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Macaire Ouédraogo : l’homme qui mit Lamizana en ballottage

Publié le vendredi 3 juin 2005 à 07h40min

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Le général Aboubacar Sangoulé Lamizana, ancien président de la Haute-Volta, est décédé le 26 mai dernier. A l’occasion, plusieurs personnes ayant connu l’homme ont dit ce qu’elles retiennent de sa vie. Est de celles-là monsieur Macaire Ouédraogo, celui-là même qui a mis le général en ballottage lors de l’élection présidentielle de 1978.

Après la politique, Macaire Ouédraogo s’est tourné vers le social où il s’occupe essentiellement des orphelins, des enfants abandonnés et des personnes vulnérables.

A l’état civil, Macaire Ouédraogo est né le 1er janvier 1934 à Ouagadougou. Il est le fils de feu Ouédraogo Tendaogo Guillaume (président de l’Assemblée territoriale de 1950 à 1951 qui a donné son nom au principal camp militaire de Ouagadougou et du Burkina) et de feu Ima Marguerite. Cadre de banque, Macaire Ouédraogo a dirigé la Banque nationale de développement de Haute-Volta (BND-HV) de 1974 à 1978. Lorsque vint l’élection présidentielle de 1978, le candidat de l’UNDD (l’Union nationale pour la défense de la démocratie) se retrouva au second tour avec le général Sangoulé Laminzana au pouvoir depuis la chute de Maurice Yaméogo le 3 janvier 1966.

Le 16 mai 1978, les deux hommes allaient à la conquête du pouvoir, qui désignera Lamizana vainqueur avec 711 722 voix contre 552 956 pour son challenger, soit 56,28% contre 43,72%. Le taux de participation était de 43,55%. Au terme d’un processus sans précédent en Afrique, la Haute-Volta posait le 28 mai 1978 les jalons de la IIIe République. Lamizana sera alors aux affaires jusqu’au 25 novembre 1980. A l’annonce de sa disposition le jeudi 26 mai dernier, les Burkinabè de tous horizons et de toutes les couches sociales défilèrent pour lui rendre un dernier hommage ; fut de ceux-là Macaire Ouédraogo, qui confie que : "Le vendredi 27 mai 2005, lorsque je me suis rendu au domicile du général Lamizana, je me suis retrouvé dans les rangs des petits-fils que l’on faisait entrer.

En voyant mes cheveux blancs, le responsable du protocole s’est rendu compte que je n’étais pas sur la bonne voie, il a dû me réorienter et nous avons eu accès à la chambre mortuaire. J’ai regardé autour de moi et il n’y avait personne que je connaisse. En ressortant, j’ai vu des connaissances, notamment des militaires de haut rang. J’avoue n’avoir vu personne à qui je pouvais dire quoi que ce soit, pour exprimer la douleur que je ressentais en la circonstance.

Dans la soirée, j’ai été approché par les ressortissants de Mané (Macaire est ressortissant de ce département), qui voulaient que je les accompagne sur les lieux et je n’ai trouvé aucun inconvénient, mais loin de moi était l’idée d’avoir des griots autour de moi en pareille circonstance. C’est vrai que Lamizana et moi avons été des adversaires politiques, mais dans des circonstances bien précises.

Le frère de Lamizana, Al Wata, était le secrétaire de mon père (feu Guillaume Ouédraogo, président de l’Assemblée territoriale de 1950 à 1951 comme indiqué plus haut) et ils sont tous deux morts dans le même accident. De ce fait, Lamizana et nous nous connaissons depuis longtemps, tout comme nos familles respectives. Au 25e anniversaire du décès de mon père, nous avons associé la famille Lamizana pour commémorer la disparition d’Al Wata".

Macaire déjà dans les oubliettes ?

A l’occasion de l’assemblée générale des anciens, combattants le 12 mai 2005, Macaire Ouédraogo apercevait pour la dernière fois le général Lamizana qui, une semaine auparavant, lui avait demandé un complément d’informations sur la vie de feu Guillaume Ouédraogo.

Par le biais d’un de ses frères, les documents seront acheminés avec en sus, une carte de faire-part de la messe d’action de grâce pour le repos de la mère de Macaire Ouédraogo, qui avait lieu le dimanche 29 mai 2005 (le sort voulut que ce soit ce jour même qu’on inhumât Lamizana). Ce témoignage sur la vie de Lamizana fut une occasion pour rectifier certaines choses. En effet, il dit n’avoir rien compris lorsque la télévision nationale du Burkina, évoquant de nouveau les élections de 1978, a laissé entendre que Lamizana a été mis en ballottage par "un certain" monsieur Macaire. Amer, Macaire Ouédraogo estime que l’équipe aurait pu l’approcher pour savoir ce qu’il fait, où il est, s’il vit encore ou pas.

Macaire est en tout cas toujours là puisque nous l’avons rencontré à son domicile à Pissy. Après la politique, il s’est résolument tourné vers le social en s’occupant des orphelins, des enfants abandonnés et des personnes vulnérables, précisément du côté du Home Kisito. Il garde de Lamizana l’image d’une personnalité qu’il a toujours admirée pour sa simplicité et sa bonhomie. "Lamizana, confie-t-il, a toujours été un homme honnête même si sur le plan de la gestion des affaires, il n’a pas eu toutes les capacités".

Et de conclure : "Il a été quelqu’un de droit, et plein d’humanisme. Et s’il a pu toujours être droit, c’est parce qu’il était profondément croyant. Ce sont des valeurs qu’il faut lui reconnaître et en cela je puis affirmer que nous perdons quelqu’un d’un grand esprit. Nous perdons une grande personnalité qui mérite toute notre estime !".

Pierre Tapsoba
Observateur Paalga

P.-S.

Lire aussi : [Adama FOFANA, ministre chargé des relations avec le Parlement : "LAMIZANA lui-même s’était offert et ouvert à tout le monde et avait éliminé toutes sortes de distance avec les autres.”->http://www.lefaso.net/article.php3?id_article=7634/)

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