LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Nous sommes lents à croire ce qui fait mаl à сrοirе. ” Ovide

Madi Panadétiguiri, International burkinabè : « Il est temps que des sociétés sponsorisent les clubs de première division »

Publié le jeudi 27 août 2015 à 01h13min

PARTAGER :                          
Madi Panadétiguiri, International burkinabè : « Il est temps que des sociétés sponsorisent les clubs de première division »

3 février 2013 à Nelspruit en Afrique du Sud. Alors que les Etalons peinaient à arracher leur qualification en demi-finale face aux Eperviers du Togo, un joueur burkinabè parvint à enlever in extremis une balle envoyée de la tête par la star togolaise Emmanuel Adebayor. Le stade est en ébullition. Au Burkina, son nom revenait dans tous les commentaires du match. Lui, c’est Madi Panandétiguiri. Ailier gauche de l’équipe nationale, cette action n’a fait que confirmer tout le bien qu’on disait de lui. Mais après cette campagne sud-africaine, il a connu une traversée du désert. Aujourd’hui, après avoir tenté quelques expériences qui ont tourné court, il pense à sa reconversion. Dans cette interview, cet Etalon cuvée 2013 parle de son parcours, du secret de sa longévité au sein des Etalons et surtout du championnat national. Il plaide pour un sponsoring des clubs de D1 par de grandes sociétés. Lisez !

Lefaso.net : Absent des écrans et de l’équipe nationale, les supporteurs se demandent ce que Madi Panandétiguiri devient.

Madi Panandétiguiri : J’ai eu un parcours un peu en dents de scie. Je me retrouve aujourd’hui en Inde. Le championnat n’est pas très médiatisé. Beaucoup de personnes ne suivent pas ce championnat.
J’ai aujourd’hui pris un peu de recul par rapport à l’équipe nationale. Quand tu passes douze ans au sein d’une équipe nationale, à un moment donné, il faut savoir prendre du recul et donner l’occasion aux jeunes de s’exprimer aussi.

Est-ce que cela a été fait sur une décision personnelle ou parce que l’entraineur a décidé à un moment donné que tu ne faisais plus partie de son système de jeu ?

Je ne dirais pas que l’entraineur, à un moment donné, a dit que je ne fais pas partie de son système. Quand tu veux appeler un joueur à l’équipe nationale, il faut qu’il ait un club ou qu’il soit performant. Quand l’entraineur faisait ses choix, moi je n’avais pas de club. Même si après j’ai signé en Inde pour cinq mois. Le niveau du championnat n’est pas très élevé. J’ai eu des contacts avec l’entraineur, j’ai discuté de tout ça avec lui. Personnellement ce recul est très important.

Est-ce qu’on pourrait s’attendre à te revoir un jour à l’équipe nationale ?

Pas en tant que joueur.

Penses-tu déjà à une reconversion ?

Oui bien sûr. C’est presque la fin, je pense déjà à ce que je vais faire après le football. J’ai déjà des idées. Au moment opportun je vais vous faire part de ce que je vais faire.

Après la CAN 2013, il était question que tu t’engages avec Chippa United en Afrique du Sud qui évoluait en D2 mais finalement ça n’a pas marché. Que s’est-il finalement passé ?

Quand je signais le contrat, l’équipe était en première division. Après les vacances, je suis reparti pour la préparation, j’ai vu que l’équipe était descendue en deuxième division. Et quand tu as un contrat de première division ce n’est pas pareil que quand l’équipe descend en deuxième division. Pour le club, c’était difficile d’honorer le contrat qu’on avait signé. De commun accord avec les dirigeants, j’ai décidé qu’il était temps que j’arrête avec Chippa United. Il ne pouvait pas payer et je ne vais pas faire des kilomètres pour ne rien gagner.
Sinon je n’ai pas eu de problèmes avec le président, je n’ai pas eu de problèmes avec les dirigeants du club. D’ailleurs je parle tout le temps avec le président du club, actuellement ils sont en première division et ça se passe bien pour eux.

En quoi consistait concrètement ton contrat en Inde ?

Je jouais. Mais le contrat avec le club, avec Pune City, est fini au mois de février. De février à maintenant, je n’ai plus signé de contrat. Pour le moment, je prospecte pour ce que je vais faire après le football. Je pense déjà qu’il va falloir que je passe à autre chose.

Tu ne recherches plus de contrat ?

Pas n’importe quel contrat. En réalité, mon envie a diminué. Ce n’est plus comme avant. Je ne suis plus motivé. Passer trois, quatre mois sans contrat, je suis en train de vouloir passer à autre chose. Mais je veux rester dans le milieu du football.

A l’équipe nationale, tu as été pendant longtemps le meilleur latéral gauche des Etalons. Quel était le secret de cette longévité ?

Il n’y a pas de secret à cela. Au moment où tu es conscient de ta valeur, et à partir du moment où tu te dis que ce métier est ta vie, il faut travailler à gagner chaque fois que tu joues. Tu dois bien faire, et tu dois te surpasser, parce que c’est dans ça que tu manges, c’est dans ça que ta famille mange ainsi que tes amis. Si moi je gagne, mes amis aussi y gagnent. Donc c’est tout ce paramètre qui a fait qu’à chaque fois que j’étais sur le terrain de football, je me disais que c’était ma vie. Chaque match était comme ma dernière chance. C’était comme cela à chaque fois et c’est ce qui faisait que je me donnais toujours à fond. Il n’y a pas de secret, c’est croire en soi-même, croire en ce que tu peux faire sur le terrain, en tes capacités.

Il ne faut pas calculer parce qu’un match de football dure quatre-vingt- dix minutes. Tu donnes tout ce que tu as à donner et après le match tu verras. C’est ce qui fait que Madi a duré à l’équipe nationale. Tous les entraineurs qui venaient m’ont toujours fait confiance. Pour ça je rends grâce à Dieu.

Pourtant certains disent que ce sont tes pouvoirs mystiques qui ont fait ta longévité. Est-ce cela ?

Si c’était réellement le cas, Madi allait jouer au Real de Madrid ou au FC Barcelone. Parce qu’après ces deux clubs, c’est comme si le monde du football s’arrêtait. Donc si mystiquement je pouvais faire ça, je n’allais pas jouer au Burkina, j’allais le faire pour jouer à l’international. Ceux qui disent que c’est à cause du wack, je leur dis que c’est faux.

Ils se fondent sur les cas Issa Gouo en 2012, Jean Noël Lingani en 2013 et Narcisse Bambara en 2015, qui ont tous eu des blessures en évoluant dans l’axe gauche…

Je ne peux pas empêcher que les gens disent ce qu’ils pensent. Mais je trouve dommage qu’on spécule que je fais un truc pareil pour garder mon poste à l’équipe nationale. D’ailleurs, à l’équipe nationale, c’est deux ou trois matchs par an. Si j’avais ce pouvoir, je jouerais dans de grands clubs.
Pour gagner de l’argent, c’est au Real ou au Barça qu’il faut jouer. Je sais d’où je viens, je sais où je vais. Moi j’ai les bénédictions de mes parents. A chaque fois que moi je fais un truc, je ne le fais pas à moitié. Je le fais correctement. Dieu est là et nous voit tous. Si je blesse les gens pour jouer, Dieu le sait.
Dans ma carrière, dans ma vie, je n’ai jamais souhaité le mal de quelqu’un pour gagner à manger. Ce n’est pas ce qui a fait mon succès à l’équipe nationale. C’est le travail, le don de soi, le sérieux. C’est dommage que des gens pensent que j’ai fait tout ce parcours à l’équipe nationale avec un pouvoir mystique. Je trouve ça vraiment dommage pour le football.

En 2013, tu as disputé la finale de la CAN en Afrique du Sud. Comment as-tu vécu ce match dans un stade plein à craquer dont la moitié était acquise à la cause des Etalons ?

Ce sont des instants qu’on ne vit qu’une seule fois. Tu peux jouer plusieurs finales, mais la première est inoubliable. On ne peut pas décrire, il faut vivre pour comprendre et connaitre le bonheur de ce que ça fait. Avant on suivait la finale à la télé, et aujourd’hui on se retrouve face à la coupe. Je ne sais pas combien de millions de gens nous ont regardés ce jour. On a tout connu. Les gens nous insultaient partout, et Dieu merci, en 2013, c’était l’année du Burina Faso. Malheureusement le capitaine Mamadou Kéré ne l’a pas vécu avec nous. Aujourd’hui, même si je n’ai pas joué une Coupe du monde avec cette équipe, je n’ai pas de regret à porter la couleur du Burkina Faso.

Face au Togo, tu as été celui-là qui a sauvé l’équipe. Que t’a dit Paul Put après le match ?

Personnellement Paul Put ne m’a rien dit. Et c’est normal. Je suis un défenseur, donc c’est normal que je défende les buts.

C’est quand même l’une des deux grandes actions du match. Il y a aussi eu le but de la tête de Jonathan Pitroipa ?

Oui, j’avoue que c’est ça qui a déterminé la suite de notre parcours. Parce que si je n’enlevais pas ce but, on n’allait pas jouer la finale. Ce sont des moments inoubliables. Je me rappelle aussi de la Can des Juniors en 2003. C’était en Afrique du sud et j’ai eu à enlever une balle de but pareille.
Face au Togo, j’ai vu que Diakité était battu. J’avais pris un peu d’avance par rapport à la tête d’Adebayor. Quand il a tété la balle, il y a eu un premier rebond, j’ai laissé la balle passer avant de la reprendre sinon c’était dans le but. J’ai donc été lucide. Dieu m’a aidé et j’ai mis mon pied là où je devrais le mettre. Et cela nous a sauvés.

Paul Put est parti, Gernot Rohr est maintenant à la tête de l’équipe. Il a fait quelques matches avec les Etalons, comment apprécies-tu son système ?

Personnellement je n’ai pas suivi les matches. Mais au dire des joueurs, je crois que c’est quelqu’un qui va nous apporter encore plus. C’est quelqu’un qui a de l’expérience, qui travaille sur la volonté, la détermination. Parce que dans le football, quand tu n’as pas la détermination, la volonté de gagner, on ne peut pas gagner un match. Il mise beaucoup sur ça, et je pense que c’est une très bonne chose. Nous avons des joueurs qui sont techniques, mais il manque un peu la volonté. S’ils arrivent à compléter ce facteur je pense qu’on va continuer sur la lancée que nous avons connue en 2013. C’est vrai qu’on a fait une mauvaise prestation à la CAN 2015. En continuant à mettre du sérieux dans tout ce que nous faisons, je pense que cette équipe pourra se qualifier un jour pour le mondial.

La Fédération a récompensé le 7 août dernier les meilleurs acteurs du football national. Tes deux anciens clubs, le Santos FC et l’ASFA Yennega, n’ont presque rien eu. On imagine que la soirée a bien été pénible pour toi…

Elle était effectivement pénible. Mais il faut déjà saluer l’organisation de la soirée qui était à sa 2e édition. Je devais repartir plutôt mais le président de la Fédération m’a suggéré de rester pour l’occasion. Sans vous mentir, je ne regrette pas d’être resté. Sauf que je n’ai pas vu l’ASFA-Y ou le Santos FC dans les équipes qui ont été récompensées. Cela montre que le football burkinabè est en train d’évoluer. Si ce sont les mêmes équipes qui sont devant, c’est le signe qu’on n’avance pas, on stagne. Mais là, le RCB a été deux fois champion. C’est le football qui est en train d’évoluer.
Si les dirigeants mettent encore d’avantage de volonté, le championnat burkinabè sera l’un des meilleurs en Afrique de l’Ouest. Il est vrai qu’on est limité dans les moyens, mais on a l’essentiel pour réussir.

Les deux grands clubs de la capitale, l’EFO et l’ASFA-Y ont rencontré des difficultés financières qui ont poussé les joueurs à aller en grève pour réclamer leurs salaires. Est-ce que cela n’explique pas leur méforme de la saison ?

Il n’est pas normal qu’un club comme l’ASFA ou l’EFO n’ait pas de sponsors. Ces équipes étaient dirigées par des bonzes de l’ancien régime. Au lieu que ces derniers prennent de l’argent de leur poche pour financer les clubs, ils pouvaient leur trouver des sponsors. Il y a tellement de sociétés au Burkina qui sont en mesure de soutenir ces clubs pour peu qu’on les convie à le faire. Certaines sociétés ne ressentiraient même pas un trou dans leur caisse en prélevant 100 millions pour un club. Pourquoi elles ne le font pas ? Pour qu’on ait un championnat de niveau très élevé, je suggère que les sociétés sponsorisent les équipes. Car il est inconcevable qu’on veuille gérer l’EFO ou l’ASFA avec 10 millions de francs CFA. Ce n’est pas assez.
La Fédération pourrait donner l’exemple en refilant ses sponsors aux clubs. Je pense que chaque année, elle a des financements assez conséquents venant d’ailleurs qu’elle n’a plus besoin des fonds des sponsors. Car l’argent qui est redistribué ne suffit pas pour rendre ces clubs plus compétitifs. Si par exemple une société donne 50 millions à L’EFO et une autre à l’ASFA, le championnat sera plus intéressant parce qu’ils vont recruter de bons joueurs qu’ils vont bien payer.

Mais la Fédération a aussi besoin d’argent pour fonctionner…

C’est vrai. Mais il y a la FIFA, la CAF et le Ministère des Sports et des loisirs qui viennent souvent en appui à la Fédération. Les clubs n’ont pas accès à ces financements. La FBF devrait accepter de renoncer aux sponsors et cela va permettre à notre championnat de grandir en beauté de jeu et être attractif. Même le derby EFO-ASFA ne réunit pas grand monde au stade parce qu’il n’y a pas de spectacle.
En plus des sponsors, les supporters peuvent contribuer à financer les clubs. S’ils aiment vraiment leur équipe, ils peuvent le faire. Et cela va participer à faire de l’EFO ou de l’ASFA un grand club. Il y a de bons joueurs dans le championnat mais il manque d’organisation et de moyens. Et il faut les rechercher. On le fait partout mais pourquoi pas au Burkina ?

Le Ministère a accordé au cours de la saison écoulée des bourses aux clubs afin de leur permettre de créer de petites catégories…

C’est une bonne chose. Mais je pense qu’ils peuvent mieux faire. Au lieu de puiser dans les caisses du Ministère pour soutenir les clubs, s’ils encourageaient les sociétés à financer les clubs, ce serait mieux. Ces derniers pourront créer les petites catégories. Et vous verrez que le championnat sera meilleur dans les années parce qu’après avoir joué ensemble pendant un certain temps, il y aura de la complicité entre les joueurs.
L’avantage de développer notre championnat est la disponibilité des joueurs pour remplacer ceux qui sont appelés à l’équipe nationale et qui ne pourraient pas venir. Si aujourd’hui, Pitroipa ne peut pas venir à l’équipe nationale, je ne sais pas s’il y aura une solution de rechange au plan national.

Mais est-ce que le cas des locaux ne s’explique pas par le fait que les entraineurs n’ont pas assez confiance en eux pour les appeler à l’équipe nationale ? On se rappelle du cas Banou Diawara…

Le cas Banou Diawara a effectivement fait couler beaucoup d’encre et de salive. C’est normal. Il était le meilleur buteur et meilleur joueur du championnat. Il avait inscrit 15 buts. C’est vrai que le championnat burkinabè est amateur mais il avait aussi sa chance. Même s’il n’était pas titulaire, il devait être dans le groupe parce que c’est l’avenir. La CAN est passée. Il lui appartient maintenant de montrer qu’il méritait sa place. Ce n’est pas tard. Il peut toujours faire ses preuves. Car le connaissant, il est en mesure de nous faire rêver.
Je vais appeler une fois de plus les supporters à soutenir leurs clubs, à les aider à grandir et à s’imposer en Afrique.

Propos recueillis par Jacques Théodore Balima
Lefaso.net

PARTAGER :                              

Vos commentaires

  • Le 27 août 2015 à 18:45, par Kimos En réponse à : Madi Panadétiguiri, International burkinabè : « Il est temps que des sociétés sponsorisent les clubs de première division »

    Oh. ce jouer est un ami.nous n ous sommes rencontres en Allemagne et nous avons fait un Petit bout de chemin Ensemble.J’I ETE AU DOUA D’UN DE SES PARENTS ET DEPUIS LORS, les evenements de la vie nous ont eloignes malheureusement. Je cherche son contact pour lui dire que les amis de WIESBADEN OU IL A EVOLUE ET OU JE SUIS ACTUELLEMENT DEMANDENT BEAUCOUP APRES LUI ET JE N’AI PLUS SON CONTACT MALHEUREUSEMENT. SI lui meme me lit, qu#IL SE RAPPELLE DE CELUI AVEC QUI IL EST ALLE A HEILIGE FAMILIE DISCUTER AVEC UN AMI POUR TROUVER UN LOGEMENT A WIESBADEN : JE SUIS SON FRERE BURKINABE DU SUD OUEST ET NOUS AVONS MEME PRIS PHOTO ENSEMBLE ICI EN ALLEMAGNE OU IL M’a remis son maillot apres un match au stade de Wiesbaden ou il a joue dans la 2e Division alors que Aristide Bance etait a Myence ! Bref, j’attends une Suite....

  • Le 27 août 2015 à 18:57, par lesage En réponse à : Madi Panadétiguiri, International burkinabè : « Il est temps que des sociétés sponsorisent les clubs de première division »

    Merci Madi pour tout ce que tu as apporté au football Burkinabé depuis que tu étais cadet jusqu’au sénior. Merci pour toujours.

 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique
Burkina/Reprise de la Ligue1 : Quatre chocs à l’affiche