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Le Président du Faso à Syrte : Le Burkina pour une médiation entre le Tchad et la Libye

Publié le lundi 1er août 2005 à 08h57min

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Accompagné de son ministre des Affaires étrangères et de conseillers de la Présidence du Faso, Blaise Compaoré a effectué une visite d’amitié en Libye, les 27 et 28 juillet 2005, sur invitation express du colonel Kadhafi...

Une occasion que le leader libyen a saisie pour notamment solliciter une médiation burkinabè pour détendre l’atmosphère politico-militaire sur fond d’incompréhensions (...), entre N’djamena et Tripoli.

Aéroport de Ouagadougou, mercredi 27 juillet 2005, 14h00mn... Un avion Iliouchine imposant, arborant les couleurs de la Grande Jamaharya Arabe Libyenne, vrombissant sur le tarmac, embarque le président du Faso, quelques uns de ses conseillers, des journalistes et des gardes du corps de la sécurité présidentielle, ainsi que l’ambassadeur de Libye au Burkina Faso.

Direction ? Un voyage vers Syrte, dans le désert du centre de la Libye, où, assis sous une tente, dans un environnement arabo-berbère, caressé par un vent de fraîcheur, le guide de la révolution libyenne attend son homologue burkinabè. Après 4h de vol, et vers 18h, heure de Ouagadougou et 20h, heure de Syrte, puis 50 km de route dans des Limousine ô rutilantes, (et) pour toute la délégation, on y est...

Le guide lui-même, entouré de quelques fidèles, accueille Blaise Compaoré. Hic et nunc (très vite), sans trop de salamecs, commence un semi-huis clos, sous la tente du colonel Kadhafi. Sont autorisés à y assister, côté burkinabè, seulement le ministre Youssouf Ouédraogo des Affaires étrangères et de la Coopération régionale, ainsi qu’un journaliste mais aujourd’hui conseiller à la Présidence, Gabriel Tamini. Du côté libyen, un traducteur, deux fidèles du “Guide” et son Ambassadeur accrédité auprès du Burkina.

A quelque 50 m de ce semi-huis clos, toute la délégation burkinabè assise en plein air assiste sans rien entendre, aux échanges entre le leader libyen et le président du Faso. Sauf à observer les grands gestes du traducteur libyen, la longue prise de parole de Kadhafi, le silence... puis, la réponse du président du Faso. Que se disent ils ? A quel effet ? Et au final, pourquoi ce voyage présidentiel ?

Les conjectures vont bon train et la soirée se termine vers 01H du matin, du 28 juillet 2005, par un dîner en plein désert, mais fort bien arrosé et agrémenté par un concert aux sons berçants. Après quelques heures de repos, même scénario, encore en plein désert, sous un temps bien suffocant de 46° à l’ombre.

Entouré de chameaux dont on raconte que le leader libyen aime bien le lait, Kadhafi et Compaoré parle des affaires du monde... Celui d’ici bas, cela s’entend ! Pendant ce temps, les ouvriers de la plume et du micro (les journalistes), envoyés spéciaux de leurs rédactions (les Editions Sidwaya, l’Express du Faso, la radio et la télévision nationales), pour assurer la couverture médiatique de ce voyage présidentiel sont inquiets : quoi (de professionnel) écrire, quoi diffuser, au retour au pays, dans cet environnement de motus et bouche cousue, ou rien ne filtre des échanges Khadafi-Compaoré.

Réconcilier Idriss Déby et Kadhafi

C’est alors qu’un officiel détourne l’attention des journalistes (à dessein ?), sur les vraies raisons de cette visite de Compaoré en Libye, en les conduisant sur des “ fosses pistes ”, du genre “ vous savez déjà tout, puisqu’ils parlent des relations Burkina Libye, de la CEN-SAD dont le Burkina assume la présidence du Sommet des chefs d’ Etat et de la désignation des représentants de l’Afrique au Conseil de sécurité des Nations unies. ..

Et pourtant ! Selon nos informations, ô bien dignes de foi, c’est tout autre chose... qui s’est dit entre les deux hommes d’Etat. En fait, Le colonel Mouammar Kadhafi a sollicité dans ses échanges avec Compoaré, la médiation du président du Faso, pour aplanir le malentendu actuel entre le Tchad et la Libye, deux pays membres de la Communauté des Etats sahélo-sahariens (CEN-SAD), en froid diplomatique “au sujet de leurs opposants respectifs...”. Tripoli souhaite que Compaoré qui entretient de bonnes relations avec Idriss Déby du Tchad et avec Kadhafi, tente de concilier les positions des deux chefs d’Etat qui se soupçonnent mutuellement de favoriser les activités de leurs opposants respectifs sur leur territoire.

Le président du Faso a affirmé, selon les mêmes sources, sa disposition à engager une médiation entre les deux chefs d’Etat.

Cela, après le plaidoyer de Kadhafi qui a tenu à affirmer qu’il est de bonne foi, d’autant plus qu’il ne serait animé, de nos jours, que de la volonté de contribuer à la construction d’une Afrique de paix et de solidarité, pour un développement solidaire profitable à tout Africain, qu’il soit d’en haut ou d’en bas... Et Blaise Compaoré, avant de quitter Syrte pour Ouagadougou, de confirmer ces informations : “Nous avons échangé, avec le guide, des préoccupations de la CEN-SAD, dont deux membres ont des malentendus sur des initiatives que le Guide de la révolution libyenne a prises, pour résoudre la question des rebelles tchadiens.

Des actes qui ont pu être perçus, par certains, comme allant contre les intérêts républicains du Tchad. Je me suis informé des réalités de ces initiatives de Kadhafi. Ce après quoi, je vais échanger sur la question avec les autorités tchadiennes afin de ramener la nécessaire communication de confiance entre les frères du Tchad et de la Libye".

Les mêmes sources notent que les entretiens entre les deux hommes d`Etat ont également porté sur les nouveaux chantiers des relations bilatérales Ouagadougou -Tripoli.

Les résultats du 5ème Sommet ordinaire de l’Union africaine (UA) tenu à Syrte les 4 et 5 juillet derniers et l’avenir de la CEN-SAD ont été au centre de ces entretiens. “J’ai également saisis l’occasion pour redire au Guide libyen, notre satisfaction des opportunités qui s’offrent au Burkina, dans le cadre de la coopération entre nos deux pays et arrondir nos points de vue sur l’actualité africaine et internationale...”, a affirmé à ce sujet, le président du Faso.

Celui-ci et sa délégation, accompagné de l’ambassadeur du Burkina en Libye et son personnel, ont repris le même avion libyen pour Ouagadougou, dans une ambiance faite de lecture pour les uns, de débats d’idées, de “vigilance sécuritaire” et de belote pour les autres. Chut !

Dans l’avion présidentiel, le président du Faso, “Blaise Compaoré himself ”, comme à ses habitudes, se montre passionné de belote. Il est environ 18 h 15mn, quand ce jeudi 28 juillet, Blaise Compaoré et sa suite sont accueillis par le Premier ministre, Paramanga Ernest Yonli sur le tarmac de l’aéroport de Ouagadougou. Dès lors, chacun, son baluchon en main, est retourné à ses occupations d’avant-voyage, dans le Burkina d’en bas ou dans celui d’en haut ...

Les uns en véhicules de haute sécurité, les autres en tout- terrain, ou en véhicules ministériels et les autres à mobylette ou en taxi, voire à pied...

El Hadj Ibrahiman SAKANDE (ibra.sak@caramail.com),
(Envoyé spécial)
Sidwaya


Regain de tension entre Tripoli et N’djamena au sujet de leurs opposants

Entre la Libye et le Tchad, les relations ne sont pas au beau fixe depuis quelques mois. Et ce n’est pas un secret pour les observateurs des relations entre ces deux pays voisins. La crise s’est déclenchée quand les deux chefs d’Etat ont accordé des audiences à leurs différents opposants.

La présence, courant 2004, à N’djaména, du leader d’une opposition libyenne, le colonel libyen Khalifa Haftar, après l’audience accordée en France par le président tchadien à une délégation de l’opposition libyenne, a été l’un des symboles à visage découvert, de cette constipation des relations entre Kadhafi et Déby. Si on en croit des sources de la politique internationale, le chef d’Etat tchadien avait réagi ainsi aux informations faisant état du déplacement en Libye du leader du MDJT (une rébellion tchadienne opposée au régime actuel de N’djaména), Aboubakar Choua Dazi.

L’information relayée à l’époque par la presse tchadienne affirme que le leader du MDJT aurait fait un aller-retour en Libye à bord d’un hélicoptère libyen. Et des sources semblent dire qu’Idriss Déby aurait fait savoir ses "suspicions politiques sur la question", à Ryad et à Paris.

A l’heure où le guide de la Révolution libyenne qui veut passer pour l’unificateur de l’Afrique n’a pas, selon des analystes, intérêt à avoir un foyer de tension à ses portes, c’est donc le président du Faso qui est appelé à réconcilier ces deux pays voisins, au nom de "l’amitié", de la CEN-SAD et de l’union des Africains, autour de l’essentiel. Un essentiel qui rime avec la lutte contre le sous-développement avec sa cohorte de maladies, de famines, de corruption béante et non de guerre entretenues...

I.SAKANDE


La Libye : institutions et vie politique

Porté au pouvoir par un coup d’État militaire en 1969, Mouammar El Kadhafi instaure une République arabe et socialiste, sur le modèle de l’Égypte dirigée par Gamal Abdel Nasser. Elle est gouvernée par un Conseil révolutionnaire.

En 1973 sont formés des Comités populaires conçus comme lieux de l’exercice d’une démocratie directe. En 1977, une nouvelle Constitution institue la Jamahiriya (État des masses). Au terme de la Constitution, le pouvoir exécutif est partagé entre le Guide de la Révolution, Mouammar El-Kadhafi, seize représentants du Congrès général du peuple (CGP), l’Assemblée nationale et son bureau politique.

En fait, dans le texte constitutionnel, il existe une imbrication totale des pouvoirs exécutif, législatif voire judiciaire, dans la mesure où la justice est supposée être assurée par le peuple au sein du Comité du peuple pour la justice. Dans la pratique, le chef de l’État prend les grandes décisions, les comités populaires se chargeant de la gestion des affaires locales. Au début des années quatre-vingt dix, la Libye entretenait une armée de terre de 40 000 hommes, une marine de 8 000 hommes et une armée de l’air de 22 000 hommes.

Ses forces armées étaient ainsi plus importantes que celles de la Tunisie voisine, pourtant deux fois plus peuplée. Depuis près d’une décennie, c’est cette Libye du colonel Kadhafi et ces siens qui a construit et anime une dynamique de coopération africaine avec, par exemple, des pays comme le Burkina, l’Afrique du Sud, le Maroc mais aussi le Tchad et la Centrafique, jugée à la fois complexe et exemplaire par certains politistes...

Sidwaya

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