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Lettre du Caire : L’hospitalité est soudanaise

Publié le vendredi 13 mai 2005 à 07h37min

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A l’invitation de l’Union des journalistes africains (UJA) à participer à sa 25e session de formation du 7 au 27 mai 2005 au Caire en Egypte, j’ai l’esprit à la fois enjoué et troublé. Enjoué à l’idée de découvrir ce pays que je sais seulement placer sur la carte de l’Afrique et dont j’ai des connaissances livresques. Troublé parce que ne sachant pas ce qui m’attend loin de mon Faso natal.

C’est à 00 heure bien sonnée, le jeudi 5 mai 2005, que le AH 5017 de la compagnie Air Algérie a quitté l’aéroport international de Ouagadougou pour Alger. Là, je dois, ainsi que d’autres passagers, emprunter un autre avion pour le Caire, la plus grande ville d’Afrique. Dans l’appareil, quelques Noirs et Européens, beaucoup d’Arabes. L’ambiance est assez terne.

Le sommeil a pris rendez-vous avec la majorité des passagers. Seuls les stewards et les hôtesses qui se promènent dans les allées donnent vie à l’intérieur de l’avion complètement endormi. Après une heure et demie de vol, l’appareil entreprend de se poser.

Nous sommes à Bamako. Les choses vont assez vite jusque-là. Des passagers débarquent, d’autres embarquent et l’appareil reprend sa traversée des airs dans la nuit. Le silence est pesant, le sommeil des dormeurs plus profond.

Le temps passe. Ceux qui sont dans les bras de Morphée ne s’en aperçoivent nullement. Ils sont réveillés l’un après l’autre par des Stewards qui leur proposent à chacun un mouchoir trempé d’eau tiède. C’est le matin et il faut se nettoyer le visage avec. Alger n’est plus loin. Un petit-déjeuner est servi à tous les passagers.

A l’atterrissage, le jour est complètement installé. L’avion est maintenant immobile sur la piste. Des voyageurs le quittent déjà. Dehors, l’air est frais. La température est de 15°c selon une hôtesse à la voix câline. Tous les passagers sont à présent descendus. Un bus les convoie vers la salle de transit pour ceux qui vont vers d’autres destinations.

A 11h15, heure d’Alger, les passagers en partance pour le Caire sont invités à embarquer. Un bus les ramène au pied de la passerelle. Un peu partout des militaires sont en position. On ne s’amuse pas avec la sécurité ici. Rien n’est donc laissé au hasard et les faits et gestes des passagers sont très suivis, de même qu’ils sont tous fouillés.

Six heures pour relier Alger au Caire

Pour nous rendre au Caire, c’est un MS 0346 de la compagnie Egyt Air qui nous transporte. Un gros porteur compartimenté. Dans chaque compartiment, des écrans pour renseigner les passagers sur la position de l’avion par rapport à sa destination, la vitesse à laquelle il va, la distance par rapport au sol, l’heure à laquelle il doit arriver à destination...

Là, contrairement à la traversée Ouaga-Alger, l’ambiance est détendue. Il y a moins de dormeurs et plus de lecteurs de journaux. Chacun, pour tromper son impatience, a quelque chose à faire. Tout se passe bien dans l’ensemble. Face à l’heure d’atterrissage qui n’arrive pas, chacun prend son mal en patience, avec le seul espoir d’atteindre la capitale égyptienne sans encombre.

C’est après un service du déjeuner, avec café et autres boissons non alcoolisées, que le gros oiseau de fer se pose enfin à l’aéroport du Caire, à 17h27, heure locale. La température extérieure est douce.

De quoi contenter un sahélien comme moi qui vient de quitter une contrée où il fait plus de 30°c à l’ombre. Au sortir de l’aéroport, l’environnement est serein. A des postes stratégiques, des militaires sont arrêtés, leurs armes bien en évidence. On comprend bien pourquoi.

Le secteur touristique est un fort potentiel économique pour le pays de Moubarak et les deux attentats qui ont eu lieu Places Abdel Monseim Riad et Sayéda Aïcha, il y a quelques jours, n’autorisent pas la moindre inattention, vis-à-vis de ceux qui débarquent au pays des Pharaons.

C’est sans doute pour toutes ces raisons que je dois, ainsi que d’autres nouveaux arrivants, attendre plus de 30 mn dans le hall de l’aéroport, le temps que mon identité soit vérifiée et revérifiée, avant d’avoir accès à la ville.

Francs CFA ? connaît pas !

En quittant Ouagadougou, je n’ai pas trouvé nécessaire de faire le change de mes francs CFA en livres égyptiennes. Selon les termes de la lettre d’invitation de l’UJA, je suis pris en charge dès mon arrivée au Caire. Mal m’en prit. A l’aéroport, aucun comité d’accueil.

Je dois donc appeler les organisateurs de la session pour annoncer mon arrivée. Au bureau de change où je me présente, on ne connaît pas le CFA. Seul le dollar américain et la livre égyptienne ont droit de cité.

J’embarque dans un taxi, promettant au conducteur de régler la course une fois au siège de l’Union, au 12 A Maroun ST DOKKIS GIZA. C’est donc parti pour une course folle dans le grand Caire, où les automobilistes rivalisent de virtuosité au volant. Ils sont de temps en temps ramenés à la raison par les bouchons, propres aux grandes villes.

Mon taximan n’arrive pas, malgré les renseignements glanés par-ci par-là, à retrouver le siège de l’UJA. Aussi tournons-nous sans atteindre notre but. Il est visiblement fatigué et moi, tendu. Je lui propose dans un anglais bancal de me conduire à l’ambassade du Burkina au Caire.

Il consent à le faire, mais sans me dire qu’il ne maîtrise pas en fait la ville. Il y parvient après des indications, demandées à gauche, à droite, à ses congénères.

On finit par y arriver, mais l’ambassade du Burkina Faso est fermée. Mon chauffeur d’un soir comprenant peut-être mon embarras me laisse là, non sans me donner rendez-vous pour le lendemain afin d’être réglé. Nous ne nous revoyons plus.

Un exemple de solidarité africaine

Laissé à mon triste sort, je me torture les méninges afin de trouver une issue à mon problème. Assis sous un arbre, à un arrêt de bus, je regarde passer les citadins, aussi pressés les uns que les autres. Un noir comme moi vient s’arrêter près de moi pour attendre son bus. Sans hésiter, je l’aborde en français. Il parle seulement l’anglais et l’arabe. C’est un Soudanais.

Je lui explique donc dans mon anglais approximatif, mon problème. Il accepte de joindre les organisateurs de la session de l’UJA. Aucun des deux numéros ne répond. Il est pris par le temps, mais de son portable, il appelle un de ses amis, soudanais lui aussi.

Il travaille à l’Organisation internationale de la migration (OIM). En quelques minutes, il arrive et est tout de suite mis au courant de la situation. Lui aussi tente avec son téléphone portable de joindre les responsables de l’Union.

Peine perdue. Sans broncher, il me conduit en taxi à Hadayek Al-Maadi, chez des amis. Eux aussi sont informés de ce qui m’arrive. Une chambre est alors mise à ma disposition. Je suis déjà l’objet de petits soins de la part de la maisonnée. J’ai une nouvelle famille.

Vendredi 6 mai, je suis accompagné par le maître de maison et son frère cadet au siège de l’UJA. C’est jour non ouvrable en Egypte. On ne reçoit pas. Je dois revenir le lendemain. Le lendemain donc, je retourne sur mes pas avec mon logeur. Nous sommes enfin reçus par un des responsables des lieux. Après un thé bien chaud, mon hôte et moi sommes conduits au centre-ville.

Il descend en cours de route pour son métro et moi je continue le trajet avec les patrons de l’UJA à l’hôtel DAR-EL-MODARAAT, un hôtel militaire. C’est là qu’on me loge et c’est là que se déroulent les travaux de la 25e session de formation des journalistes africains.

Mes ennuis se sont dissipés. J’ai de nouvelles relations. Des hommes de cœur qui savent encore tendre la main à d’autres hommes, dans une ville où le modernisme prend le pas sur tout. Une ville où eux-mêmes, ainsi qu’ils le disent, ne sont pas toujours compris, parce qu’émigrés, ayant fui pour la plupart la guerre dans leur pays.

Depuis le Caire

D. Evariste Ouédraogo

Observateur Paalga

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