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Petite irrigation, programme SAAGA... : "Ce que Emile Paré ne savait pas"

Publié le mercredi 3 août 2005 à 09h00min

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Le président du MPS/PF, Emile Paré, n’a pas convaincu certains auditeurs lors de l’émission "Actu hebdo" du 31 juillet, sur la télévision nationale. L’un de nos lecteurs, Roland Kaboré, estime qu’il est passé à côté de la plaque à propos de certains sujets.

C’est en téléspectateur averti que j’ai suivi comme d’habitude l’émission « Actu hebdo » du dimanche 31 juillet 2005. J’y ai découvert un docteur Emile Paré très en verve, mais complètement décevant sur certains sujets dont moi-même suis très friand ; raison pour laquelle je me permets de faire quelques observations.

Si le candidat déclaré à la prochaine élection présidentielle cherche à prendre du galon par tous les moyens, ses nombreuses sorties fracassantes l’amènent de plus en plus à en perdre au fur et à mesure qu’approche l’échéance. A la suite de l’imbroglio politico- financier qui l’a opposé au professeur Laurent Bado, et dans lequel il est resté peu convaincant, le voilà de nouveau qui s’empêtre dans deux sujets, ce qui m’a fait rebondir devant le petit écran.

Je suis vraiment ahuri de savoir que le grand docteur Paré ne comprend ni la portée ni la démarche scientifique du Programme Saaga. C’est vrai qu’il ne s’agit pas de médecine, mais son analyse empreinte d’empirisme au sujet de l’augmentation des précipitations par ensemencement des nuages nous le présente sous l’angle de ces hommes de sciences limités, incapables de cerner quelque sujet en dehors de leur champs de compétence.

Là où l’esprit cartésien doit prévaloir, c’est plutôt décevant d’entendre des propos que même un analphabète ne se permettrait pas. Et ce que je dis ici n’a aucune connotation péjorative. C’est peut -être utile de rappeler à notre candidat à l’élection présidentielle que malgré le déficit pluviométrique de la saison écoulée sur l’ensemble des pays de la sous région, si le Burkina sort du lot, c’est bien grâce à l’intervention du Programme Saaga. Sinon, nous serions aujourd’hui dans la même situation que le Niger voisin dont nous déplorons tous la détresse.

L’ensemble des pays membres du CILSS avaient du reste vu juste en adoptant un programme régional d’augmentation des précipitations par ensemencement des nuages. En lisant le quotidien Sidwaya du 27 juillet dernier, je me suis rendu compte que le Sénégal, sans doute impatient d’attendre le CILSS, s’est doté d’une structure identique au Programme Saaga et inspirée de celui-ci, avec l’appui du Royaume du Maroc. Le président Abdoulaye Wade s’y est impliqué en personne et a manifesté toute sa satisfaction après les premiers tests.

"Paré perd un électorat potentiel"

C’est peu dire d’affirmer que l’expérience du Burkina fait tache d’huile ailleurs et c’est bon de rappeler à l’intelligence du grand docteur Paré que ce sont des citoyens burkinabè de l’armée de l’air et de la météo qui prennent de grands risques chaque saison, en affrontant les nuages de façon périlleuse pour accompagner la politique de mobilisation des ressources en eau de notre pays. Le docteur Paré aurait pu le savoir en s’informant auprès du Programme Saaga comme moi-même je l’ai fait, en simple citoyen, en me rendant un jour au siège dudit programme. L’accueil que l’on m’a réservé a été au delà de mes attentes.

Le candidat Emile Paré rejette également la petite irrigation villageoise du
revers de la main. Quel mépris pour le monde paysan dont il ne se gêne pas de ne pas prendre l’avis sur le sujet ! Le futur candidat est en train de perdre là un électorat potentiel par simple ignorance. A-t-il vraiment mis les pieds sur un site de petite irrigation pour savoir ce qui s’y passe ? Assurément non, au regard de ses déclarations.

Pour sa propre gouverne, il est bon de préciser au grand candidat, qui va bientôt battre campagne et ce pour minimiser les bévues, que le Burkina a expérimenté à fond les deux types d’irrigations : la grande et la petite. A titre de comparaison, si la petite irrigation villageoise suscite aujourd’hui l’adhésion massive des paysans, c’est parce qu’elle est rentable à tout point de vue et facilement maîtrisable par ceux-ci.

L’aménagement d’un hectare en petite irrigation coûte 700 000 F CFA tout au plus, et s’amortit en peu de temps. Les producteurs y trouvent leur compte, notamment à travers les revenus générés par les cultures de contre-saison. Ces sites en tant que sources de création d’emplois en saison sèche contribuent à freiner l’exode avec un apport exceptionnel pour la sécurité alimentaire du pays. Des exemples édifiants se rencontrent sur l’ensemble du territoire national.

"L’Etat est chroniquement endetté"

A Niofila dans la Comoé, il existe une exploitation de 400 ha de maïs que j’ai pu visiter lors d’un bref séjour dans cette région ; tandis que les femmes de Nafona défient tous les pronostics sur les 20 ha qu’elles exploitent. Au centre du pays, on peut citer les sites de Talambika et de Kognoudou avec leurs 50 ha respectifs au grand bonheur des exploitants.

Par contre, l’Etat débourse la somme de 10 millions pour aménager 1 ha de terrain en grande irrigation. Compte tenu du coût, à la limite prohibitif, de cette formule, il est difficile pour un paysan pauvre, muni de sa simple daba rudimentaire, d’amortir un tel investissement qui fait forcément appel à l’agro-business, notion non encore ancrée dans les mœurs paysannes. A ce niveau, on n’est point surpris d’entendre que l’Etat est chroniquement endetté du fait de la faible productivité des exploitations. Un futur candidat à l’élection présidentielle devrait le savoir, fusse-t- il médecin.

Visiblement limité sur certains sujets, le docteur Emile Paré sera certainement plus utile en retournant au chevet de ses malades. Il se donnera moins spectaculaire sur des questions qu’il ne maîtrise pas, à l’image de certains intellectuels toujours confinés dans leur champs de compétence.

Roland T. KABORE

Un téléspectateur et lecteur assidu à Ouagadougou

Le Pays

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