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L’Ambassadeur Juliette BONKOUNGOU apprécie la sortie de Hermann YAMEOGO

Publié le jeudi 14 juillet 2005 à 10h01min

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Vous avez sans doute suivi sa (ndlr : M YAMEOGO) dernière sortie sur RFI, sujette depuis à polémique. Qu’en pensez-vous ?

J. B : Bien sûr, j’ai entendu sa dernière sortie sur RFI et je n’en reviens toujours pas qu’un homme politique de son expérience et son intelligence puisse ainsi se « gaspiller » politiquement. Il est difficile de faire mieux en matière de contre-performance et de contre-productivité politique.

Au moment où Hermann ne fait pas mystère de son ambition d’exercer les plus hautes charges de l’Etat, il choisit en direct de se faire l’avocat du chef de l’Etat d’un pays où des milliers de nos compatriotes sont victimes de délit de faciès et de nationalité, spoliés de leurs biens et expropriés de leurs plantations, maltraités et tués, et ce, au mépris de l’opinion africaine et internationale, du bon sens et de textes de l’UEMOA et de la CEDEAO sur la libre circulation des personnes et de biens ainsi que de la liberté d’établissement.

Comparer monsieur Laurent Koudou GBAGBO à l’illustre Patrice LUMUMBA ou au panafricaniste N’KRUMAH procède soit de la mauvaise plaisanterie ou d’une très grave et inacceptable confusion. Le prétexte allégué de tout ça serait l’immixtion supposée, en tout cas affirmée par lui, du Président COMPAORE dans les affaires de la Côte d’Ivoire. Je l’ai dit, je le répète, un chef d’Etat est là d’abord et avant tout pour défendre les intérêts de ses compatriotes à l’intérieur comme à l’extérieur.

Et j’ajoute qu’en tant que natif de Koudougou, Hermann ne doit jamais oublier « qu’il y a la parole de la case et la parole de la cour ». C’est dire que lorsque l’intérêt national l’exige, il faut faire front à l’intérieur quitte à avoir une bonne et franche explication après. Nom de Dieu ! Les questions du foncier rural, de la nationalité, le concept d’ivoirité, l’exclusion de certains prétendants à la présidence de la république ne sont quand même pas des inventions du Président COMPAORE !

Je terminerai sur ce point en disant qu’Hermann n’aurait pas été mon frère que je ne me serais pas donné la peine de revenir sur cette interview qui se suffit à elle-même en termes de contre-performance politique, mais il se trouve qu’Hermann est mon frère, mon grand frère et j’ai terriblement mal. Il est opposant à Blaise COMAPORE, candidat à la présidence, c’est son droit en tant que citoyen, c’est la règle du jeu démocratique et je respecte cela, mais je veux pouvoir être fière de lui en tant que patriote, démocrate et opposant.

Votre frère a par ailleurs affirmé sans ambages l’implication du Burkina dans la crise ivoirienne. Reconnaissez que les apparences, ou même les faits plaident pour lui.

J. B : Je ne vais pas tourner autour du pot. Je ne suis pas d’accord avec lui, pour deux choses.
D’abord, je dis que quelles que soient les velléités d’implication d’un pays tiers, ce sont toujours les internes qui donnent le coup de grâce.

Si vous avez une nation où il n’y a pas de problèmes, quelqu’un a beau tenter, il n’arrivera pas. Ça c’est d’un ; de deux, je suis peut-être une patriote aveuglée, car quand bien même il y aurait eu une implication du Burkina, moi Burkinabè je ne prendrais jamais la radio pour le dire. Et comme je le disais tantôt, « il y a la parole de la case et il y a celle de la cour ». Il y a une cause nationale qui est à défendre, je la défendrai, même si je vais poursuivre le débat interne. Ça c’est moi !

Il y a des raisons supérieures dans une nation et cela pose un problème ici au Faso. Est-ce qu’il existe des valeurs que les acteurs politiques burkinabè considèrent comme supérieures, qui nous mettent une limite à tous ?
La France est présente en Côte d’Ivoire avec un bataillon permanent (le 43e BIMA) et même plus maintenant, alors qu’elle y a vingt mille (20 000) ressortissants.
Nous avons 3 millions de Burkinabè.

J’ai déjà eu à ce sujet une discussion avec l’ambassadeur des Etats-Unis quand il venait d’arriver et je lui ai dit qu’à moins de nous considérer comme des sous-hommes, si j’ai trois millions quelque part et des intérêts colossaux comme c’est le cas du Burkina, pourquoi voulez-vous que je sois indifférente à ce qui se passe dans ce pays alors que vous admettez que la France, pour vingt mille (20 000) personnes, puisse tout s’y permettre ? Non, moi je suis black, mais je ne veux pas qu’on me considère comme un sous-homme.

Ça me gêne, ça ne passe pas, parce que chacun de ces 3 millions de Burkinabè vaut le Blanc qui est là-bas.
Et on a élu le chef de l’Etat pour qu’il défende les intérêts des Burkinabè à l’intérieur comme à l’extérieur ; je dis qu’il n’est ni juste ni équitable de dire que par rapport à la situation qui prévaut en Côte d’Ivoire, un chef d’Etat digne de ce nom doit rester indifférent.

(In L’observateur N° 6432 du 12 juillet 2005)

L’Opinion

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