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Transition au Burkina : Entre valse-hésitation, heureuses fautes et leçons venues d’ailleurs

Publié le mercredi 29 juillet 2015 à 03h33min

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Transition au Burkina : Entre valse-hésitation, heureuses fautes et leçons venues d’ailleurs

Agathon Rwasa, le leader de l’opposition politique burundaise a pris part, le lundi 27 juillet 2015, à l’ouverture de la première session parlementaire consécutif au scrutin contesté et boycotté par l’ensemble des partis d’opposition, dont le sien. Stupeur générale, incompréhension, indignation et colère tant à Bujumbura que sur les autres collines burundaises et même au-delà.

L’intéressé, interrogé par un média international, a justifié sa présence à cette session de mise en place des organes du parlement par sa volonté de « jouer le jeu » et de « préserver ses militants des assassinats » par les miliciens et les forces de défense et de sécurité du pouvoir. Les dizaines de morts ou de disparus, les centaines de blessés ou d’interpellés, les milliers de refugiés, l’attribution complaisante de postes de député à des membres de l’opposition par la Commission électorale compte pour du beurre. En somme la seule présence du messie à l’Assemblée nationale suffirait à sauver le pays. Comme quoi il y a toujours un motif pour justifier une décision ou une prise de position frisant la trahison aux yeux de ses partenaires et sympathisants...

Décidemment sous nos tropiques, en politique, la morale, les idéologies sont adaptables aux intérêts personnels, à l’image du caméléon qui prend la couleur dominante de son environnement. L’on comprend à présent pourquoi l’honorable Rwasa revendiquait bruyamment, quelques jours auparavant, la reprise du dialogue par le pouvoir. Au lieu de dire qu’il y avait un « deal » secret en cours, entre lui et le parti au pouvoir, et que ce tapage ne visait qu’à endormir la vigilance des autres opposants !

A présent que tout le monde le sait, quelle sera l’attitude des autres partis politiques de l’opposition radicale, des militants de son parti et de toutes les forces vives opposés à un troisième mandat Nkurunziza. Que diront ou feront les combattants pour le respect des constitutions de par le continent et le monde ? Les jours à venir nous le diront.

En réalité Agathon Rwasa n’innove point en matière de grand écart, de retournement de veste, d’alliance contre-nature ou d’abandon de la troupe au milieu de la bataille pour des intérêts bassement personnels sous de fallacieux prétextes : préservation de l’intérêt supérieur de la Nation, paix sociale, renforcement de la démocratie, poursuite du dialogue, liberté d’action du parti, etc. De nombreux exemples essaiment à profusion la vie politique africaine. Quelques cas.

En juin passé, c’est avec surprise que le commun des citoyens Burkina et de la Guinée, a appris avec étonnement que Cellou Dalein Diallo, leader de l’opposition politique guinéenne, a séjourné le 19 juin 2015 à Ouagadougou. Il serait venu rencontrer Dadis Camara, ci-devant chef de la junte guinéenne, dont les soldats ont tué, le 28 septembre 2010, à bout portant, environ cent cinquante personnes au stade du même nom à Conakry. Cela faisait suite à l’appel à un meeting de ces mêmes leaders de l’opposition. Des centaines d’autres personnes furent violées et blessées ce jour-là. Lui-même Dalein Diallo aurait eu quatre côtes cassées, selon ses propres aveux.
Quels types d’accords peut-on alors signer avec un personnage comme Dadis, sous le coup de poursuites judiciaires, au prétexte de vouloir barrer la voie au président en place. Cellou Dalein Diallo a, en tout cas, justifié cette incongruité en slalomant entre le dilatoire, la fuite en avant et la langue de bois.

Un acteur politique coutumier des revirements dans les prises de position est le leader incontesté de l’UNDD (Union Nationale pour le Développement et la Démocratie), Me Hermann Yaméogo. Ainsi, en 1999, alors que l’on était au temps fort de la lutte menée par le CODMPP (Collectif des Organisations démocratiques de masse et de partis politiques) consécutivement à l’assassinat du journaliste Norbert Zongo et de ses co-suppliciés le 13 décembre 1998 à Sapouy, le très charismatique leader de l’UNDD annonçaient son retrait du mouvement. Selon Me Hermann Yaméogo, son parti a atteint les objectifs qu’il poursuivait et veut recouvrer son indépendance et sa liberté d’action…Peu de temps après, ce parti se retrouvait, en compagnie d’autres formations politiques, dans un gouvernement d’ouverture dirigé par Kadré Désiré Ouédraogo (KDO), actuellement président de la Commission de la CEDEAO.

Même les institutions peuvent faire dans la surenchère

Une décision, aussi curieuse que discutable voire inopportune, peut aussi être l’œuvre d’une institution : le CNT (Conseil National de la Transition) du Burkina Faso vient de donner un exemple. Une fois de plus. L’on se souvient que la cour de justice de la CEDEAO (Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest) a retoqué, voici quelques semaines, le Code électoral CNTiste, jugé discriminatoire à l’égard des autres acteurs politiques burkinabè. Alors qu’en toute humilité et afin de préserver la paix et la quiétude sociales, le CNT devait prendre acte et s’y conformer, surtout que mêmes les plaignants eux-mêmes, (Congrès pour la Démocratie et le Progrès (CDP) et ses alliés) ont eu le triomphe modeste, ce fut le contraire. Les animateurs de cette institution votaient le 16 juillet dernier, une résolution mettant en accusation le président Blaise Compaoré, la trentaine de membres du dernier Gouvernement de Luc Adolphe TIAO. A cette liste il faut ajouter le Pr Joseph Paré, ex-ministre des Enseignements secondaires et Supérieur et Me Gilbert Noel Ouédraogo, président de l’ADF-RDA et ex-ministre des Transports.
Et dire que cette décision tombait le jour même où le Président du Faso, Michel Kafando, rendait compte au peuple des décisions qu’il a prises pour une accalmie sociale. Le CNT voudrait vendanger les efforts de M’ba Michel, qu’il ne s’y prendrait pas autrement… Comme le disait si bien l’Evénement n°308 du 25 juillet 2015, ces mises en accusation « arrivent dans un environnement d’incrédulité à propos d’un CNT qui ne montre pas de sérieux et de la rigueur dans ce qu’il entreprend ». D’autant que des poursuites engagées contre des généraux de notre armée sont toujours dans les tiroirs, le ministre de la Défense d’alors, Yacouba Isacc Zida, n’ayant pas donné son accord pour la poursuite de la procédure.

A nouveau le CDP and Co se sont vus contraints d’attaquer devant le Conseil constitutionnel ces mises en accusation. Une nouvelle heureuse faute que les adversaires mettront à profit, sans nul doute, comme thèmes de campagne au cours des scrutins à venir. Sans oublier que sous nos cieux et singulièrement dans notre pays, les populations sont toujours sensibles à l’injustice, l’exclusion et autres formes de harcèlement politique. On l’a vu en Côte d’Ivoire avec Alassane Dramane Ouattara (ADO), où ses adversaires (de Bédié à Gbagbo en passant par le général Guéi), à force d’utiliser la loi pour lui barrer la voie à la magistrature suprême lui ont créé une sympathie à travers le continent africain et le monde. La suite on la connait…Ouattara est de nos jours président de son pays. Or les mêmes causes produisent les mêmes effets, selon les spécialistes. Donc à trop en vouloir aux autres, le CNT risque fort de les pousser dans les bras de ceux contre lesquels il veut les prémunir !

Alors, nos sages du Conseil constitutionnel vont-ils rejeter cette nouvelle requête du CDP and Co ou vont-ils privilégier la préservation de la paix sociale en permettant que le peuple, au nom de qui tout le monde parle, puisse décider ? Wait and see !

Jusque là le jeu politique national n’était que parade et propos bon enfant. C’est maintenant qu’il devrait devenir vraiment intéressant mais en même temps porteur de tous les dangers pour le climat social. Mesdames et Messieurs du Conseil constitutionnel, nous sommes suspendus à vos lèvres !

Neya de Gabou

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Vos commentaires

  • Le 28 juillet 2015 à 17:25, par FODON En réponse à : Transition au Burkina : Entre valse-hésitation, heureuses fautes et leçons venues d’ailleurs

    Transition au Burkina : Entre valse-hésitation, heureuses fautes et leçons venues d’ailleurs

    MON FRÈRE GAGOU QUE VOULEZ VOUS DIRE ? QUE LE CNT VA NOUS ABANDONNER OU QUOI ? SI JE COMPRENDS BIEN DANS CE PAYS LES GENS SONT POUR L’IMPUNITÉ.DE TOUTE FAÇON QUAND CA CHAUFFERA COMME TU PRÉTENDS LE PRÉDIRE TU NE SAURA PAS SI TOUT SE PASSERA BIEN POUR X OU Y.

  • Le 28 juillet 2015 à 17:42, par Aussi En réponse à : Transition au Burkina : Entre valse-hésitation, heureuses fautes et leçons venues d’ailleurs

    une très belle réflexion. nous souhaitons en tout cas que les conseillers du conseil constitutionnel ne verront pas comme ces caméléons qui à tout bout de champs changent pour paraitre bon et juste tout simplement pour les gains.

  • Le 28 juillet 2015 à 17:55 En réponse à : Transition au Burkina : Entre valse-hésitation, heureuses fautes et leçons venues d’ailleurs

    Comptez sur cherif et sa bande remplis de haine et la soif de vengeance pour nous tirer d’affaire...... Ils ne connaissent rien d’autre.

  • Le 28 juillet 2015 à 18:07 En réponse à : Transition au Burkina : Entre valse-hésitation, heureuses fautes et leçons venues d’ailleurs

    Depuis que j’ai entendu Cherif traiter l’ancienne majorité de grabataire, j’ai compris que lui la n’est pas un homme d’état. Juste un aigri qui voyait la une occasion de se venger. Malheureusement pour lui, la transition ne dure qu’un an avec une légitimité réduite puisque pas élue. Sinon on allait voir la même arrogance qu’au temps de blaise. Le plus intéressant est qu’avec les élections a venir personne n’aura cette majorité absolue, absolue. Ce qui va modérer le comportement de certains. Sinon on était mal barré encore. Ce que ne semble pas vouloir les CNTistes. Incompréhensible.

  • Le 28 juillet 2015 à 19:18, par nadjiol En réponse à : Transition au Burkina : Entre valse-hésitation, heureuses fautes et leçons venues d’ailleurs

    27 ans de pouvoir de crimes économiques ,de crimes de sang, etc. on veut qu’on passe l’éponge ,sur tout cela.Certains Burkinabe sont pires que la PESTE.

  • Le 28 juillet 2015 à 19:46, par Jess En réponse à : Transition au Burkina : Entre valse-hésitation, heureuses fautes et leçons venues d’ailleurs

    On ne te suit pas ! Tu commences par des exemples sur des personnalités politiques d’opposition, puis tu sautes du coq à l’âne... vers le CNT. On a compris : rien n’est fluide dans ton analyse qui vise à défendre maladroitement le pouvoir déchu. ça me rappelle le journal l’Opinion de Lingani

  • Le 28 juillet 2015 à 21:58, par Mr. OUEDRAOGO En réponse à : Transition au Burkina : Entre valse-hésitation, heureuses fautes et leçons venues d’ailleurs

    M. Neya de Gabou, j’ai la chair de poule. j’ai honte. Je suis estomaqué. De toute façon, la trentaine de morts dont les corps ne se sont pas encore décomposés vous ont à l’œil de par l’au-delà. Que la terre du Burkina leur soit légère. Que Dieu les accueille dans son paradis. Mon DIEU,quel monde immonde ! Quel politique de l’estomac qui obscurcit les consciences ! Ainsi donc vous voulez le chaos au Burkina. Autrement dit, croyez-vous que les Burkinabè supporteront de voir celles et ceux qui ont fait bloc avec Blaise pour pousser le pays dans le précipice se pavaner pour battre campagne alors que les gens pleurent toujours leurs morts ? Eh ! la politique du ventre, quand tu nous tiens ! A notre humble avis, les mosquées et les églises doivent être les lieux de fréquentation par excellence de ces hommes et femmes qui ont lourdement fauté, afin que Dieu leur fasse miséricorde. Peut-être à partir de 2020, ils pourraient réessayer. Mais pas maintenant. Vraiment pas maintenant. Autrement, il faudrait impérativement ouvrir la frontière à Blaise et à sa famille, pour qu’ils reviennent tenter leur chance eux aussi. Nous espérons que le Conseil Constitutionnel écartera tous ces gens au nom du bon sens, de la morale et de la paix sociale.

  • Le 29 juillet 2015 à 09:45, par PASCAL En réponse à : Transition au Burkina : Entre valse-hésitation, heureuses fautes et leçons venues d’ailleurs

    au secours !!! la mairie !! la circulaire est infestée de nids de poule et de crevasses qui chaque jour deviennent de grands fossés, que dis-je, des puits perdus. La circulation y est devenue très dangereuse. PRUDENCE ET VIGILANCE AUX USAGERS ! ACTION/REACTION AUX AUTORITES ! MERCI DE NOUS SAUVER LA VIE !

  • Le 29 juillet 2015 à 10:47, par AD VITAM AETERNAM En réponse à : Transition au Burkina : Entre valse-hésitation, heureuses fautes et leçons venues d’ailleurs

    Bonjour tous,
    Je m’adresse à internaute N° 7, pourquoi croyez-vous qu’on appelle Nelson Mandela un grand HOMME ? parce que il a pardonné.
    Il a fait 27 ans de prison (Blaise 27 au pourvoir)
    Il a été torturé (électricite, concassage de pierre etc...)
    Ils ont tué presque tous ses amis
    Ils ont tué les enfants de ses amis
    Etc... Cet homme avait les mil raisons d’exterminer tous ceux qui lui ont fait du mal, il était président et il avait le pouvoir de son côté, il pouvait tout faire...
    Il a su pardonné... Et il est rentré dans l’histoire
    A sa mort presque tous les dirigeants du monde etaient présents à ses obsèques.
    C’est ça un grand homme.
    A bon entendeur salut !

  • Le 29 juillet 2015 à 16:56, par Le Vigilent En réponse à : Transition au Burkina : Entre valse-hésitation, heureuses fautes et leçons venues d’ailleurs

    Internaute N° 9 - AD VITAM AETERNAM, C’est facile de citer le cas de Nelson Mandela en Afrique du Sud pour appeler a l’absolution des auteurs des crimes économiques et de sang du régime de Blaise Compaoré. Qui vous a dit qu’en Afrique du Sud le pardon a été accordé a tous les criminels de l’Apartheid sans passer par l’étape Vérité-Justice-Réconciliation ? Vous avez vraiment la mémoire courte, sinon vous êtes de mauvaise foi.
    Pourquoi voulez-vous donc que, pour le cas du Burkina, cette étape cruciale soit escamotée, voire complètement ignorée et qu’a chaque fois, l’on rejoue la tragi-comédie de la "Journée du pardon", ce faux fuyant inventé par les serviteurs zélés de Blaise Compaoré pour le soustraire a la justice de son pays ? Vous voulez donc sacraliser l’impunité dans notre pays et ce de génération en génération ?
    Dites a vos commanditaires qu’ils se trompent d’époque et qu’ils devront obligatoirement répondre de leurs forfaits.

  • Le 2 août 2015 à 19:27, par gangoblo En réponse à : Transition au Burkina : Entre valse-hésitation, heureuses fautes et leçons venues d’ailleurs

    si la majorité du peuple burkinabé n’est pas n’est pas prostitué et inconscient, on verra sa réaction à la validation des listes électorales. Si l’assemblée est partie en fumée , ce ne serait pas le conseil constitutionnel qui l’échappera. soyons sérieux, honnêtes, ne soyons pas aussi égoïstes et méchants ; pensons aux autres et pas seulement à nos tubes digestifs et à nos familles.

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