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L’électorat burkinabè et la politique : quel degré d’importance, quel niveau d’intérêt ?

Publié le mercredi 17 juin 2015 à 20h37min

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Dérivé de la racine grecque « polis », la politique signifie aussi la gestion des affaires de la cité. Dans un régime démocratique qui, sous sa forme idéal-typique, se caractérise par la détention du pouvoir par le peuple et l’implication de tous dans la prise et la mise en œuvre des grandes décisions nationales, la logique voudrait que tous les individus accordent un intérêt particulier à la politique en tant que gestion de la cité. Les réalités constatées dans les vécus quotidiens semblent se présenter autrement. En effet, aussi bien dans les vieilles démocraties que celles en construction, l’importance et l’intérêt pour la politique ne sont pas reconnus par tous les citoyens. Tandis que certains la trouvent importante et y accordent un intérêt, d’autres adoptent des attitudes contraires à son endroit. La présente note s’adonne à une description de cette réalité au Burkina Faso.

NB : Les données chiffrées utilisées dans cette note sont issue d’une enquête réalisée en 2010 pour analyser les valeurs régissant le peuple burkinabè.

1 Les burkinabè trouvent-ils la politique importante ?

Quand demande aux burkinabè s’ils accordent de l’importance à la politique, les réponses sont diverses. Il y a ceux qui pensent qu’elle est importante (44,7%), ceux qui ne la trouvent pas importante (49,6%) et ceux qui ne savent si elle est importante on non (5,4 %). En sommes, parmi les burkinabè âgés de 18 ans et plus(les votants potentiels), moins de la moitié accordent de l’importance à la politique. Ils sont donc majoritaires à ne pas la valoriser.
Par ailleurs, la plus forte proportion (59,2%) de ceux qui trouvent la politique importante est constatée dans la région du Centre. Les autres régions dans lesquelles cette tendance est constatée sont respectivement celle du Plateau Centrale (53,6%) et du Centre-Nord (51,0%). Dans la région du Centre-Sud, cette part s’élève à 50% ; l’effectif de ceux affirment l’importance de la politique et égale à celui de ceux qui ont un autre avis. Pour les neuf autres régions du Burkina Faso, c’est l’inverse qui est constatée. Les burkinabè accordant de l’importance à la politique sont les moins nombreux.
Il ressort aussi que l’importance de la politique est plus reconnue et considérée en milieu urbain qu’en milieu rural (42,4% parmi ceux qui habitent en milieu rural et 50,6% parmi les résidents du milieu urbain ; soit un écart de 08 points).
De plus, seulement 34,5% des femmes accordent de l’importance à la politique alors qu’au niveau des hommes ce taux est 55,3%, soit 62 femmes pour 100 hommes trouvant la politique importante.
Parmi les ouvriers (70%) et les fonctionnaires (51,7%) ceux qui accordent de l’importance à la politique sont majoritaires alors qu’ils sont minoritaires parmi les ménagères (33,7%), les chômeurs (40%), les cultivateurs/Eleveurs (46,7%), les agents du secteur informel (47,8%) et les élèves/étudiants (48,6%).

A tous les niveaux de fréquentation scolaire, ceux qui accordent une importance à la politique sont minoritaires même si leur proportion est plus élevée parmi ceux qui ont fréquenté que ceux qui n’ont pas fréquenté, soit 49,4% contre 42,1%. « La politique est plus une affaire de ceux qui sont allés à l’école du blanc » dit-on de façon prosaïque. En effet, la part des burkinabè accordant de l’importance à la politique et qui sont de niveau primaire est de 52,7% alors qu’elle est de 62,1% parmi ceux ayant fréquenté le supérieur. Ainsi, constate-t-on que plus le niveau de fréquentation des burkinabè est élevé plus ils accordent une importance à la politique.
Les jeunes du Burkina Faso sont ceux qui ont un âge n’excédant pas 35 ans. Aujourd’hui, leur rôle dans le processus de renouvellement de la classe politique burkinabè est reconnu par la plupart des observateurs. Mais, encore faut-il que ces jeunes accordent une importance à la chose politique. Les données montrent que la part des jeunes (18-35ans) trouvant la politique importante est inférieure par rapport à celle de ceux qui ont un âge supérieur à 35 ans, c’est-à-dire qui ne sont plus des jeunes. L’importance accordée à la politique est affirmée par 41,5% des jeunes alors que cette part s’élève à 47,6% parmi les non jeunes ; soit un écart de 6,1 points. C’est comme si les jeunes accordaient moins d’importance à la politique par rapport aux autres catégories d’âge.
Dans les quatre principales religions du Burkina Faso, les fidèles accordant de l’importance à la politique sont minoritaires par rapport à ceux qui ne la trouvent pas importante, avec un écart moyen de 12,4 points. C’est au niveau des protestants qu’est constatée la plus faible proportion de fidèles trouvant la politique importante (39,0%) alors que ceux de la religion traditionnelle enregistrent la plus forte part (49,4%). Elle est respectivement suivie par les catholiques (46,7%), les musulmans (44,0%) et ceux n’appartenant à aucune religion (40,0%).

2 Les burkinabè s’intéressent-ils à la politique ?

L’intérêt accordé à un fait peut déterminer les actions et comportements initiés à son endroit. Ainsi, mobilisent-ont les individus autour de leurs intérêts. Quel intérêt pour la politique chez les ayant un âge supérieur ou égal à 18 ans ? Dans l’ensemble, ceux qui ne s’intéressent pas à la politique au Burkina Faso sont majoritaires par rapport à ceux qui y accordent un intérêt ; soit une proportion de 51,2% contre 46,1%. Certains burkinabè ne sont pas arrivés à déterminer leur intérêt pour la politique ; ils sont 2,8% à avoir une telle attitude. En sommes, peu de burkinabè accordent un intérêt à la politique.
Selon les régions, c’est seulement dans les régions du Centre-Nord (59,4%), du Centre-Ouest (56,3%), du Plateau Central (53,6%), du Centre-Est(51,1%) et de la Boucle du Mouhoun(50,9%) que ceux qui s’intéressent à la politique sont majoritaires. Pour les huit autres régions, ces derniers sont minoritaires. La région des Hauts-Bassins est celle qui a la plus faible part de ceux qui en sont intéressés.
Par ailleurs, aussi bien en milieu rural qu’en milieu urbain ceux qui ont un intérêt pour la politique demeurent minoritaires. Cependant, leur part est plus élevée en milieu rural que dans les zones urbaines, soit 46,6% et 44,8% (une différence de 2,2 points).
De plus, seulement 35,8% des femmes estiment en être intéressées alors qu’au niveau des hommes ce taux est 56,8%, soit 159 hommes intéressés pour 100 femmes ayant un intérêt pour la politique.
Parmi les ouvriers (70%), les fonctionnaires (56,7%) et les cultivateurs et éleveurs (51,4%), ceux qui s’intéressent à la politique sont majoritaires alors qu’ils sont minoritaires parmi les ménagères (33,3%), les chômeurs (35%), les élèves/étudiants (45,8%) et les agents du secteur informel (47,3%).
Parmi ceux qui ont eu à fréquenter, ceux qui s’intéressent à la politique sont majoritaire avec un taux de 52,2% alors que parmi ceux qui n’ont pas fréquenté ce taux est 42,2%. Encore une fois, « l’intérêt pour la politique est plus une affaire de ceux qui sont allés à l’école du blanc » dit-on de façon prosaïque. En effet, la part des burkinabè de niveau primaire s’intéressant à la politique est de 49,8% ; elle s’élève à 53,4% parmi ceux de niveau secondaire et de 62,1% parmi les burkinabè ayant fréquenté le supérieur. Ainsi, constate-t-on que plus le niveau de fréquentation des burkinabè est élevé plus ils s’intéressent à la chose politique.
Quant aux jeunes, ils sont 42,0% à s’intéresser à la politique alors que parmi ceux qui ne sont pas jeunes, cette part est de 49,8% ; soit un écart de 7,8 points. Comme si les jeunes s’intéressaient moins à la politique par rapport aux autres catégories d’âge.

Sous l’angle de l’appartenance religieuse, c’est parmi les catholiques que l’intérêt pour la politique est exprimé par la majorité des fidèles (51,1%). Au niveau des autres confessions religieuses, cette population est minoritaire. Elle est de 39% chez ceux issus de la religion traditionnelle, 40,2% au niveau des protestants et de 45,6% dans la communauté musulmane. La plus faible proportion de burkinabè intéressés par la politique (20%) est constatée parmi les burkinabè n’appartenant à aucune religion.

3 En sommes, s’intéresse-t-on à ce qui est important ?

En règle générale, ceux qui trouvent une réalité importante y accordent un certain intérêt. Cette tendance est-elle observée pour le cas précis de la politique ? De prime abord, il ressort que la part de ceux qui la trouvent important, tout comme celle de ceux qui s’y intéressent, est plus faible que ceux qui sont d’un avis contraire. Par ailleurs, tous ceux qui reconnaissent son importance sont moins nombreux que ceux qui s’y intéressent, soit 44,7% contre 46,1%. La différence entre ces deux chiffres montre qu’il y a des burkinabè qui s’intéressent à la politique, bien que ne lui accordant pas de l’importance. La tendance inverse ne peut-elle pas aussi être observée ?
La confrontation de l’importance et de l’intérêt pour la politique permet de déterminer quatre catégories d’individus par les burkinabè en âge de voter. Il y a ceux pour qui la politique n’est pas importante et donc ne s’y intéressent pas (40,6%), ceux qui la trouvent importante mais ne s’y intéressent pas (13,3%), ceux qui ne la trouvent pas importante mais s’y intéressent (14,8%) et ceux qui non seulement la trouvent importante mais s’intéressent aussi à la politique (31,3%). Ces derniers ne représentent que le tiers des burkinabè.
• Ceux pour qui la politique n’est pas importante et donc ne s’y intéressent pas
On peut penser que la politique ne représente pas grand-chose pour eux et peuvent avoir le sentiment que son utilité est discutable. Les régions dans lesquelles leur majorité est constatée sont respectivement les Hauts-Bassins (53,7%), le Sud-Ouest (53,6%) et le Nord (53,1%). Dans la région des Cascades, cette population constitue 50% des votants potentiels, soit la moitié. Même si elle n’atteint pas 50%, cette part excède 40% dans les régions du Sahel (42,5%), de la Boucle du Mouhoun (42,0%) et du Centre-Sud (41,1%). Les régions dans lesquelles elle varie entre 30% et 39% sont celles du Centre-Est (38,6%), du Centre-Ouest (37,5%), de l’Est (36,5%) et du Centre (31,0%). Pour les régions du Centre-Nord et du Plateau central, ces parts sont respectivement de 29,2% et 26,8%. Ce sont les régions où les plus faibles proportions sont constatées. Et la part des burkinabè résidant en milieu rural et faisant partir de cette catégorie est plus élevée que celle des résidents du milieu urbain, soit 41,7% en milieu rural et 37,5% en ville. Par ailleurs, environ la moitié des femmes (50,3%) se retrouvent dans cette catégorie alors qu’on en a que 30,4% des hommes. Ce sentiment de double désintérêt est plus exprimé chez les femmes que chez les hommes.
Par ailleurs, c’est parmi les chômeurs qu’on retrouve la plus forte proportion d’individus (55,0%) affirmant la non importance de la politique et leur désintérêt pour elle. Cette perception peut provenir de leur considération selon laquelle les acteurs gouvernementaux éprouvent de véritables difficultés pour favoriser leur insertion professionnelle. Les ménagères constituent la seconde plus forte proportion (52,6%) de burkinabè adoptant une telle attitude. Ensuite, viennent respectivement les cultivateurs et éleveurs (37,4%), les travailleurs du secteur informel (36,8%), les élèves et étudiants (36,1%), les fonctionnaires (31,7%) et les ouvriers parmi lesquels on retrouve la plus faible proportion (20,0%) de personnes pensant ainsi. Le constat est que les travailleurs soumis à un régime de salariat sont ceux qui ont les plus faibles proportions dans cette catégorie.
Selon la fréquentation, il ressort que la part de ceux qui n’ont pas fréquenté et pensant ainsi est de 43,4%. Elle est plus élevée que pour celle des burkinabè ayant fréquenté et considérant que la politique n’est pas importante et ne pas être un objet d’intérêt. Leur part est de 35,5%. De plus, dans la catégorie de ceux qui ont fréquenté, on constate que la part de burkinabè de niveau primaire et celle de ceux de niveau secondaire trouvant la politique non importante et d’aucun intérêt sont presque identiques, soit 36,3% et 36,8%. C’est à ces niveaux de fréquentation qu’une telle attitude est beaucoup partagée. Il n’y a que 20,7% de citoyens de niveaux supérieur qui font partir de cette catégorie.
Par ailleurs, la part des jeunes adoptant une telle attitude est plus élevée que celle de ceux qui ne sont pas jeunes (44,3% parmi les jeunes et 37,1% parmi les non jeunes).
En relation avec la confession religieuse des burkinabè, on constate que c’est parmi ceux qui n’appartienne à aucune religion que la considération selon laquelle la politique n’est ni important et ni d’aucun intérêt est le plus exprimée (60,0%). Ceux de la religion traditionnelle suivent avec une proportion de 45,5%. La part des protestants pensant ainsi vient en troisième position (43,9%) alors qu’elle est de 41,9% parmi les musulmans et 35,1% parmi les catholiques. C’est la plus faible part parmi les trois religions révélées.
• Ceux qui la trouvent importante mais ne s’y intéressent pas
Pour cette catégorie, les plus faibles proportions (moins de 10%) sont constatées dans les régions du Centre-Ouest (6,3%), de la Boucle du Mouhoun (7,1%), du Nord (8,3%), du Sud-Ouest (8,9%) et des Hauts-Bassins (9,6%). Les régions dont les proportions se situent entre 10% et moins de 20% sont celles du Centre-Est (10,2%), des Cascades (10,4%), du Centre-Nord (11,5%), du Sahel (12,5%), et du Plateau central (19,6%). Les plus fortes parts n’excèdent pas 23% et se retrouvent dans les régions du Centre-Sud (21,4%), du Centre (21,7%) et de l’Est. Ici, la part des burkinabè résidant en milieu urbain et faisant partir de cette catégorie est plus élevée que celle des résidents du milieu rural, soit 17,7% en milieu urbain et 11,7% en milieu rural. Dans cette catégorie, la proportion parmi les femmes est plus élevée que celle parmi les hommes, soit respectivement 13,8% et 12,8%.
De plus, les proportions les plus élevées sont constatées parmi les élèves et étudiants (18,1%), les agents du secteur informel (15,9%) et les ménagères (14,1%). Les autres statuts socioprofessionnels (Fonctionnaires, ouvriers, cultivateurs et éleveurs et chômeurs) enregistrent des proportions variant entre 10% et 12%.

Par ailleurs, la part de ceux qui n’ont pas fréquenté et pensant ainsi est de 13,9%. Elle est plus élevée que pour celle des burkinabè ayant fréquenté et considérant que la politique n’est pas importante et ne peut pas être un objet d’intérêt. Leur part est de 12,3%. Parmi ceux qui ont fréquenté, on constate que la part la plus élevées est observée au niveau des burkinabè de niveau supérieur, soit 17,2%. Ceux de niveau primaire suivent avec une proportion de 13,9%. C’est au niveau de ceux du secondaire que ce taux demeure faible (9,8%).
Par ailleurs, même l’écart paraît moins important, la part des jeunes adoptant une telle attitude est plus élevée que celle de ceux qui ne sont pas jeunes (13,7% parmi les jeunes et 13,0% parmi les non jeunes).
On constate que c’est encore parmi ceux qui n’appartiennent à aucune religion que la considération selon laquelle la politique est importante mais d’aucun intérêt est le plus exprimée (20,0%). Ceux d’obédience protestante suivent avec une proportion de 15,9%. La part de ceux issus de la religion traditionnelle pensant ainsi vient en troisième position (15,6%) alors qu’elle est de 13,8% parmi les catholiques et 12,5% parmi les musulmans. C’est la plus faible part entre les trois religions révélées dans cette catégorie.

• ceux qui ne la trouvent pas importante mais s’y intéressent
Ils accordent un intérêt à une chose dont ils nient l’importance. Peut-être parce que la politique affecterait leur vécu social quelle que soit leur opinion sur cette réalité. Les plus faibles proportions de cette catégorie (moins de 10%) sont constatées dans les régions des Hauts-Bassins (8,1%), du Centre-Sud (8,9%) et du Centre (9,8%). Les régions dont les proportions se situent entre 10% et moins de 20% sont celles du Nord (13,5%), des Cascades (14,6%), de la Boucle du Mouhoun (16,1%),), du Sud-Ouest (16,1%), de l’Est (16,7%), du Sahel (17,5%), du Centre-Ouest (18,8%), du Plateau central (19,6%) et du Centre-Nord (19,8%). La plus forte part provient de la région du Centre-Est (20,5%). Et la part des burkinabè résidant en milieu rural et faisant partir de cette catégorie est plus élevée que celle des résidents du milieu urbain, soit 15,8% en milieu rural et 11,9% en ville. Dans cette catégorie, la proportion parmi les femmes est plus élevée que celle parmi les hommes, soit respectivement 15,1% et 14,3%.
Par ailleurs, c’est parmi les fonctionnaires que la proportion la plus élevée (16,7%) est constatée. Les statuts socioprofessionnels qui suivent sont respectivement les cultivateurs et éleveurs (15,9%), les travailleurs du secteur informel (15,4%), les élèves et étudiants (15,3%) et les chômeurs parmi lesquels on a la plus faible proportion (8,5%).
La proportion de ceux qui n’ont pas fréquenté et qui, bien que ne trouvant pas la politique importante, s’intéressent à la politique est plus faible que celle de ceux qui ont fréquenté, soit 14,5% contre 15,1%. Parmi ceux qui ont fréquenté, les burkinabè de niveau primaire constituent la plus faible proportion dans cette catégorie d’individus considérant que la politique n’est pas important bien que s’y intéressant (10,9%). Ici, la plus forte proportion est constatée parmi ceux du niveau secondaire (19,2%). Ceux de niveau supérieur suivent avec une part de 17,2%.
De plus, la part des jeunes adoptant une telle attitude est moins élevée par rapport à celle relative aux non jeunes, soit 14,2% parmi les jeunes et 15,3% parmi les non jeunes.
On constate que c’est parmi les catholiques que la considération selon laquelle la politique est n’est pas importante mais peut faire l’objet d’un intérêt est le plus exprimée (18,2%). Ceux d’obédience protestante suivent avec une proportion de 17,1%. La part de ceux qui sont issus de la religion musulmane et pensant ainsi vient en troisième position (14,2%) alors qu’elle est de 5,2% parmi ceux de la religion traditionnelle. Cette perception n’est pas exprimée parmi ceux n’appartenant à aucune religion.
• Ceux qui non seulement trouvent la politique importante mais aussi en sont s’intéressés
Ici, les plus proportions de la plupart des régions varient entre 21,4% et 30%. Les régions dont elles sont supérieures à 30% sont respectivement celles du Centre-Est (30,7%), du Plateau central (33,9%), de la Boucle du Mouhoun (34,8%), du Centre (37,5%), du Centre-Ouest (37,5%) et du Centre-Nord (39,6%). Dans toutes les régions, cette proportion est minoritaire et est inférieure à 40%. De plus, la part des burkinabè résidant en milieu urbain et faisant partir de cette catégorie est plus élevée que celle des résidents du milieu rural, soit 32,9% en milieu urbain et 30,7% en milieu rural. Par contre, la proportion parmi les hommes est plus élevée que celle parmi les femmes, soit respectivement 42,5% et 20,7% qui constitue moins de la moitié de celle des hommes.
Selon la catégorie socioprofessionnelle, la plus forte proportion est constatée parmi les ouvriers (60,0%). Celle des fonctionnaires suit avec un taux de 40,0%. Les proportions qui suivent respectivement sont celles concernant les cultivateurs et éleveurs (35,4%), les travailleurs du secteur informel (31,9%), les élèves et étudiants (30,6%), les chômeurs (30,0%) et les ménagères parmi lesquelles la plus faible proportion est constatée (19,6%). Comme déjà constaté ci-haut, on remarque que ceux qui sont en général sous le régime du salariat enregistre les plus fortes proportions.
Par ailleurs, c’est parmi ceux qui ont fréquenté que la plus forte proportion est enregistrée, soit 37,1% alors qu’elle est de 28,2% parmi ceux qui n’ont pas fréquenté. On retrouve la plus forte proportion de ceux qui pense ainsi parmi les burkinabè de niveau supérieur (44,8%). Ceux du niveau primaire suivent avec une part 38,8%. La plus faible part est constatée parmi les votants potentiels de niveau secondaire. Il ressort aussi que la part des jeunes adoptant une telle attitude est moins élevée que celle de ceux qui ne sont pas jeunes (27,9% parmi les jeunes et 34,6% parmi les non jeunes).
Par rapport à l’appartenance religieuse, c’est parmi ceux de la religion traditionnelle que la considération selon laquelle la politique est importante et peut faire l’objet d’un intérêt est le plus exprimée (33,8%). Ceux d’obédience catholique suivent avec une proportion de 32,9%. La part de ceux issus de la religion musulmane pensant ainsi vient en troisième position (31,5%) alors qu’elle est de 23,2% parmi les protestants et 20,0% parmi ceux n’appartenant à aucune religion. C’est la plus faible part dans cette catégorie.

Conclusion

En sommes moins de la moitié des votants burkinabè accorde de l’importance et de l’intérêt à la politique. « (…) que nous le voulions ou non, nous sommes tous impliqués dans la chose politique, ne serait-ce parce que c’est au niveau politique que se prennent les grandes directions sociales et économiques qui vont nous permettre, nous citoyens, de mieux vivre. (…)Parce que certains d’entre nous ont fermé trop longtemps les yeux, par fainéantise, ou par médiocrité intellectuelle, sur les affaires politiques, nous héritons d’une société que nous n’avons peut-être pas désirée, mais que nous méritons. Ne pas s’intéresser à la politique revient à laisser les coudées franches aux plus véreux, aux plus vénaux, aux plus hypocrites des politiciens et finalement à se trouver, un jour ou l’autre, dans la une situation intolérable » (Yves Roy :2005 ). Ces propos montrent clairement pourquoi il faut s’intéresser à la politique. Un tel désintérêt contribue à faire du serviteur du peuple (ce que doit être un politicien) un être servi par le peuple. C’est un sacré devoir pour tout citoyen burkinabè d’observer les différentes solutions que proposent nos politiciens afin de les interpeler quand c’est nécessaire pour la bonne marche du pays. En dehors de quelques uns qui ont le sens de la patrie et qui s’engagent pour servir, ils sont nombreux ces politiciens qui font de la politique une activité à but lucrative au détriment de l’intérêt national ou général. Il n’y a que l’attitude d’intéressement pour la politique qui nous permet d’être des citoyens vigilants capable d’orienter les comportements et actions du politicien vers la volonté de satisfaire les besoins des administrés.
Par ailleurs, il semble que les « burkinabè ont maintenant les yeux ouverts » . Même si cela peut être interprété de plusieurs façons, on peut être unanime sur le fait que les circonstances sociopolitiques et économiques ont conduit les burkinabè à porter un regard averti sur tout ce qui se passe au Burkina Faso. Ils ne voudront plus accepter que des acteurs en manque de chemins pour s’enrichir au détriment du peuple se transforment de façon intéressée en des professionnels de la politique.
S’intéresser à la politique c’est aussi faire en sorte que les élus demeurent à la seule place qu’est la leur. Ce sont avant tout des serviteurs du peuple et c’est à l’aune de leur aptitude à servir (et non uniquement se servir) qu’ils doivent être évalués. Un politicien, c’est comme un père de famille qui « mange » après s’être rassuré que toute sa famille a « mangé ». Quand il constate le contraire, il donne le meilleur de lui-même pour atteindre cet objectif. Même si il n’est pas demandé qu’il soit un père, cette caricature peut constituer un des déterminants de son engagement politique. S’intéresser à la politique permet donc de démasquer, interpeler et écarter les arrivistes qui confondent la poche du peuple à la leur et l’utilisent pour entretenir leur égo. C’est donc un devoir citoyen et manquer à ce devoir compromet la bonne marche du pays. Car, comme un rat voleur, dès que le politicien arriviste sent la pression populaire baisser, il ne s’empêche pas d’ériger des lois qui l’enracinent et l’enrichissent de façon légale (Roy Y ; 2005). Pour s’intéresser à la politique il faut, tout d’abord, voter. Ensuite, Il faut aussi exercer une vigilance vis-à-vis de la conduite des affaires publiques par les représentants élus. Elle doit porter sur les éléments primordiaux qui fondent la démocratie : la justice, la liberté, la séparation des pouvoirs. Il s’agit d’être toujours prompt à agir dès que l’une de ces valeurs est mise à mal par une décision politique. C’est un devoir citoyen que de réagir « face à cette décision, de s’exprimer, si possible par une voie autre que celle du vote ». Cette vigilance doit conduire à débattre ensemble des sujets les plus importants pour notre société.
Pour la réflexion : « (…) l’exigence exprimée par les gens de vivre en démocratie crée pour eux une obligation de s’intéresser à la chose publique et donc aux sujets politiques qui leur sont soumis. C’est ainsi, (…), qu’ils deviennent citoyens. (…) Car s’ils remettent l’entièreté de la gestion de l’état dans les mains de leurs élus, sans plus exercer leur droit de regard, (…), la démocratie représentative risque alors de se transformer en oligarchie. (…) Car il n’y a rien de pire en démocratie qu’un homme (ou une assemblée) qui a le pouvoir et à laquelle on donne toute latitude pour agir, sans contrôle. Le dérapage et l’abus de pouvoir se nourrissent de cela. »

Certes divers raisons peuvent expliquer un tel désintérêt des burkinabè pour la chose politique. On pourrait citer :
• la non prise en compte du choix électoral des citoyens du fait des multiples fraudes constatées lors des élections ;
• le caractère fermé du système politique d’alors qui favorisait moins les expressions politiques adverses ;
• le caractère biaisé du jeu électoral avec des partis politiques et des organisations de la société civile qui ne sont qu’une fabrique du parti au pouvoir afin de brouiller les compétitions politiques et enrober ainsi le système politique d’apparats démocratiques.
Toutefois, il n’y a que nos actions qui, aussi petites soient-elles, peuvent faire évoluer les choses dans le sens que nous voulons. Quelques soient la profondeur et l’opacité des obstacles, nous devons toujours agir en faisant briller notre lumière au lieu de chercher à combattre l’obscurité.

NANA Firmin
INSS/CNRST-Burkina Faso
nafirmin@gmail.com

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Vos commentaires

  • Le 18 juin 2015 à 17:01, par eteincelle En réponse à : L’électorat burkinabè et la politique : quel degré d’importance, quel niveau d’intérêt ?

    Merci mon frère. Vous méritez une décoration, la vraie. Ce sont de telles réflexions qui peuvent nous faire avancer,enfin ceux qui veulent bien sûr.Les burkinabè dans leur ensemble ont appris à avoir peur de la politique à cause de l’intrusion des militaires et des extrémistes de gauche( surtout eux)et de droite dans l’arène politique. Les extrémistes de gauches appellent leurs ’’adversaires’’ leurs ennemis ,c’est à dire le même terme utilisé par les militaires en ’’politique’ comme en temps de guerre. Je dis bravo au CNT d’avoir mis un holà aux prétentions des militaires dont le rôle est de se mettre à la disposition du politique et non de faire comme lui. Honte aux imposteurs. Bien sûr certains hommes politiques ne peuvent pas applaudir le CNT. Ils ont toujours rêvé la courte échelle.Utilisez ceux dont le métier est le maniement des armes pour parvenir à leur fin. Le PAI de Soumane TOURE,le PCRV de ..... ont été les maître penseurs de l’extrémisme en politique. Le PAI lui a failli y laisser la tête de son maître penseur le sieur TOURE au poteau n°5 sous la révolution qu’ils ont suscité et biberonné à souhait. Heureusement le peuple est désormais mûr et sera maître de son destin.

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