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Débats préélectoraux : Quand l’opposition nous sert un plat indigeste

Publié le vendredi 15 juillet 2005 à 07h49min

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Ces derniers jours auront été riches en enseignements pour la démocratie burkinabè, toujours à la recherche d’un vrai souffle. Si après quinze ans de vie, elle a gagné en maturité, il y a lieu de reconnaître par ailleurs qu’elle manque encore de stature.

Cette stature que seule pourra lui conférer une opposition dont la crédibilité est constamment sujette à caution, parce qu’elle offre un spectacle à désoler jusqu’à ses militants les plus irréductibles. Du feuilleton politico-judiciaire de série B du PAI aux tribulations tragi-comiques de l’OBU, en passant par les déclarations écervelées de Hermann Yaméogo, tout le monde en a eu pour son compte.

Dans quatre mois exactement aura lieu l’élection présidentielle de 2005. Pour l’heure, on connaît sur la ligne de départ treize prétendants déclarés. Et sauf retournement de situation, l’élection du 13 novembre sera un inédit du point de vue des choix offerts aux électeurs.

Forcément, on était fondé à espérer de cette multitude un fourmillement des idées telles que l’électeur se verrait confronté à un choix cornélien. Plutôt que de cela, il nous est donné d’assister en avant-première à des chamailleries dignes de bambins. La politique a-t-on coutume d’entendre, c’est se mettre au service des autres. Sur ce qu’on nous sert depuis un mois, le désespoir et la désespérance sont en train de gagner les chaumières. Tous les points du débat actuels font la preuve par neuf comme par mille que nos hommes politiques sont à mille lieues des préoccupations du citoyen.

Une sorte de dilution caractérise le débat d’idées dû au choix douteux des thèmes de discussion, à l’émiettement du paysage politique, plus de cent partis, à l’absence de leaders consistants, voire charismatiques.

Qui vont-ils convaincre ?

Pour le grand Emile Paré, celui qui est toujours au centre d’embrouilles, le responsable des misères passées, actuelles et futures de l’opposition c’est Blaise Compaoré. C’est lui le marionnettiste en chef qui, de l’ombre, met tout ça en scène parce qu’il adore (sic) les échecs. Autrement dit, l’opposition n’a aucune part de responsabilité. Quant à Emile Paré, il serait l’objet à chacune de ses tribulations d’un complot ourdi par des pions placés sur son chemin par Blaise Compaoré. A supposer que ce dernier fut, du moins qu’il ait des talents de grand réalisateur de film ou de théâtre de marionnettes, capable de concevoir un scénario où il manipule à souhait des acteurs, nos hommes politiques, hélas pour notre réalisateur, ne sont pas des acteurs de genies.

Mais par ailleurs, on se désole de voir qu’ils sont si insignifiants que le pouvoir actuel peut leur faire exécuter docilement tous ses desseins selon les révélations de Emile Paré.

Non, il en faut plus pour nous convaincre que les basses œuvres de l’opposition seraient conçues et exécutées dans les bureaux secrets du CDP.

Si elle est incapable de s’élever, de prendre une vraie dimension, c’est parce qu’elle ne croit en rien et essentiellement pas en elle-même, en sa capacité et en sa compétence.

Et ce ne sont pas les envolées lyriques du type "l’affrontement entre le candidat numéro 13 et Blaise Compaoré aura bel et bien lieu" qui vont y changer quelque chose. Ce n’est que simple exercice de style.

Nombre très suspect

Et pourquoi diantre y aurait-il plus de cent partis politiques au Burkina Faso ? Que défend au juste chacun et de quelle autre solution tout ce beau monde est-il porteur ? Sauf à vouloir, comme dirait quelqu’un, s’échiner à réaliser individuellement leur PPDP (Propre programme de développement personnel), on ne voit pas ce qu’apporte cette “foultitude” à notre démocratie et pis encore à notre peuple.

On est fondé à se demander pourquoi, un Issa Tiendrébéogo qui n’a pas un seul élu local, ni conseiller municipal, ni député ne peut-il pas se fondre au sein de l’UNDD ? Pourquoi le parti de Hermann Yaméogo pourrait-on se demander ? Simplement parce qu’il a fait l’option d’être le chef de file des partis de Alternance 2005 qui veulent battre campagne pour lui.

Que gagne chacun des sigles à se maintenir contre vents et marrées et à se réduire à l’organisation de conférences de presse épisodiques ou à balancer un écrit incendiaire dans la presse et dans lequel est passé en revue, dans un rythme routinier lassant, tous les mots assez durs pour mettre à bas la majorité.

Ce choix conscient et délibéré a une raison : nous faire avaler le fait qu’elle est une opposition vraie, celle qui veut par preuve irréfutable se défaire de l’opposition gâteau et en conséquence du pouvoir. Mais au grand malheur de l’opposition, Laurent Bado, le saint des saints vient de dire tout haut que tout le monde a trempé ses moustaches dans la soupe.

Plus sérieusement, l’opposition doit pour sa propre survie changer son analyse de notre situation politique, son rapport avec les citoyens et au final ses méthodes. C’est bien de remplir les pages des journaux, de faire concurrence aux journalistes et de leur donner un coup de main fort apprécié et appréciable. Mais, elle doit montrer d’abord qu’elle est à niveau, qu’elle peut transformer la réalité. Pour l’heure, c’est loin d’être le cas.

Souleymane KONE
L’Hebdo

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