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Elections 2005/2006 : Les positions ambiguës de l’Eglise catholique

Publié le vendredi 17 juin 2005 à 08h57min

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Pour M. Louis Nama, dont on lira ci-après le point de vue, si les protestants et les musulmans ont déjà pris fait et cause pour Blaise Compaoré, l’Eglise catholique pour sa part maintient une position ambiguë par rapport aux échéances électorales à venir.

Une Eglise qui, à ses yeux, transpire « la démission et la compromission avec le pouvoir en place ». C’est, en effet, ce qu’il retient de la rencontre organisée du 06 au 09 juin 2005 par l’Organisation catholique pour le développement et la solidarité (OCADES) sur les élections 2005/2006.

Si au Burkina Faso la morale bat de l’aile, ce n’est pas seulement parce qu’au plus haut niveau de l’Etat, des gouvernants auraient travaillé dans ce sens. C’est parce qu’aussi certains gardiens de nos valeurs morales et religieuses n’auront pas toujours su jouer leur rôle pour amener gouvernants et gouvernés à leurs obligations de citoyens, mais aussi de fidèles. Au Burkina Faso, le régime en place, dans sa politique d’enracinement au pouvoir, a développé des actions multiformes qui l’ont aidé à accaparer les pouvoirs politique et économique, s’acharnant du même coup à subjuguer, à assujettir toutes les structures sociales et religieuses significatives du pays.

Pour ce qui concerne la communauté musulmane, il a trouvé des hommes qui se sont dépouillés de toute réserve pour identifier l’Islam à Blaise Compaoré. On en verra même des plus zélés crier que Blaise est un nouveau prophète, lorsque le Saint Coran dit qu’il n’est de dieu qu’Allah ! Chez les protestants, c’est quasiment la même chose. La hiérarchie, c’est devenu un secret de Polichinelle, roule pour le pouvoir et en retour bénéficie de bien des égards.

Frères et sœurs musulmans et protestants, je vous laisse le soin d’examiner ce que votre religion est devenue au Pays des hommes intègres. Pour ma part, chrétien - catholique, je ne saurais rester indifférent, parce que des enseignements je retire qu’il ne faut pas suivre le pâtre jusqu’au schisme et que la parole de Dieu ne doit pas être dévoyée.

Mgr Untani Compaoré a pris fait et cause pour le président sortant Les catholiques, pendant longtemps, ont donné le sentiment de vouloir, sinon ont opéré une séparation étanche entre la cité de Dieu et la cité des hommes, afficher une certaine neutralité. Mais très vite, celle-ci a volé en éclats avec Mgr Untani Compaoré qui, jamais comme on ne l’a vu par le passé, a pris fait et cause pour le président sortant. Alors que, "à l’homme de Dieu la béatitude divine, au politique les vertus politiques" , dit l’adage.

Depuis, des hommes de bien dans l’Eglise ont exprimé leur mécontentement, leur désapprobation, parfois même leur colère. Si cela a quelque peu freiné les élans partisans du prélat, on n’a pas senti que l’Eglise catholique en ait été touchée au point de revenir à une position de neutralité respectueuse de ses missions et des droits de ses fidèles. D’ailleurs, faut-il le rappeler, malgré ses accointances avec ce pouvoir, la cathédrale de Ouagadougou a fait les frais d’une profanation de la part des forces de l’ordre aux ordres du régime (Affaire Norbert Zongo).

La rencontre qui s’est tenue du 06 au 09 juin 2005 dans l’enceinte du Centre polyvalent. Cardinal Paul- Zoungrana de Ouagadougou ne dément pas ce sentiment. L’Eglise s’y est retrouvée pour parler des élections de 2005 et 2006 avec le thème "Les élections 2005-2006 au Burkina Faso : un challenge pour l’Eglise-Famille de Dieu au Burkina". L’OCADES Burkina (Organisation catholique pour le développement de la solidarité) a été le maître d’œuvre de cette réflexion. Il n’en est pas sorti grand-chose sinon des banalités qui expriment, quant au fond, la démission sinon la compromission de l’Eglise avec le pouvoir en place.

Lorsqu’autant de sommités, au surplus hommes de Dieu, se retrouvent pour parler de questions aussi importantes que celles qui intéressent la gestion de la cité, ils se doivent d’avoir à tout le moins le respect de leur sacerdoce pour ne pas taire ni courir, d’aucune façon, les graves dérives qui s’y constatent.

Dans l’enceinte du Centre polyvalent Cardinal Paul-Zoungrana, les prélats ont souhaité que cette période ne nous offre pas le spectacle attristant de ce qu’il nous a été donné de voir ailleurs : "Nous voulons qu’il y ait le respect mutuel, que nous allions aux élections avec une conviction citoyenne, respectueuse des droits humains et de la culture burkinabé", a souligné le président de l’OCADES Burkina, l’abbé Mukassa Joseph Somé.

De tout le temps qu’a duré la conférence, les communications, les témoignages n’ont pas manqué pour donner la juste lumière aux participants sur la laïcité, l’état de droit, la démocratie, les programmes des partis politiques. Il a été souligné notamment par Mgr Paul Ouédraogo, président de la commission de la pastorale sociale de la conférence épiscopale Burkina - Niger, l’importance de l’application de la vie de foi à la vie de société afin que, souligne-t-il, les principes et les valeurs moraux entretiennent la vigilance des partis politiques et privilégient les engagements clés pour le développement de la société. Comment ne pas être frappé par les omissions majeures qui confinent au péché ?

Des crimes économiques et de sang

Le Burkina Faso, c’est un pays où il a été relevé, sous le régime de Blaise Compaoré, le plus de crimes économiques et de sang. Les écritures recommandent pourtant le respect de ce principe sacré des dix commandements "Tu ne tueras point" dans Exode 20 /13.

Le verset 15 renchérit en des termes univoques sur ce que suit : "Tu ne commettras point de vol". Le Faso, c’est le pays qui, à travers une appréciation singulière de la démocratie, a dévitalisé la vie politique de ses valeurs essentielles pour céder la place à un pouvoir ayant fait main basse sur tous les pouvoirs et les richesses nationales.

Il n’est jusqu’à Yé Bognessan, premier artisan et compagnon de route des premières heures de Blaise Compaoré, qui n’ait tiré la conclusion que la morale agonise au Pays des hommes intègres ! Le moins que l’Eglise ait pu faire, c’est de rappeler tout cela, de partager les responsabilités et d’adresser les exhortations sans discrimination aux acteurs de la vie politique.

A ce sujet, écoutons encore la parole de Dieu : "Ne vous laissez pas corrompre par des cadeaux, car les cadeaux rendent aveugles même les plus clairvoyants et pervertissent les décisions des gens honnêtes". A cette rencontre, il a surtout été question de partis politiques, de leurs programmes. Des questions très importantes comme la liberté d’expression, la promotion d’une éthique de la légalité, de la citoyenneté et de la dignité humaine, il n’en a pas été fait une analyse en relation avec les responsabilités premières du régime en place, autant qu’il nous a été donné de le lire dans les journaux.

On ne peut pas vouloir préserver les élections de 2005 et 2006 des écueils des autres pays sans chercher à stigmatiser les facteurs qui pourraient y concourir et à demander qu’on les réduise avant d’engager les compétitions. C’est ce que d’honnêtes et courageux hommes comme le professeur Luc Marius Ibriga, éminent juriste font en dénonçant l’anticonstitutionnalité et la nullité de la candidature du président sortant à l’élection présidentielle de novembre 2005.

L’Eglise devrait aussi le faire parce qu’elle sait très bien que c’est justement le silence sur la volonté manifeste d’un tel passage en force qui amène aux mêmes situations catastrophiques connues sous d’autres cieux. Après tout, qui nous a donné la garantie que le Burkina échappera au sort subi tour à tour par les pays africains ou autres qui ont vécu ou vivent les troubles sociaux dont nous réunissions un à un les ingrédients ? Les longs règnes, vous connaissez ? C’est la descente aux enfers assurée pour les pays peu chanceux qui les connaissent.

Un peu plus d’intérêt pour la cause générale Demain l’Eglise pourrait être coresponsable du malheur des Burkinabé si elle n’a pas la franchise de dire à Monsieur Compaoré de ne pas se présenter. De ce point de vue, il aurait été indiqué que les hommes de Dieu parlent des violations de la Constitution, de l’irrespect du droit de suffrage et du droit des partis ; il aurait été chrétien de dénoncer toutes les lois régressives intervenues en violation de la Journée nationale de pardon, qu’ils ont eux-mêmes officiée.

Ils auraient dû ouvrir les yeux de leurs fidèles sur l’inversion du calendrier électoral pour des causes inavouables, tout en leur rappelant que jamais, sous ce régime, on n’a permis que les partis politiques aient le temps et les moyens de s’ancrer dans le paysage, de s’institutionnaliser. Cette rencontre aurait atteint ses objectifs si l’on avait aussi appelé à la réconciliation entre frères burkinabè et ivoiriens, donné, pourquoi pas, l’absolution aux gouvernants puisque l’Eglise est pardon, mais après avoir obtenu d’eux confession et repentir.

Or, évidemment on ne demande pas que l’Eglise ici se comporte comme l’Eglise camerounaise ou d’autres qui ont eu le courage, comme aux temps héroïques, de s’opposer aux dictateurs comme aux compromissions. Mais un peu plus d’intérêt pour la cause générale et les valeurs vraies que nous avons en partage avec tout le genre humain aurait fait du bien dans cette période d’instabilité, de remise en cause des fois et vocations.

Enfin, puisse ce précepte gouverner la conscience collective burkinabè : "Il y a six choses que le Seigneur déteste et ne supporte absolument pas :
- Le regard orgueilleux ;
- la bouche qui trompe ;
- les mains qui font couler le sang innocent ;
- l’esprit qui projette l’injustice ;
- les pieds qui courent faire le mal ;
- le faux témoin qui débite des mensonges".

(ln Proverbes 6/16 - 18 ).

Louis Nama

Fidèle catholique

Tel : 7657 51 57
Observateur Paalga

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Vos commentaires

  • Le 17 juin 2005 à 14:07 En réponse à : > Elections 2005/2006 : Les positions ambiguës de l’Eglise catholique

    tchrrrrrr !!!!

    • Le 22 juin 2005 à 18:33 En réponse à : > Elections 2005/2006 : Les positions ambiguës de l’Eglise catholique

      Je ne sais pas comment faire pour publier un article dans un journaL Est-ce que M. louis Nama peut publier un court article pour demander exactement la position du collège de sages par rapport à la lettre, surtout à l’esprit de leur demande de réformer la constitution. Quant aux prélats, vous savez un prélat qui ailme le champagne et le Wisky ne dira jamais jamais des choses qui sont en conformité avec la morale et la doctrine.
      Ce qui est bien, c’est que Dieu reconnaitra les siens m^me en dehors de la curaille !!!

  • Le 18 juin 2005 à 20:57 En réponse à : > Elections 2005/2006 : Les positions ambiguës de l’Eglise catholique

    L’Eglise, la politique, Dieu, la politique. Vieux débats dont il est si souvent nécessaire d’en débattre pour que chacun sache qu’elle est la place de Dieu dans la vie de l’homme et la place de Dieu dans la politique.
    Reconnaissons d’entrée de jeu qu’il est difficile à l’Africain de penser, de vivre, de s’épanouir en l’absence du sacré.
    Mais, cette omniprésence du sacré ne doit pas faire oublier aux hommes de Dieu leur mission : Celle de proposer un ideal de vie à l’homme. Proposer ? Oui proposer. L’age de l’imposition est dépassé. Si la logique de la proposition est acceptée, il est clair que les hommes de Dieu, ne peuvent en aucun cas se positionné sur la chose politique. Ils peuvent et doivent aider le peuple de Dieu a avoir un choix éclairé et à choisir des hommes de confiance pour diriger le peuple. Leur position, leur choix, qu’il le donne dans le secret de l’isoloir comme tout le monde et laisse le soins aux hommes politique de conduire le débat sur le terrain politique.
    Imaginez un temps soit peu que les hommes politiques se mettent dans cette même logique que celle des religieux, on enverrait des observateurs à l’élection du Pape.
    Merci et chacun à sa place (même si un évêque, un pasteur ou un imam est un citoyen, il est aussi homme de Dieu, donc un guide, et le guide est toujours sage.)

  • Le 19 juin 2005 à 18:43, par le fou En réponse à : > Elections 2005/2006 : Les positions ambiguës de l’Eglise catholique

    je voudrais juste rectifier que desmusumans ont pris fait et cause peut etre pour blaise compaoré, mais pas tous les msusulmans du burkina.

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