LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Soyez un repère de qualité. Certaines personnes ne sont pas habituées à un environnement où on s’attend à l’excellence.” Steve jobs

Sondage CGD à Ouagadougou : attention au syndrome Jospin (1)

Publié le dimanche 4 septembre 2005 à 23h03min

PARTAGER :                          

Dans les pays occidentaux, ce sont des techniques utilisées régulièrement pour connaître la "cote" d’une personnalité ou pour déterminer les pourcentages (oui ou non et abstention) lors d’un vote. Des institutions se sont même spécialisées (SOFRES, BVA en France) en la matière.

Le sondage, il est vrai, est loin d’être une science exacte, mais n’en traduit pas moins les tendances à l’instant. Au Burkina, le CGD a tenté l’expérience, une première, en effectuant un sondage (27 juin-7 juillet) sur l’image, la notoriété et les intentions de vote lors de la présidentielle de novembre 2005. Du reste, les résultats de ce sondage (financé par le centre culturel américain) ont fait l’objet d’une émission télévisuelle qui sera diffusée demain samedi sur Canal 3 et ultérieurement sur la TNB.

Technique des sciences sociales, le sondage a des règles. Pour le cas d’espèce, le CGD a utilisé la méthode des quotas et a sondé un échantillon de 1200 personnes de 18 ans et plus originaires des 13 régions du Burkina mais résidant dans la commune de Ouagadougou. Les critères qui ont présidé au choix des enquêtés sont : la compétence, l’honnêteté, les actions passées, les actions futures, les moyens financiers, l’appartenance au parti, l’âge du candidat, la région d’origine.

Mais pourquoi un sondage ? Le président du CGD, Augustin Loada, répond : "Il s’agit de mettre à la disposition des politiques un instrument, un Faso baromètre, c’est au nom de la promotion de la bonne gouvernance démocratique et de la liberté d’initiative que nous l’avons réalisé".

A tout seigneur, tout honneur, c’est sur le chef de l’Etat sortant notamment par son septennat ou plutôt quelques considérations sur son septennat que débutent les données de ce travail. Ainsi, entre le 27 juin et le 7 juillet 2005, sur les 1200 sondés, 30% estiment que l’accès aux soins de santé a diminué, 3/4 des personnes pensent que la situation de l’emploi s’est détériorée, 60% estiment que les commodités intérieures (eau et électricité) se sont améliorées. In fine 86,5% de la population ouagalaise pensent que la pauvreté s’est accentuée.

Puis le sondage s’est intéressé à 16 personnalités en vue dans le landerneau politique : Laurent Bado, Blaise Compaoré, Simon Compaoré, Salif Diallo, Roch Marc Christian Kaboré, Ali Lankoandé, Gilbert Ouédraogo, Ernest Nongma Ouédraogo, Philippe Ouédraogo, Ram Ouédraogo, Emile Paré, Bénéwendé Stanislas Sankara, Norbert Tiendrébéogo, Soumane Touré, Hermann Yaméogo, Ernest Paramanga Yonli. Ces personnalités ont été passées au crible de 3 critères qui sont la notoriété spontanée (on demande à un enquêté de donner le nom d’un politique), la notoriété suggérée (on donne le nom d’un homme politique à un enquêté) et enfin la confiance et la capacité à gouverner.

Pour la notoriété spontanée, Blaise Compaoré tient la tête avec 77,4% de connaissance, suivi de Simon Compaoré (51,7%). Puis viennent Salif Diallo, Yonli, Hermann, Roch ; Touré Soumane ferme la marche, alors que Laurent Bado est 5e, Me Sankara 6e, Gilbert 7e et Ram 8e. Au niveau de la notoriété suggérée, Blaise et Simon conservent leur place respectivement avec 99,5% et 97,8%.

Pour le reste, l’ordre est un peu bouleversé : Hermann prend la place de Salif Diallo et monte à la 3e place devant Yonli, seul Roch demeure à son rang (6e) de même qu’Emile Paré (11e) et Norbert Tiendrébéogo (12e), Touré Soumane et Lankoandé tirent la queue. Concernant la confiance, deux groupes ont été identifiés.

Le premier groupe est constitué essentiellement de politiques de la mouvance présidentielle, sauf de Me Sankara Bénéwendé, qui arrive 6e. Ici l’ordre est également respecté, avec le président-candidat Blaise en tête (80,7%). Me Sankara bouscule ici le classement, d’où son caractère d’"outsider".

Le second groupe fait apparaître Nongma Ernest Ouédraogo et Hermann Yaméogo, qui ont des déficits de confiance très criards. Selon le sondage, l’implosion du parti de Nongma en plusieurs autres partis et les "prises de position de Hermann contre l’orientation de la politique étrangère du chef de l’Etat et ses incessants va-et-vient entre la mouvance et l’opposition" expliquent ces déficits.

Eléments notables également dans ce second groupe : deux candidats à la présidentielle se voient "sanctionnés" par les enquêtés : Laurent Bado et Emile Paré pour cette ténébreuse histoire de 30 millions qui a défrayé la chronique. Laurent Bado a été plus désavoué par les analphabètes que par les instruits, par respectivement 57,8% et 24,1%.

La capacité à gouverner a montré également un tableau similaire à celui de la confiance, excepté (encore !) Me Sankara, qui, curieusement, a un bilan tendant vers zéro (0,3%). Est-ce parce qu’il n’a jamais gouverné que les électeurs de Ouagadougou lui dénient cette capacité ?

Le sondage s’est également appesanti sur certaines opinions concernant ces personnalités politiques. Ainsi, en ce qui concerne Blaise, beaucoup trouvent que c’est un patriote, qu’il oeuvre à la promotion de la femme et qu’il mène une bonne politique étrangère (84,7%). Et là, si le chef de l’Etat a gagné en épaisseur politique, ses positions sur la crise étrangère expliquent qu’il surfe au sommet.

Est-il un vrai démocrate ? Les enquêtés sont restés dubitatifs (20,9 des instruits et 34,7% des analphabètes). Il faut également mieux faire en matière de sécurité et des droits de l’homme et surtout endiguer la corruption, qui gagne du terrain.

40% estiment que Blaise a fait de bonnes choses dans le passé, 50% pensent cela pour le présent et 60% croient qu’il va en faire davantage dans le futur. Détail de taille : 10% estiment qu’il ne fait rien de bon, que surtout il n’a pas fait de bonnes actions dans le passé, et qu’il y a un passif que Blaise doit vider. La IVe République, ayant été enfanté par un régime d’exception, n’est sûrement pas étrangère à cet état de fait.

Salif Diallo est apprécié pour son action présente, avec des indécis faibles. Concernant Roch, 40% des personnes ne se prononcent pas sur ces actions. Mais en tout temps et en tout lieu lors du sondage, moins de 6% n’apprécient pas les actions du président de l’AN. Quant à Gilbert, plus de 50% sont indécis quant à ses actions.

Enfin, le sondage a donné l’état des lieux des forces en présence à la présidentielle de 2005 : 68,9% des enquêtés sont déjà inscrits sur les listes électorales. Avec la révision exceptionnelle des listes et selon la CENI, 1,5 million d’inscrits s’ajouteront aux 3 millions d’électeurs de 2002. Ce qui donnera un corps électoral de 4,5 millions.

Et si la présidentielle avait lieu demain pour qui voteront-ils ? En faisant des oppositions systématiques on a les données suivantes :

Blaise # Ali Lankoandé (77% # 2,6%)

Blaise # Hermann Yaméogo (76,3% # 4,8%)

Blaise # Gilbert Ouédraogo (73,9% # 5,9%)

Blaise # Bénéwendé Sankara (71,5% # 11,5%).

Le candidat qui a plus de chance de remporter la présidentielle (réponse spontanée) est Blaise Compaoré (87,10%). Avec ce sondage circonscrit à la commune de Ouaga, le candidat-président tient la dragée haute, mais attention, ce n’est qu’un sondage.

Même si ça donne les tendances à un moment donné. Dans le cas d’espèce et en attendant les résultats du sondage national (prévu pour octobre) Blaise lui-même, interrogé le 10 août à Ziniaré sur un éventuel ballotage, a répondu qu’en démocratie tout est possible.

Zowenmanogo Dieudonné Zoungrana

L’Observateur Paalga

Notes :

(1) En France, lors de la présidentielle d’avril 2002, les sondages annonçaient encore le traditionnel duel PS # RPR, aujourd’hui UMP, par Chirac et Jospin interposés. Ils ont tous été démentis, car le Front national de Le Pen a battu le PS et a donc affronté Chirac au second tour.

PARTAGER :                              
 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique
Groupe des cinq : Savoir raison gardée
La gueule de bois des lendemains électoraux !
Les leçons d’un scrutin
Présidentielle 2005 : Ce qui devait arriver arriva
L’opposition burkinabè : Les causes d’une défaite
Analyse des résultats : On récolte ce qu’on a semé
Présidentielle au Nahouri : Le PAI analyse sa défaite
Election présidentielle : L’AJCBC dit merci à la jeunesse