Un roman qui en rappelle un autre, celui de Nazi Boni « Crépuscule des temps ancien ». Le fervent chantre de la culture Bwamu, 1er romancier de la Haute-Volta a été une source d’inspiration pour le jeune écrivain Toussaint Daman. 53 ans après, le duel Tradition/modernité est toujours aussi vivace. L’issue semble évidente ! L’un renvoie au repli, au confinement tandis que l’autre prône l’ouverture, la liberté. Mais, il serait suicidaire d’opérer un choix catégorique entre ces deux tendances. Des visionnaires tels que Nazi Boni avaient prédit la perte des valeurs africaines avec l’avènement de la civilisation occidentale, d’autres avaient prêché pour un retour aux sources. Mais hériter de certaines mentalités traditionnelles telles que l’exclusion sociale entretenue par le système des castes serait une erreur. Le Noble nait et meurt noble. Idem pour l’esclave dont la descendance est vouée à la servitude. Et c’est ce système de circularité, de non liberté qui révolte Kodan le héros du roman « Mélancolie des temps anciens ». Ne vous m’éprenez-pas car selon Abbé Toussaint Daman « ce ne sont pas les temps anciens qui sont mélancoliques, c’est la manière de s’y rapporter ». Qui de mieux que le Directeur général du livre et de la lecture publique, le Pr Yves Dakouo pour faire une analyse-présentation de l’œuvre ?

Une œuvre de réflexion

« Je ne suis pas un opposant farouche du système des castes mais je souffre parce que certaines situations n’émergent pas », tient à préciser l’auteur. Pour lui, la dignité humaine ne devrait pas se mesurer à la valeur de ce qu’on fait. Et les « indignes », ceux qui sont condamnés à le rester, méritent qu’on les respecte. Quelque chose devra être fait pour s’évader de ce déterminisme social et moral. Pour ce faire, l’écrivain est convaincu que « si la prise de conscience s’opère, l’action suivra ». Mélancolique des temps anciens est un récit où Kodan, roturier et descendant d’esclave, mène une sorte de parcours initiatique : combattre l’injustice et l’inégalité en imposant la vision d’une Afrique nouvelle.

Mais comme disait Albert Einstein, « il est plus facile de désintégrer l’atome que de vaincre les préjugés ». Et le père du personnage-héros De renchérir « Celui qui cherche à changer l’esprit des autres, court le risque de perdre le sien ». L’auteur ne va pas de main morte en abordant la question des valeurs à ne pas hériter du passé telles que l’exclusion et l’inégalité. Et pour le Pr Yves Dakouo, « il traite le sujet comme un chirurgien qui opère sans anesthésie. A froid. Il examine le sujet par là où ça fait mal. Sans langue de bois. Sans artifice thématique. Il expose les faits et met chaque Africain en face de ses responsabilité… » Pour Mireille Sougouri Kaboré, marraine de la dédicace, « Mélancolie des temps anciens n’est pas une œuvre de désespoir mais plutôt une œuvre de chagrin, d’amertume et de nostalgie dans un contexte d’espérance ».

Aperçu biographique

Originaire de la province de la Kossi, Toussaint Hènènè a été ordonné prêtre le 07 juillet 2007. Passionné de philosophie, il est également un homme de culture qui défend les valeurs justes des traditions africaines. Il prépare deux mémoires de Master 2 : l’un en philosophie sur le thème « Sources aristotéliciennes et chrétiennes dans la pensée de Martin Heidegger » et l’autre évidemment en théologie morale sur le thème « Liberté de l’homme et loi de Dieu chez Saint Jean-Paul II ». Son premier roman « la rivière aux mystères ésotériques » édité à Harmattan Burkina en 2013 est également une œuvre culturelle, spirituelle qui plonge le lecteur dans l’intimité postcoloniale des Marka, un groupe ethnique burkinabè.
Les lecteurs pourront étancher leur soif de savoir en se procurant « Mélancolie des temps anciens » à la librairie Jeunesse d’Afrique au prix de 5000 FCFA

Herman Frédéric BASSOLE
Lefaso.net