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Sécurité des citoyens : de la responsabilité régalienne de l’Etat

Publié le vendredi 8 juillet 2005 à 08h28min

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Des dispositions sécuritaires pour Me Hermann Yaméogo, Me Bénéwendé Stanislas Sankara, Issa Tiendrébéogo et Fidèle Hien ; tous faisant objet de menaces de mort. C’est ce qui est ressorti, le 6 juillet 2005, de la rencontre entre le ministre de la Sécurité, Djibrill Bassolet et les quatre hommes politiques sus-cités, tous membres du groupe "Alternance 2005".

Ces derniers avaient fait publier la veille un communiqué de presse y relatif dans lequel ils invitaient instamment le gouvernement à prendre des mesures diligentes pour assurer leur sécurité. Car "il n’y a jamais de fumée sans feu", avaient-ils souligné.

En les recevant un jour seulement après la publication de leur communiqué, le ministre de la Sécurité fait là preuve d’une promptitude louable et raisonnable. Raisonnable pour plusieurs motifs. D’abord, il y a des antécédents où de pareilles rumeurs ont été suivies d’actes réels d’assassinats, de crimes. Ce fut notamment le cas de Norbert Zongo et plus récemment du directeur de l’approvisionnement en eau potable, Tidiane Paré, tué dans son bureau . Ensuite, l’initiative de Djibrill Bassolet est compréhensible parce que le pays est en période pré-électorale.

Une situation qui demande beaucoup plus de stabilité politique, de sérénité et de confiance entre les acteurs de la scène politique nationale. Faute de quoi, c’est toute la crédibilité du système démocratique et du pouvoir qui sera entamée aux yeux de l’opinion nationale et internationale. Dans ce contexte, la prompte réaction du ministre de la Sécurité est salutaire. Mais tous les observateurs ne voient pas les choses de cette façon.

Certains voient, en effet, dans cette réaction immédiate de M. Bassolet, une volonté de récupérer la situation, de marquer un coup médiatique dans une période politiquement sensible. Pour cette catégorie d’observateurs, seule la sécurité du régime, des hommes du pouvoir préoccupe le gouvernement. Or, à leurs yeux, la sécurité de tous les citoyens relève de la responsabilité régalienne de l’Etat.

Pour eux, la rencontre du ministre avec les quatre opposants menacés n’est que de la poudre aux yeux, le principal objectif de Bassolet étant de saisir l’occasion pour se racheter et de ne pas laisser les opposants en question occuper stratégiquement l’espace médiatique. Si le patron de la sécurité nationale voulait vraiment assurer la sécurité des membres de l’"Alternance 2005", il aurait dû, estiment-ils, les convoquer avant leur déclaration publiée dans la presse pour les tenir informés des risques qui pèsent sur eux.

Mais au-delà de l’acte du ministre, l’on peut s’interroger sur les fondements, les origines supposées ou réelles de ces menaces. Là-dessus, les interlocuteurs du 6 juillet 2005 divergent dans leurs versions. Pour les opposants, les menaces viendraient de l’intérieur. Pour le ministre Bassolet, elles viendraient de l’extérieur selon les services de renseignement gouvernementaux. Dans ces conditions, qui faut-il croire ?

Certes, la piste interne n’est pas à exclure puisque nous sommes en politique où seule la fin semble justifier les moyens, mais à qui profitera une telle hypothèse ? En tout cas, pas au pouvoir. A ce niveau, le ministre de la Sécurité est formel : "Le Burkina n’a pas besoin de ça". Ne dit-on pas que "chat échaudé craint l’eau froide ?".

C’est pourquoi beaucoup d’observateurs privilégient plutôt la piste extérieure. Ils avancent comme explication, le fait que le pouvoir burkinabè se soit fait des ennemis dans la sous-région ouest-africaine et que ces derniers puissent être tentés de créer des troubles. L’assassinat d’un opposant politique, en cette période ultrasensible de précampagne électorale, serait ainsi un meilleur moyen de créer de sérieux problèmes au régime Compaoré.

Mais le plus important dans cette situation n’est pas de savoir les origines des menaces. Il est vrai que cela peut aider, mais le mieux à faire en pareilles circonstances, c’est de prendre des mesures préventives. C’est en cela que l’initiative de Djibrill Bassolet mérite, en tout état de cause, d’être saluée à sa juste valeur. Cela devrait être un réflexe constant des autorités en charge de la sécurité nationale. Elles doivent réagir systématiquement à chaque fois qu’un citoyen, quel que soit son statut social, son appartenance politique, fait l’objet de menaces de mort.

Car c’est au gouvernement qu’incombe avant tout la sécurité publique. Il est donc temps pour l’Etat burkinabè, à l’instar de l’Occident, de s’acheminer vers la culture de la protection sécuritaire systématique de ses citoyens, sans discrimination aucune. En cela, les Européens et les Américains nous donnent encore, chaque jour, des leçons.

Le Pays

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