Dialogue : Allô ! C’est bien le « 18 politique ? »
Du temps de l’ODP/MT, c’était l’homme le plus médiatisé du gratin politique, très proche, affirmait-on alors, de Blaise Compaoré ; c’était l’un des « hommes du président », l’un des dirigeants de ce parti que ses contempteurs avaient affublé de tous les qualificatifs : le plus célèbre reste « mange et tais-toi ». Et le centralisme démocratique qui tenait lieu de principe directeur dans la gestion du parti n’était guère fait pour arranger les choses. Alors on repensa autre chose...
A le voir de près il a l’allure d’un « fonceur », peut être, mais un fonceur dont le réalisme et l’esprit conciliateur étonnent presque lorsque s’imposent certains faits et que d’urgentes solutions doivent y être apportées. Président de l’Assemblée nationale, c’est paradoxalement le plus discret et le moins disert des parlementaires de son parti. Homme du consensus ?
C’est ce qu’on dit de lui tout en soulignant qu’il compte des amis dans presque tous les partis. Serait-ce alors la raison de son « silence officiel » face à la saignée que vient de subir le parti qu’il dirige ? Naboho Kanidoua, pour sa part, aimerait l’entendre à propos, sur bien d’autres choses aussi..
Roch : Alors, ça se prépare bien, les municipales ?
Kanidoua : Tu parles ! C’est l’incertitude totale !
Roch : C’est une question de sensibilisation !
Kanidoua : Avec ces militants qui courent dans tous les sens...
Roch : Mais... y a pas de peur si on est candidat et accepté par les bases !
Kanidoua : C’est que certains de ceux qui sont partis semblent plus influents dans leurs terroirs !
Roch : Voilà ! Ce sont des choses dont il faut tenir compte quand on fabrique des listes ! Je reconnais que nous avons été souvent négligents de ce côté...
Kanidoua : Pourtant ça marchait !
Roch : Tu sais, on ne peut pas s’asseoir tranquillement à Ouagadougou et savoir réellement ce qui se passe dans les villages !
Kanidoua : Y a les rapports, non ?
Roch : Chaque rapport comporte une marge d’erreurs plus ou moins grande. C’est pourquoi les élections constituent un bon baromètre...
Kanidoua : Sans doute faudrait-il explorer dans nos vieilles recettes de l’ODP !
Roch : Au jour d’aujourd’hui, ces vieux cris de ralliement sonneraient creux !
Kanidoua : Tu penses ?
Roch : Ah oui ! La création du CDP constituait tout un symbole ! Le symbole d’une rupture avec un passé que beaucoup n’appréciaient pas réellement.
Kanidoua : Mais c’est l’ODP/MT qui s’est transformée !
Roch : Fais très attention pour ne pas être accusé de falsifier l’histoire !
Kanidoua : Mais, c’est vrai !
Roch : En partie, oui ! N’oublie pas que d’autres formations se sont sabordées pour y entrer ! Et cela a énormément contribué à donner une crédibilité au CDP...
Kanidoua : Tu veux parler de la CNPP/PSD ?
Roch : Entre autres, oui ! N’oublie pas que beaucoup de Burkinabè avaient une peur bleue de l’ODP !
Kanidoua : J’en sais quelque chose... c’est vrai, le CDP est arrivé à temps...
Roch : Ah, ah, ah !
Kanidoua : Qu’est ce qui t’amuse ?
Roch : Tu sais, c’est compliqué au Burkina ; on voit d’abord les individus avant tout programme et autres papiers...
Kanidoua : Et alors ?
Roch : Et alors ? C’est parce que c’est Blaise Compaoré qu’on a réussi le CDP. Quelqu’un d’autre n’aurait sans doute pas pu y parvenir.
Kanidoua : C’est le moment où jamais qu’il intervienne pour colmater les brèches dans notre tuyauterie !
Roch : Parce que tu penses que c’est si facile !
Kanidoua : Toi, tu es le président du parti que lui a créé. Alors il faut lui en parler ! Il a tout de même un mot à dire dans cette affaire-là !
Roch : Qui te dit que nous n’en avons pas parlé ?
Kanidoua : Ah... dans ce cas il faut démocratiser l’information !
Roch : En tant que président, j’ai toujours informé les instances légales du parti lorsqu’il y a des décisions importantes ! Si je ne dis rien, c’est qu’il n’y a rien à dire, pour le moment en tout cas...
Kanidoua : Rien à dire pendant que nos militants s’évadent ?
Roch : Ah, ah ! D’abord personne ne les avait forcés à venir, ensuite aucun mors ne leur avait été mis aux dents !
Kanidoua : Mais... c’est pas sérieux !
Roch : Je ne sais pas ce que tu voudrais dire, mais n’oublie pas que nous sommes en démocratie...
Kanidoua : On entre dans un parti, on se fait connaître et puis, hop, du jour au lendemain on plie bagage pour d’autres horizons !
Roch : Eh oui, c’est comme ça ! Y a quelqu’un qui a dit qu’en politique la trahison n’est qu’une affaire de date...
Kanidoua : Ça, c’est pire que la trahison ! Tous ces gens-là qui ont eu de l’argent et connu les honneurs grâce au parti...
Roch : Il faut justement travailler à fidéliser les militants. En cela, je pense que la décantation serait une bonne affaire pour le parti.
Kanidoua : Je m’explique difficilement l’attitude de l’ADF...
Roch : Le RDA a une longue tradition de stratégie politique !
Kanidoua : A présent on ne sait pas s’il est un parti de l’opposition ou un parti de la mouvance présidentielle...
Roch : Sur ce plan-là, on risque de jouer longuement avec les mots ! Eux, ils disent avoir supporté un individu et non un parti ! Dans tous les cas, ils devront bien préciser leur statut !
Kanidoua : Alors, qu’ils le fassent vite et ce sera clair !
Roch : Je pense que ces gens-là visent les législatives...
Kanidoua : Quoi ?
Propos démocratiquement recueillis par JJ