Tout le monde ou presque est à la recherche d’une parcelle par exemple, au point de donner des insomnies aux maires des villes et bientôt des communes rurales. Or, si l’on acquiert une parcelle, c’est bien pour la mettre en valeur. Avec quoi ? Du fric, bien entendu !

Dans les zones déjà loties, singulièrement à Ouagadougou, les maisons poussent non plus en banco, mais bel et bien en ciment, les duplex ayant remplacé les maisons « 20 tôles » en ras de terre. Ah ! la recette, c’est bien entendu le système « D » : on se débrouille ! On se débrouille pour trouver son « chez-soi » ; on se débrouille pour envoyer ses enfants à l’école privée, au lycée privé, à l’université privée.

On se débrouille pour avoir un « au revoir l’Europe » ; on se débrouille pour s’acheter une moto (et on en achète si bien que les maisons vendeuses des motos se multiplient et se démultiplient) ; on se débrouille pour acquérir un téléphone portable dernier cri, même si toutes ses fonctionnalités ne sont pas nécessaires ou si aucun opérateur ne les a mises en service ; on se débrouille pour se trouver du carburant chez un ami ou parent directeur, DG ou ministre (quitte à dénoncer la pratique en rendant coupable le donateur). On se débrouille pour faire un mariage pompeux ou des baptêmes onéreux, quand ce ne sont pas des funérailles de luxe.

On se débrouille pour rapatrier des corps au village, même quand on n’a pas soi-même un véhicule. On se débrouille pour aller chaque jour au maquis. On se débrouille ! C’est parce qu’on se débrouille trop bien qu’il arrive que les gouvernants ne voient ni ne sentent la vie chère au Faso. Sans oublier que les médias donnent rarement à voir ou à entendre les gémissements des masses.

Bien sûr, il y a les déclarations des syndicats et des partis politiques à longueur de page, mais quand un politique écoute son semblable ou un syndicat, le sens des mots n’est plus le même. Or, en dehors des horribles images de victimes de faits divers, les pages couleurs des feuilles de choux et les petits écrans ne reflètent que du beau. Nulle trace de la misère dite ambiante.

Naturellement, parce que personne ne les force à prendre le pouvoir, les gouvernants se doivent d’être les « chercheurs » de solutions, ne serait-ce que pour mériter les privilèges de leur position. On comprend donc que la clameur contre la vie chère soit destinée au pouvoir. Mais attention, même s’il jouait sa partition - augmentation des salaires ou réduction des taxes - si les citoyens ne réduisent pas leur boulimie de la consommation, la vie chère aura de beaux jours devant elle.

Il faut parfois cesser de se débrouiller pour ne pas vivre au-dessus de ses moyens et même pour pouvoir l’exiger des autres. Cela permettra d’ailleurs de mettre en uvre les enquêtes sur les signes extérieurs de la richesse et de lutter efficacement contre la corruption.

Sans vouloir dédouaner les gros requins, ce n’est pas toujours au sommet que les magouilles permettent de faire bonnes recettes. Ils sont de plus en plus nombreux dans l’administration publique par exemple, les agents d’exécution qui dament le pion matériel et financier à des cadres de conception qui n’ont que leurs titres et grades qui ne se mangent pas.

Pour que la vie ne soit pas chère, il faudra supprimer les sources de son enchérissement à tous les niveaux ! Ne pas se tromper d’adversaire, c’est garantir le succès d’une lutte.

Journal du jeudi