LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Soyez un repère de qualité. Certaines personnes ne sont pas habituées à un environnement où on s’attend à l’excellence.” Steve jobs

IRAN : Les Américains et le mollah enragé

Publié le mercredi 29 juin 2005 à 07h09min

PARTAGER :                          

Le président américain, George W. Bush, à la veille de l’élection présidentielle en Iran, annonçait déjà que l’issue du scrutin aurait des répercussions dans un monde soucieux de comprendre comment la puissance régionale chiite agirait vis-à-vis du voisin irakien et gérerait le contentieux qui l’oppose à l’Occident sur la question nucléaire.

Voyait-il déjà venir les choses ? Rien n’est moins sûr avec l’élection de Mahmoud Ahmadinejad qui a eu lieu il y a quatre jours. C’est vrai que l’Irak est une carte maîtresse pour l’Iran dans l’équilibre régional et les relations avec les Etats-Unis.

Alors que la réputation de conservateur du nouvel homme fort de 49 ans fait craindre une dégradation des relations diplomatiques avec les U.S.A.. Et comme pour calmer les esprits, Mahmoud Ahmadinejad a choisi de ne pas heurter la communauté internationale lors de sa première intervention publique depuis l’annonce des résultats de l’élection présidentielle.

Il est même allé plus loin en manifestant sa volonté de "tendre la main" et de "travailler avec tout pays qui ne montrera pas d’animosité envers l’Iran", comme pour dire que le voisin irakien peut être tranquille.

Pourtant, l’élection d’un dur à la présidentielle iranienne n’est pas de nature à redonner confiance aux Américains dans les négociations avec Téhéran. A coup sûr, l’avènement de Mahmoud Ahmadinejad vient une fois de plus mettre à nu l’inconséquence de la démocratie des Occidentaux, précisément des Américains qui, même face à des élections truquées, ferment souvent les yeux. N’a-t-on pas été témoin de pseudo-élections à la suite desquelles l’Oncle Sam n’a pas levé le plus petit doigt ? Alors que dans le cas présent, tout s’est passé dans la transparence et le peuple a fait son choix.

L’Oncle Sam et les siens à coup sûr sont mécontents du verdict des urnes, mais ne s’agit-il pas de la volonté d’un peuple ?

Il ne reste plus qu’à composer avec Mahmoud Ahmadinejad, désormais en position de force même s’il y a la question du nucléaire sur la table.

Les pourparlers engagés avec la troïka européenne (Allemagne, France, Grande-Bretagne) sur la question sont d’actualité et le nouveau président iranien dit "n’avoir pas fermé la porte sur ce dossier extrêmement sensible". Il a même fait part de son intention de poursuivre les négociations engagées, tout en fixant des limites aux concessions envisageables.

Après ces déclarations pleines de bonnes intentions, les Européens attendent désormais des signes concrets de la volonté de négociation d’Ahmadinejad lors de la rencontre sur le nucléaire, prévue en septembre prochain. Ce sera un mois après la prise de fonction officielle du nouveau chef de l’Etat et l’on verra un peu plus clair sur ses intentions réelles.

Par contre, du côté israélien, on n’accorde point le bénéfice du doute au nouveau président iranien et les commentaires sur son élection ont, sans ambiguïté, reflété de la défiance et de l’hostilité.

Shimon Péres, vice-premier ministre, a même déclaré : "La conclusion (de ce scrutin), c’est qu’il y a (en Iran) une combinaison dangereuse d’extrémisme religieux, d’armes non conventionnelles et d’isolement international qui va continuer et provoquer de graves problèmes".

Concernant les relations avec les Etats-Unis, le retour d’un conservateur à la tête de l’Etat iranien n’est pas non plus de bon augure et rend l’éventualité d’une normalisation des relations encore plus improbable.

Donald Rumsfeld, le secrétaire à la Défense, a, lui, évoqué des fraudes qui auraient entaché le scrutin, qu’il a qualifié de "simulacre d’élection". D’Ahmadinejad, Rumsfeld a dit qu’il n’était pas "un ami de la démocratie et de la liberté".

L’Américain a fait le pari qu’avec le temps, la jeunesse et les femmes le trouveront, lui avec ses maîtres, inacceptable. L’histoire lui donnera-t-il raison ?

Au-delà du problème de la politique internationale du nouveau président iranien, l’une des principales interrogations sur les changements liés à son arrivée au pouvoir concerne, en effet, les risques de reprise en main de la société. Ahmadinejad affiche une volonté inébranlable de faire respecter les valeurs islamiques de la manière la plus stricte.

Son premier acte n’a-t-il d’ailleurs pas été de se rendre sur la tombe de l’Ayatollah Khomeiny d’où il a déclaré : "La voie de l’islam, c’est la voie absolue de la République islamique, il a été l’artisan de la révolution, il est la référence de la révolution".

Les Américains doivent prendre au sérieux les propos de ce mollah qui semble bien enragé.

Pierre Tapsoba
L’Observateur

PARTAGER :                              
 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique