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Liberia : Et si on laissait Taylor "tranquille"...

Publié le lundi 15 décembre 2003 à 07h08min

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Près de six (6) mois après son départ forcé du pouvoir, l’ancien président libérien, Charles Taylor est sur la liste des personnes les plus recherchées par Interpol, la police internationale. Parce que, dit-elle, Taylor s’est rendu coupable de "crimes contre l’humanité et de graves violations des droits de l’Homme", notamment contre des citoyens sierra-léonais.

Le tribunal international chargé de juger ceux qui ont participé directement ou indirectement aux atrocités en Sierra-Léone au cours de la guerre civile qui s’y est déroulée ces dernières années, a lancé un mandat d’arrêt contre l’ancien président libérien. De leurs côtés, de nombreuses organisations de défense des droits de l’Homme exigent que Taylor soit jugé.

On se souvient bien des tractations, des discussions serrées qui ont abouti à un accord international sur le départ de Taylor et son exil au Nigeria. D’aucuns ont tendance à vite l’oublier : c’est parce que Taylor a reçu des assurances qu’il ne sera pas extradé et jugé qu’il a accepté de quitter le pouvoir. C’est parce que le gouvernement nigérian a eu des garanties internationales qu’il a accueilli l’ancien président libérien.

Aujourd’hui, les dirigeants nigérians se voient obligés de rappeler les uns et les autres à l’ordre et au respect de l’amnistie dont bénéficie Charles Taylor. Ils ont été contraints d’élever la voix pour dire avant tout, aux Américains qu’ils ont tort de réclamer l’extradition de l’ancien président libérien. Le gouvernement nigérian n’acceptera certainement pas que des kidnappeurs, avides d’argent, violent son espace aérien pour capturer Taylor.

Nombre d’observateurs de la vie politique libérienne sont unanimes à reconnaître que Taylor a mal géré sa victoire sur la dictature et le règne sanglant de Samuel Doe. Et cela après une guerre de "libération nationale".

Charles Taylor a été pendant six ans, le président constitutionnel du Liberia. Le premier Etat africain indépendant ne manque pas d’atouts naturels. Des atouts qui ne demandaient qu’à être valorisés pour mettre ce pays béni par la nature, à l’abri de la pauvreté.

Taylor a plutôt appauvri le Liberia : le "libérateur" s’est révélé tout le long de son règne, un chef de guerre, un dictateur assoiffé de pouvoir et un assassin. C’est une des raisons pour lesquelles il a déchiré son pays et favorisé la naissance de mouvements de résistance à son pouvoir.

En réussissant à abréger le règne sanglant de Taylor et à épargner au pays, des années de cauchemar, un pas important vers la paix a été franchi. Le plus important est en train de se réaliser.

A quoi servirait, aujourd’hui, de traîner cet homme qui a de nombreux partisans au Liberia et même ailleurs, devant la justice même s’il est responsable de beaucoup de crimes ? Pour l’exemple et pour dissuader tous ceux qui voudraient suivre ses pas. D’accord. Mais ses partisans sont en mesure de reprendre la guerre. Pour le plus grand malheur des Libériens. Alors que la priorité pour le nouveau président, M. Briand, est la paix et non le seul sort de Taylor. La solution ne serait-elle pas de laisser Taylor tranquille ?

Ceux qui tiennent coûte que coûte à traîner l’ancien président libérien devant les tribunaux devraient aller au bout de leur logique. Des Taylor à la tête d’Etats, il y en a et à l’abri de toute poursuite judiciaire. Ce n’est point, bien sûr, une excuse pour protéger des criminels.

Evitons donc cette justice à plusieurs vitesses et la raison du plus fort.

Bessia BABOUE
Sidwaya

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