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Bougouraoua, le "fils du devin", s’est éteint

Publié le mercredi 27 juillet 2005 à 12h58min

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26 mai 26 juillet juillet 2005 : deux mois jour pour jour, après le Général Sangoulé Lamizana dont il a été du reste le condisciple, un autre baobab de la scène publique burkinabè est tombé hier mardi en la personne de Bougouraoua Hamadé Ouédraogo.

Il s’est éteint en son domicile ouagalais de Paspanga à 6 h 30 mn à l’âge officiel de 87 ans, laissant derrière lui une veuve, neuf enfants et bien sûr plusieurs petits enfants.

Qui est-il pour que nous nous soyons autorisé le rapprochement ci-dessus fait avec le champion des Samos, Lamizana ?

Si à l’évidence, le nom Bougouraoua Ouédraogo n’évoque pas dans l’imaginaire collectif burkinabè, surtout chez les jeunes générations, les mêmes résonances que celui d’Aboubakar Sangoulé Lamizana, il n’en reste pas moins que l’homme mérite de trôner en bonne place au Panthéon des grands hommes politiques dont notre pays peut s’en enorgueillir et dont la petite esquisse bibliographique, qui suit, par ailleurs donne la pleine mesure :
Diplômé de l’Ecole normale d’instituteurs de Katibougou (Mali)
- Conseiller général de la Haute-Volta
- Grand conseiller de l’AOF
- Conseiller de l’Union française
- Membre fondateur du grand RDA à Bamako en 1946
- Député -maire de Ouahigouya
- Plusieurs fois ministre dont celui de l’Information, etc.

L’homme a eu une grande carrière politique même si les vicissitudes de la lutte l’ont contraint avant-terme à une certaine retraite politique anticipée. En tout cas, tous ceux qui l’ont connu et ont eu à travailler avec lui ont retenu le souvenir d’un homme qui a conçu l’action politique au sens le plus noble du terme : à savoir le service du bien commun plutôt que la poursuite effrénée d’ambitions personnelles ou la soif inextinguible du pouvoir.

Jeté en prison en juillet 1963 sur fond de règlements de comptes politiques par le régime de Maurice Yaméogo, il fut jugé en même temps qu’un autre ministre Maxime Ouédraogo, avec comme chef d’inculpation, la mauvaise gestion de la Coopérative centrale de consommation de Haute-Volta. Il sera acquitté quelques mois plus tard, et ses nombreux partisans y verront comme la preuve irréfutable de l’esprit de droiture qui l’a toujours caractérisé.

Réputé pour son patriotisme auprès de l’administration coloniale du temps où il servait comme surveillant général au lycée Terrasson de Fougères de Bamako, il fut un des dignes représentants de l’Union voltaïque, ce mouvement politique qui lutta pour la reconstitution de la Haute-Volta après son démantèlement en 1932.

Sur les bords du Djoliba, il joua bénévolement au consul au profit de tous les Voltaïques de passage et notamment des élèves qui devaient s’y rendre dans les années 50 pour subir les épreuves du Baccalauréat, faute de centre d’examen dans leur pays d’origine. Nombre d’entre eux comme Frédéric Guirma et Martial Ouédraogo trouvèrent le gîte et le couvert chez lui. Après la reconstitution de la Haute-Volta, la vie politique dans sa circonscription natale de Ouahigouya se retrouva bipolarisée entre Bougouraoua Ouédraogo et son jeune frère, Gérard Kango Ouédraogo, le premier battant pavillon UDV-RDA, le second, MDV (le Mouvement démocratique voltaïque de Michel d’Orange).

Dépité certainement par sa disgrâce politique intervenue en 1963 comme rappelé plus haut, il mit du temps à rebondir, pour ne pas dire qu’il ne parvint jamais à s’en relever complètement, l’accélération des événements ayant donné l’avantage à son challenger, Gérard Kango, dans le contrôle du grand fief électoral qu’est le Yatenga.

En effet, dans les années 70, le lancement par lui des Indépendants (Parti des Indépendants du Yatenga) n’eut qu’un succès mitigé en terme en tout cas de gains électoraux.

Bougouraoua Ouédraogo n’en resta pas moins un homme de référence pour tous ceux qui aspiraient à une vie politique débarrassée du one man - show. Pas étonnant donc qu’une formation comme la CNPP/PSD du temps de sa pureté originelle l’ait coopté comme président d’honneur lors de son congrès constitutif de septembre 91.

"Bougouraoua, le fils du devin, s’est éteint". Ne voilà-t-il pas une titraille qui mérite explication ? Bien qu’il s’appelât aussi Amadou (Amadé comme il sied au Yatenga), c’est le prénom Bougouraoua, qui témoigne de l’enracinement de l’homme dès sa naissance dans les valeurs traditionnelles, voire même ancestrales de son terroir, qui passera à la postérité. Si nos sources sont avérées, le prénom Bougouraoua est en effet composé de "Bougo" (prêtre-devin en mooré) et de "raoua" (fils-homme dans la même langue)... Il s’agit donc d’un prénom tutélaire qui donne à croire que très tôt, son destin fut placé sous une certaine protection. Ce qui explique cette droiture dont sa vie a été faite.

Son inhumation aura lieu demain 18 juillet à son domicile de Ouahigouya, puisque telle a été l’une de ses dernières volontés, selon son fils aîné. La Rédaction du journal présente à la famille du grand disparu ses condoléances les plus déférentes.

Issa K. Barry
L’Observateur

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Vos commentaires

  • Le 8 novembre 2005 à 16:39, par Norbert LUCAS En réponse à : > Bougouraoua, le "fils du devin", s’est éteint

    Je souhaite présenter mes condoléances à la famille de Bougouraoua Ouedraogo.
    Né à Ouahigouya en 1955 (dans la maison rouge) et fils d’un ingénieur agricole français qui l’a connu à l’époque ( mon père est mort en 1956 à Ouaga) je suis très attaché , charnellement attaché à la terre du Yatenga , aux hommes qui y vivent et aux sages qui président à sa destinée

    Norbert LUCAS

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