauses dont les plus importantes sont sur les réparations coutumières et le recours aux services administratifs (police, gendarmerie, haut-commissariat) pour les éventuels conflits ». Depuis le 11 mars 2005, les éleveurs de Dongo et de Mationgo ont été réinstallés dans leur site d’origine.

Pour mettre les deux parties en confiance et permettre les « frottements » entre elles en vue d’un retour effectif à la paix, des écoles ont été construites dans les deux localités. Un projet de construction d’un centre de santé et la promotion sociale (CSPS) est également en cours d’exécution à Mationgo. Toute chose qui a été appréciée par les populations, à en croire le président du comité villageois de gestion des terroirs de Kampala, M. Gustave Pedambou. Il soutient que « de nos jours les deux parties belligérantes, grâce aux différentes actions de sensibilisation que nous avons menées, ont compris la nécessité de se tendre la main, surtout que depuis la mise en place du cadre de concertation, des rencontres périodiques entre elles sont organisées dans le but d’instaurer un climat de tolérance, de confiance et entre les populations ». Ce cadre leur permet également de connaître leurs droits et leurs devoirs vis-à-vis des autres.

A. Verlaine KABORE


Les événements du 30 novembre 2004 : Agriculteurs et éleveurs s’en souviennent

Amadou Sondé (éleveur à Mationgo) :

« Je suis à Mationgo il y a de cela une vingtaine d’années. Nous vivions en parfaite harmonie avec les agriculteurs jusqu’au 30 novembre 2004, jour des affrontements meurtriers. J’ai moi-même été victime et sauvé de justesse grâce à l’arrivée des autorités sur les lieux. Je venais d’être haché à la tête et je baignais dans mon sang. J’ai eu mes huttes détruites et 84 petits ruminants abattus.

Je venais d’arriver de La Mecque, les valises et les effets d’habillement que j’ai ramenés, ainsi qu’une somme d’argent de 500 000 F CFA ont été consumés. J’ai perdu un cousin, un richissime très connu par les populations de Kampala et de Pô. Il s’appelait Djibrill Bandé dit « l’hadji gourounga » : il a été dépecé comme un animal. C’était horrible.

Je souhaite que ce cadre de concertation mis en place par les autorités puisse trouver les solutions définitives à cette crise, car la plupart de nos terres ont été retirées. Les autorités nous ont trouvé d’autres zones de pâturages, mais la peur nous habite toujours ».

Dounazoua Edouard Nion, représentant administratif de Dongo :

« Je souhaite que plus jamais de tels événements ne se produisent ici à Kampala. En tant que représentant administratif, j’ai été emprisonné pendant 7 mois. Il a fallu une telle situation pour que je connaisse la prison. Je suis actuellement en liberté provisoire sur décision du Tribunal de grande instance de Pô en attendant le jugement. Mon seul souhait, c’est le retour de la paix. J’ai la conviction que grâce à l’action entreprise par les autorités dans ce sens, la paix s’installera définitivement ici à Kampala ».

Idrissa Sondé, éleveur :

« Nous voulons que l’on aménage des zones de pâturages adéquates pour nos troupeaux, car nous nous plaisions ici à Kampala. La zone a été libérée de l’onchocercose et cela est un atout pour notre élevage ».

Propos recueillis par A.V.K.
Sidwaya

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