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Partage du pouvoir au Burkina : Mode d’emploi

Publié le mercredi 13 avril 2005 à 07h15min

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Pour l’auteur de cet article, la distribution ou partage du pouvoir n’est pas un fait du hasard. Elle est faite à la tête du client, donc sous-tendue par des considérations de toutes natures.

Croire que la composition de l’appareil étatique ne répond à aucune logique sociologique de distribution, c’est oublier que toutes formes d’organisation sociale se fondent sur un socle d’alliance, d’appartenance, de confiance, de légende et d’ordre. Comment comprendre la logique qui sous-tend la composition de l’exécutif , du judiciaire et du législatif au Burkina ? L’executif est le domaine des sujets sociaux tenus par des relations sociales tissées au cours des études, dans les syndicats ou partis politiques, sur un fond matrimonial, parental générationnel ou géographique.

Ceux qui occupent un poste dans l’exécutif au Burkina Faso partagent entre eux au moins un de ces liens. Ils disposent alors d’un pouvoir relationnel légitimé par la proximité. La rupture d’une de ces relations entraîne l’écartement du sujet. Dans une organisation sociale traditionnelle ils sont comparables à des notables ou à des vassaux bénéficiant de la main généreuse et de la bienveillance du souverain qui déchoit et promet.

Le judiciaire est l’autre des élites disposant de pouvoir élitique fondé sur un substrat intellectuel. Ils disposent d’un pouvoir d’initiés. L’institution fonctionne comme une secte, comme un ordre transcendantal d’où le vocable "suprême" qui y est attaché. Ce sont des prêtres, des initiés tenus par un serment social à l’instar de ceux que l’on rencontre dans les sociétés africaines.
Quant au législatif, il est un melting pot. Les sujets sociaux disposent de pouvoir populaire légitimé par la volonté des masses locales.

Les individus qui composent le législatif jouissent de grands prestiges acquis à coût de hauts faits d’arme, d’éloquence dans les assemblées, de charisme et à coût de statut d’anciens scolarisés reconnus comme les connaisseurs de la modernité, fut-elle minime. Ils sont des chargés de missions lourdement endettés qui doivent leurs situations aussi bien aux sacrifices consentis auprès des divinités qu’aux bénédictions dans tel ou tel sanctuaire.

Ce sont des porteurs d’idéaux sur qui reposent tous les espoirs du village, des héros de légende.
Au regard de la différenciation qui se révèle de ces statuts, on ne peut s’attendre à une fluidité vu les cloisons qui murent chaque entité. Chaque segment de pouvoir est une reproduction sociale de la stratification et des pouvoirs dans les sociétés africaines.

Toutefois s’il est plus facile à un justicier de devenir législateur (la jurisprudence est une émanation de la capacité législatrice du juge) ou exécutant, il est plus ou moins difficile à un exécutant de devenir justicier au risque de se venger de certains faits et plus difficile à un législateur de devenir justicier. Car autant un noble ne devient prêtre ou sacrificateur, autant il en est pour un héros.

S. Raphaël OUEDRAOGO
Sociologue-consultant, chargé de communication de l’AERD
Tél : 76 66 59 88

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