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Togo : L’opposition dans la rue, Faure en route pour la présidence

Publié le mardi 12 avril 2005 à 05h44min

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Par décret, le président togolais par intérim, Abass Bonfoh, a fixé la campagne électorale du 8 (à 0 heure) au 22 avril (à minuit) pour l’élection du 24 avril 2005 lors de laquelle 2,12 millions d’électeurs recensés par le ministère de l’Intérieur entre le 28 mars et le 5 avril devraient choisir le successeur de Gnassingbé Eyadéma.

Comme on le sait, les candidats en lice pour briguer la magistrature suprême après l’ère d’Eyadéma, décédé le 5 février après avoir exercé une présidence à vie de 38 ans, sont Faure Eyadéma, 39 ans, représentant le parti au pouvoir, le Rassemblement du peuple togolais (RPT) ; Emmanuel Akitani-Bob, 74 ans, numéro 2 de l’Union des forces du changement (UFC) de Gilchrist Olympio et candidat de l’opposition dite radicale, une coalition de six partis.

On se rappelle que ce dernier, déjà candidat à la présidentielle de juin 2003 contre le défunt président, avait engrangé 33,68% des voix dans des conditions où la transparence du scrutin n’était pas du tout évidente.

Dans cette course pour le fauteuil présidentiel, il y a aussi deux poids plume qui sont l’homme d’affaires et président du Parti du renouveau et de la rédemption (PRR), Nicolas Lawson, qui se réclame de l’opposition, et Harry Olympio, président du Rassemblement pour le soutien à la démocratie et au développement (RSDD), adepte d’une opposition modérée.

Si la désignation de quatre prétendants pour succéder à Eyadéma-père n’a pas fait l’objet de controverses pouvant mettre en péril le scrutin du 24 avril, il reste que cette même date et les modalités de la révision des listes électorales constituent la pomme de discorde entre le camp de Faure Gnassingbé et celui d’Emmanuel Akitani-Bob, qui incarne l’opposition radicale.

En effet, pendant que cette dernière réclame le report de l’élection, jugeant la date du 24 avril rapprochée et dénonçant des fraudes dans la révision des listes électorales, qui s’opérerait à la tête du client pour ne pas dire de l’électeur, le camp RPT soutient mordicus que cette date doit être respectée en vertu de la Constitution.

Et même si « dans le principe l’opposition a raison de revendiquer un report de la présidentielle, comme nous l’écrivions dans notre Regard sur l’actualité dans notre édition n°6367 du jeudi 7 avril 2005, à moins d’un cataclysme, elle sera obligée de boire la légalité jusqu’à la lie, dans la mesure où cette impréparation arrange les héritiers de « Calamity Gnass », qui doivent rire sous cape en se disant in petto : « Vous vouliez la légalité constitutionnelle ? Eh bien, vous l’aurez ».

En effet, il n’y a pas très longtemps de cela, Faure Eyadema, qui avait torturé la même Constitution pour légaliser son putsch alors que le cadavre de son père était toujours chaud, fut contraint par l’Union africaine, la CEDEAO ainsi que la communauté internationale à tempérer sa soif du pouvoir primo en remettant le fauteuil intérimaire à Abass Bonfoh en lieu et place de Fambaré Ouattara Natchaba, déchu de son poste de président de l’Assemblée nationale et secundo en organisant l’élection présidentielle dans les délais prescrits par la Constitution à savoir dans les 60 jours de l’ouverture de la vacance du pouvoir.

En s’arc-boutant sur cette même Constitution qu’ils avaient pourtant allègrement violée, Faure et les siens brûlent de joie de constater le manque de sérénité dans les rangs de l’opposition, qui passe le plus clair de son temps à battre le pavé pour exiger le report du scrutin, la révision des listes électorales et de la distribution des cartes d’électeurs.

Face donc aux jérémiades du camp adverse, le candidat du RPT a démarré sa campagne allègrement le dimanche 10 avril 2005 en espérant gagner une bonne longueur d’avance sur les autres prétendants. A moins qu’Emmanuel Akitani-Bob et ses camarades aient choisi de préférer le show de la rue au fauteuil de la présidence, ils ont tout intérêt à se réveiller s’ils ne veulent pas se réveiller le 25 avril avec la gueule de bois.

Et que dire de l’arrestation, le vendredi 8 avril, de l’ex-premier ministre, Agbéyomé Kodjo, dès son retour au Togo pour, dit-on, détournement de fonds, après 3 ans d’exil en France ?

Le régime du RPT cherche-t-il à affaiblir l’opposition en faisant intervenir le judiciaire comme on le voit souvent sous nos cieux ? Agbéyomé derrière les barreaux, c’est en tout cas un contradicteur de moins pour les héritiers du miraculé de Sarakawa, surtout que, ayant participé à la gestion des affaires de l’Etat (au port autonome de Lomé, dans différents ministères et à la primature...) il en sait forcément beaucoup. Et c’est à se demander si, en l’accusant d’avoir dissipé des deniers publics, et quand bien même il ne serait pas blanc comme neige, ce ne sont pas les voleurs qui crient au voleur.

Il revient donc à l’opposition de se réveiller enfin et de montrer de quoi elle est capable sur le terrain politique, si elle ne tient pas à payer le prix de revendications certes pertinentes, mais dont elle sait...pertinemment qu’elles ne seront pas satisfaites.

Cyr Payim Ouédraogo
L’Observateur

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Vos commentaires

  • Le 12 avril 2005 à 14:30, par Songoti En réponse à : > Togo : L’opposition dans la rue, Faure en route pour la présidence

    Paroles de sages qui pourraient concorder miraculeusement à la situation actuelle. Pendant que, d’un côté, on se noie dans une illusoire impopularité de Blaise compaoré tout en lui déniant le droit de se re-re-présenter à l’élection présidentielle, les partisans de ce dernier, telle une caravane qui passe, ne prennent même pas la peine d’écouter les chiens qui aboient timidement (ils devraient tendre l’oreille pour distinguer quelque chose dans cette cacophonie de l’opposition).
    Ils se complaisent, comme diraient l’autre, dans le "salissement de imaze de arversaire politique", sans prendre la peine de préparer la pré-campagne. Pour cette étape (la précampagne), ils ont raté le coche, et ça risque d’être ainsi s’ils continuent de vilipender et de temoigner de mépris à une frange de plus en plus importante des électeurs de notre pays.
    Ces gars, je le perçois, risquent d’être pris par le piège de leur vision manichéenne de la société burkinabè, faisant campagne seulement auprès de leurs partisans (les bons, les propres), tout en diabolisant ceux semblent acquis à ceux d’en face.
    Bon sang, pourquoi vous méprisez ceux qui doivent vous élire ?
    Eux en tout avancent, et à grands pas.

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