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Sénégal : La guerre de succession a commencé

Publié le lundi 18 juillet 2005 à 07h33min

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La mise en garde à vue de l’ex-Premier ministre, Idrissa Seck pour atteinte présumée à la sûreté de l’Etat (autre accusation, le détournement de deniers publics) remet au goût du jour les querelles de succession au vieux Wade qui s’aiguisent au fur et à mesure qu’approche l’échéance de 2007. Un Abdoulaye Wade qui n’a du reste pas abdiqué toute ambition de se succéder à lui-même.

Ce qui arrive à Idrissa Seck était prévisible depuis les premières escarmouches survenues entre lui et le président Wade courant 2004, bisbilles qui allaient conduire à son départ en avril 2005.

Alors Premier ministre d’Abdoulaye Wade, Idrissa Seck avait courant 2004 donc, subi de vives critiques de la part de celui-ci pour "gestion personnelle" et quelque peu "scabreuse" du pouvoir d’Etat.

Principal point d’achoppement entre les deux hommes qui filaient jusque-là le parfait amour, la trop grande propension du jeune Premier ministre à gouverner sans rendre compte au vieux (vous avez dit crime de lèse-majesté) mais surtout, la création de "réseaux" entièrement dévoués à sa cause au sein du Parti démocratique sénégalais (PDS), le "bébé" du président. En clair, c’est la mainmise sur l’appareil du parti et sa résultante le rôle de candidat putatif à la présidentielle de 2007 qui était en "débat" entre les deux hommes. L’héritier présomptif du vieux Wade, même s’il ne le disait pas tout haut, était persuadé que son heure était venue et que le chef, du fait de son grand âge devait se retirer.

Or, le vieux ne l’entendait pas du tout de cette oreille lui pour qui le pouvoir d’Etat a constitué une véritable cure de jouvence et qui, à l’analyse de la situation politique et sociale de son pays s’était rendu compte qu’en manœuvrant bien, il pouvait "rebeloter". En effet, le Parti socialiste (PS) sénégalais, son principal concurrent à la présidentielle de 2007 vit, depuis le départ d’Abdou Diouf, une crise de légitimité, qui n’est pas loin de tourner en une crise existentielle. Ousmane Tanor.

Dieng, l’héritier légal d’Abdou Diouf n’a pas la légitimité d’un Djibo Kâ ou d’un Moustapha Niasse, vieux compagnons de Diouf qui peuvent rallier les suffrages des socialistes en temps opportun. Bien sûr, l’un comme l’autre sont pour l’instant en "réservé" de leur parti originel, mais, il pourrait effectuer leur "mue" au moment voulu ou plus simplement réadapter leur discours politique. Une occurrence qui pourrait faire voler en éclats le PS et que Wade avait déjà préparée avec sa coalition "hétéroclite" qui a pris le pouvoir en 2000.

Le père "assassinera"-t-il le fils ?

Hormis le PS, l’échiquier politique sénégalais s’apparente à un "désert" du côté de l’opposition, tous les ténors de celle-ci (Abdoulaye Bathily, Landing Savané...) ayant rallié le camp de Wade ou ayant "flirté" avec lui à un moment donné.

Le danger vient donc de son propre camp et pour le circonscrire, il n’a pas hésité à faire revenir au bercail le fils prodigue, Ousmane NGom, pour contrecarrer la montée en puissance de Seck. Hériter historique de l’avocat Wade alors que celui-ci bataillait dans l’opposition, Ousmane N’Gom avait succombé aux sirènes du Parti socialiste. La séparation entre les deux hommes avait pris des allures mélodramatiques, ce qui a donné plus de faste aux retrouvailles, Ousmane NGome s’étant vu accorder le portefeuille de la Défense. Conscient que sa "trahison" l’a coupé de la base du parti, le fils prodigue joue la carte d’un deuxième mandat de Wade pour mieux s’accaparer d’un parti qu’il connaît mieux que quiconque. C’est donc tout naturellement qu’il est du côté des pourfendeurs de Seck, lequel est donc accusé d’avoir "dissipé" des deniers publics.

Cela, lors de la construction de la route Dakar-Thiès (la ville natale de Seck) qui aurait coûté 85 millions d’euros avec une "marge bénéficiaire" de 32 millions pour Seck. Une accusation que ce dernier a mis sur le compte de "l’acharnement" et qu’il a promis de "démonter" pièce par pièce. C’est peut-être cela qui explique cette nouvelle accusation d’atteinte à la sûreté de l’Etat, autrement plus sérieuse et surtout moins facile à remettre en cause.

On est mémoratif qu’en 1962, Mamadou Dia, président du Conseil, avait valu ce montage et l’histoire pourrait balbutier. Les puristes espèrent toutefois que l’avocat féru de droit, Abdoulaye Wade ne franchira pas ce rubicon plein de dangers pour sa notoriété. Mais, nous sommes en politique, domaine qui ne s’embarrasse guère de bons sentiments.

Pour l’heure, le "modèle" de démocratie en Afrique a perdu beaucoup de sa superbe.

Boubakar SY
Sidwaya

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