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AGOA : Commerce à la sauce ketchup

Publié le jeudi 21 juillet 2005 à 09h56min

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La quatrième édition du forum de l’AGOA (Africa Growth and opportunities Act) s’est achevée hier 20 juillet dans la capitale sénégalaise, en présence de la secrétaire d’Etat américaine, Condoleeza Rice. La rencontre, débutée lundi dernier, a regroupé un millier de participants africains et américains autour du thème de "L’extension et la diversification du commerce pour favoriser la croissance et la compétitivité".

Il est bon de rappeler que l’AGOA est le parfait exemple du principe "traid not aid" qui régit depuis de nombreuses années la "coopération" entre le nouveau monde et le continent noir. Promulguée en 2000 sous l’administration Clinton, elle offre à 37 Etats subsahariens dont le Burkina (admis récemment) un accès préférentiel à l’immense marché américain où désormais plus de 6 000 produits africains peuvent pénétrer sans droits de douane ni quotas. Ainsi qu’a tenté de l’expliquer le président Wade, hôte du forum, la solution américaine à nos problèmes consiste en "la croissance pour lutter contre la pauvreté, le commerce pour tirer la croissance et l’AGOA pour développer le commerce et la croissance". Une véritable aubaine donc pour les pays concernés et leurs opérateurs économiques, qui, grâce à cette faveur, ont la possibilité de développer de façon considérable leurs échanges avec la première puissance économique. On estime d’ailleurs à 44, 4 milliards de dollars le montant des échanges commerciaux entre les Etats-Unis et l’Afrique subsaharienne pour l’année 2004 et à 190 000 le nombre d’emplois générés grâce à cette disposition. Mais encore faut-il, au-delà de l’appartenance à ce club très fermé des bénéficiaires de l’AGOA, proposer à un marché américain particulièrement exigent des produits hautement compétitifs. C’est l’un des défis que doivent absolument relever les partenaires africains de l’Amérique. Or, force est de constater qu’après 4 ans d’expérience, sur les 37 pays éligibles, seuls quelques-uns arrivent à plus ou moins tirer leur épingle du jeu. Parmi ces rares privilégiés, des pays producteurs d’or noir, de gros fabricants de textiles et l’Afrique du Sud, qui parvient à écouler outre Atlantique une vaste gamme de produits, y compris des voitures. Mais pour la grande majorité, dont le Burkina, les questions d’extension, de diversification du commerce et surtout de compétitivité se posent toujours. En effet, à l’instar d’autres pays de la sous-région, le Burkina n’a ni les capacités industrielles, ni les moyens commerciaux qui lui permettraient de se frotter à chances égales sur le marché américain avec les pays ayant déjà engrangé quelques dividendes. Que peut-on alors espérer de ces facilités que nous offre si généreusement l’Oncle Sam ? Pas grand-chose, serait-on tenté de dire, si ce ne sont quelques petits deals pour nos artisans, rien à voir avec les contrats mirifiques que l’AGOA, si on en croit ses généreux concepteurs, aurait mis à notre portée. En attendant la croissance promise par l’AGOA et la fin de la pauvreté endémique, on se contentera du discours plein de bons procédés diplomatiques, prononcé non par le secrétaire américain au Commerce mais par Mme Condoleeza Rice, secrétaire d’Etat américain, de passage à Dakar à l’occasion de sa tournée africaine. La preuve, pour ceux qui en doutaient encore, que le paradis capitaliste avec ce commerce à la sauve ketchup promis aux africains par l’Oncle Sam passera encore et toujours par un raccourci politique.

H. Marie Ouédraogo
L’Observateur

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