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Quatorzième anniversaire de la IVe République : leurres du CODECO et lueurs d’un processus

Publié le vendredi 3 juin 2005 à 07h44min

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Ce 2 juin 2005, la IVe République a 14 ans. En effet, c’est le 2 juin 1991 que la Constitution actuelle du Burkina a été adoptée par référendum. Le Oui l’avait emporté avec un peu plus de 96 % des suffrages exprimés. 9 jours plus tard soit le 11 juin, cette loi fondamentale était promulguée mettant fin à la plus longue parenthèse d’Etat d’exception qu’a connu le pays de 1980 à 1991.

14 ans de régime constitutionnel ce n’est pas peu. C’est même un record au Burkina. Et pour cause ! L’expérience de la première République n’avait durée que 5 ans (5 août 1960 - 3 janvier 1966).

La IIe République ne vécut que 3 ans 7 mois (juin 1970 - février 1974). L’expérience de la IIIe fut encore plus brève (novembre 1977 - novembre 1980). On le voit bien, la IVe République avec ses 14 ans aura vécu à elle seule, plus longtemps que les trois premières réunies (11-12 ans). Légitimement on peut dire qu’à une longue période d’instabilité politique 1960-1991 a succédé une période d’"accalmie constitutionnelle" qui continue son petit bonhomme de chemin.

Les causes de cette longue période d’instabilité sont archi connues :

- jeunesse de l’Etat nouvellement indépendant avec l’inexpérience des institutions et des hommes chargés de le faire fonctionner.

- Désillusion de l’après-indépendance avec une grande demande sociale et des besoins d’équipement infrastructurel que l’étroitesse du champ économique national, l’absence d’investissements étrangers n’ont pu satisfaire.

- Mauvaise gouvernance aggravée par des dépenses de prestiges et des rivalités politiques malsaines, etc.

Autant de raisons qui ont fait le lit des multiples coups d’Etat donc de remise en cause de l’ordre constitutionnel, chose qui fut monnaie courante en Afrique durant les trois premières décennies des indépendances.

La chute du mur de Berlin, le discours de La Baule ont favorisé l’émergence du courant de réformes démocratiques sur le continent. A la faveur de ce vaste mouvement démocratique, l’ouverture politique initiée par le président Blaise Compaoré dès son accession au pouvoir le 15 octobre 1987 a conduit à l’avènement de la IVe République. Une transition plutôt douce comparée aux nombreux soubresauts qui ont affecté bien de pays africains au point d’installer certains d’entre eux dans des crises inextricables qui perdurent çà et là.

Le virage de la transition réussi, il reste au Burkina à éprouver la pertinence de son système en rapport avec ses réalités socio-historiques. Voilà qui explique les ajustements institutionnels et les réformes réglementaires qu’on a pu observer depuis 1991. L’enracinement de la démocratie est une quête permanente, une œuvre de longue haleine dans laquelle tous les acteurs politiques ont un rôle à jouer. Mais il reste bien entendu qu’il revient à la majorité présidentielle du moment d’impulser la dynamique selon les impératifs de l’heure et ses choix stratégiques. En 14 ans de vie constitutionnelle, le Burkina présente assurément les signes d’une démocratie vivante, ouverte et participative. Une lueur pour l’avenir.

Aussi on est quelque peu surpris des critiques à la fois simplistes et surréalistes développées dans certains milieux de l’opposition. En avançant pêle-mêle, les thèses de la "violation de la constitution", "trahison de la patrie", "pouvoir personnel" contre le président sortant, pour en appeler à la désobéissance civile ; l’opposition indique a contrario, qu’elle est dans une situation inconfortable. Elle ne sait pas quels sont les thèmes mobilisateurs des citoyens, le talon d’Achille du pouvoir auquel il faut s’attaquer pour espérer l’alternance au soir du 13 novembre. On en déduit qu’elle manque de génie politique. C’est dommage pour la démocratie.

D’un parce que la richesse du débat politique et de proposition alternative s’en ressent.

De deux, de guère lasse pour faire adhérer les citoyens à son discours politique, la solution facile de “créer l’incident” peut être envisagé. On l’a vu récemment au Sénégal où le leader du parti des Réformes a poussé l’extrémisme au point de demander une "insurrection populaire" contre les institutions légalement établies. Au Burkina un certain CODECO appelle les citoyens à des coups de sifflet et de klaxon de protestation pour commémorer le 14e anniversaire de la constitution. Est-ce là le début de la désobéissance civile annoncée ?

Peut-être bien. Mais plus vraisemblablement, c’est la tentative désespérée d’un présidentiable en mal de publicité. Un leurre parmi tant d’autres pour se donner la bonne conscience d’être l’opposition vraie.

Djibril TOURE
L’Hebdo

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