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Omar NIKIEMA : “Je suis l’un des écrivains le plus lu au Burkina”

Publié le lundi 11 avril 2005 à 07h52min

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Il a pris sur lui, la charge de relever le défi d’une génération dans un domaine réservé jadis aux doyens. Jeune, grand parmi les grands, Omar NIKIEMA, puisque c’est de lui qu’il s’agit veut, à travers sa plume apporter sa contribution aux combats de sa génération.

Par sa plume, il éduque, sensibilise, conseille, la jeunesse et partant tous les Burkinabé sur les dangers de la pandémie du siècle.

De « maladie d’amour » à la « dernière confession » en passant par « un voyage dans le monde » au « verdict des jupons » ce jeune romancier a fini de convaincre. En acceptant de nous accorder cet entretien, il nous ouvre du même coup les portes d’un domaine réservé :celui de la littérature. Il nous parle de sa vie, son travail, les difficultés qu’il rencontre au quotidien, l’avenir de la littérature au Burkina, et bien d’autres sujets.

Qui est Omar NIKIEMA ?

Omar NIKIEMA (O.N) : Omar NIKIEMA est un jeune écrivain burkinabè, qui est arrivé « comme-ça » dans le paysage littéraire national sans expérience, tout simplement parce que le virus de la littérature l’a mordu depuis la classe de terminale. C’est d’ailleurs dans cette classe qu’il a écrit son premier roman intitulé « Maladie d’amour ».

A ce jour, combien de romans sont à mettre à votre actif ?

Omar NIKIEMA (O.N) : Je suis auteur à ce jour de cinq romans publiés. « Maladie d’amour » en 1996, qui a été publié grâce au soutien financier de l’OMS, du PPLS, du CNLS et le concours du ministère de la Santé. Ensuite il y a eu « la dernière confession » sorti en 2000 avec le soutien de l’ambassade des Pays-Bas, de l’UNICEF, de la Coopération danoise, de la GTZ/Burkina, de la GTZ/Mali. Ce roman est d’ailleurs étudié au Mali dans les établissements secondaires. Après « la dernière confession », j’ai publié en 2003 « Un voyage dans le monde » qui a été publié grâce au soutien de l’Assemblée nationale, de l’ONATEL, de la Coopération danoise, de la LONAB et bien d’autres partenaires. « L’enfant qui voulait voir Dieu » est ma quatrième publication. « L’enfant qui voulait voir Dieu » est une bande dessinée sortie à Paris avec EDICEF qui a reçu les financements de la Francophonie, de l’Ambassade de France au Burkina. Mon dernier roman est « le verdict des jupons » qui est sorti en 2004 avec le soutien financier de l’ONATEL, de la mairie de Ouagadougou, du CNRST, de l’Assemblée nationale et bien d’autres partenaires.

Quels sont les thèmes qui sont abordés dans vos différents romans ?

O.N : Disons que depuis 1995, j’ai souscrit dans l’écriture de sensibilisation parce que, je me dis que, ainsi, j’apporte ma partition dans la lutte contre certains fléaux qui minent notre société. Et donc, dans les trois premiers romans, les thèmes abordés étaient le Sida et surtout, je dénonce les conduites souvent néfastes qui peuvent engendrer des conséquences dramatiques. Je m’adresse particulièrement à la couche juvénile pour les amener à des changements de comportement. Dans « Le verdict des jupons » mon dernier, le thème abordé est celui de la prostitution. Juste pour apporter ma contribution à la lutte contre la prostitution qui est aussi un fléau et pas des moindres. « L’enfant qui voulait voir Dieu » est une bande dessinée qui est parue suite à un constat du ministère de la Culture que le Burkina n’avait pas de bande dessinée dans les rayons en Europe et c’est ainsi qu’à l’issue d’un atelier d’écriture à Ouagadougou, cinq écrivains ont été regroupés, qui ont présenté des bandes dessinées, et c’est la mienne qui a été retenue et publiée. C’est une bande dessinée pour enfants.

Vos romans s’intéressent à la jeunesse, quelle est votre appréciation par rapport à ce lectorat juvénile ?

O.N : C’est vrai que le paysage littéraire burkinabè est très difficile. Pour ce faire une place c’est un véritable parcours de combattant. Mais aujourd’hui je peux dire sans trop me jeter des fleurs que je suis l’un des écrivains le plus lu au Burkina. Avec mon premier roman, j’ai pu conquérir la confiance de mes lecteurs, un peu avec mon style très simple et surtout avec les sujets qui y sont abordés. Mon lectorat est composé à 90% de jeunes et aujourd’hui je suis satisfait parce que j’atteins mon objectif à chaque fois que j’ai une sortie littéraire.

Jeune mais grand parmi les grands, quels sont vos rapports avec les doyens du domaine ?

O.N : Nous entretenons de très bons rapports quoiqu’on dise, mais il faut le souligner, aujourd’hui, les doyens de la littérature burkinabè ne pensent pas à la relève. Si je parle ainsi, moi je suis à mon cinquième roman et le mois prochain, le sixième va voir le jour, je suis répertorié à la Bibliothèque nationale, mais mon souci, c’est surtout cette jeunesse qui veut embrasser ce secteur et qui a de véritables difficultés. Je pense honnêtement que quelque chose doit être fait par les doyens pour lui venir en aide parce que les jeunes n’ont aucun soutien. Aujourd’hui les doyens ne pensent pas à la relève, ce qui est regrettable. Dans les mois à venir, nous comptons mettre en place une structure à même de donner un coup de main aux jeunes qui ont des manuscrits et nous pensons par là, arriver petit à petit à trouver des solutions.

Avec ces difficultés pensez-vous que la littérature a un avenir devant elle au Faso ?

O.N : Sans verser dans le pessimisme et au jusqu’au boutisme, je dirai que si rien n’est fait, l’avenir de la littérature au Burkina risque d’être incertain.
Pourquoi je dis cela ? Aujourd’hui quand on parle de la Direction du livre au Burkina, elle est pratiquement inexistante. Parler de la Direction du livre sans que jusqu’à présent qu’il n’y ait aucun journal littéraire, aucune émission télé ni radiophonique pour parler de la littérature et faire la promotion des œuvres littéraires, c’est dommage. C’est comme si cette Direction du livre n’existe que pour promouvoir la foire du livre au Burkina, une activité qui se passe une fois l’an. La Direction du livre devra donc revoir la copie sinon, elle existe pour rien. J’estime que c’est de la responsabilité de cette Direction de travailler à une réelle promotion de la littérature dans notre pays. Mieux, il lui appartient de soutenir ces jeunes qui ont de très bons manuscrits et qui ne savent pas à quel saint se vouer pour voir leur « bébé » naître. Tant que la Direction ne va pas jouer le rôle qui lui incombe vraiment, la littérature au Burkina sera sans avenir.
Si l’on ajoute à cela, le fait que les Burkinabè ne lisent pas beaucoup sinon pratiquement pas, les écrivains ont de quoi avoir froid au dos pour leur avenir et celui de la littérature. Nous sommes arrivés à un point aujourd’hui où il nous faut réfléchir de concert avec les premiers responsables du pays en y associant les écrivains pour trouver ensemble des solutions pour la littérature dans notre pays.

A vous écouter, la littérature au Burkina Faso rencontre pas mal de difficultés. Mais quelles sont les difficultés que Omar NIKIEMA a dû surmonter en plus de celles qui existent déjà ?

O.N : Voyez-vous, pour écrire un roman, il vous faut des inspirations. Et l’inspiration ne craint pas le sommeil, l’inspiration ne craint pas la fatigue, encore moins la maladie. Parce que même quand vous êtes malade et que vous êtes inspiré, vous écrivez. Alors quand vous rassemblez tous ces faits-là, vous écrivez. Il vous faut chercher les financements, ce qui est une véritable courbette parce qu’il faut bousculer les partenaires, les motiver sur la nécessité de faire paraître votre œuvre.

Au bout du compte, vous obtenez les financements et vous serrez la ceinture pour travailler avec l’éditeur pour que l’œuvre sorte dans les normes et respecte les qualités. Après la sortie de l’œuvre, il y a le problème de la distribution qui est un véritable problème dans notre pays. Malgré les moyens colossaux que vous mettez pour faire sortir votre œuvre il est illusoire de penser pouvoir la distribuer au prix unitaire de 5000F CFA et rentrer dans son investissement. Il nous arrive même malgré ces difficultés, de donner des œuvres à des amis, des parents, à des autorités comme cadeaux pour leur montrer notre travail.

Mais en retour, je vous assure qu’il n’y en a même pas qui daigne vous appeler ne serait-ce qu’une minute au téléphone pour vous encourager. En plus donc de ces difficultés financières, matérielles, etc. celles morales, si nous pouvons les appeler ainsi, constituent d’autres poignards et pas des moindres. Vous savez, les encouragements par-ci, par-là sont des soutiens inestimables qui comptent beaucoup pour les écrivains.

On a senti M. Omar NIKIEMA à un moment donné dans le cinéma. Est-ce juste un essai ou avez-vous d’autres ambitions à ce niveau aussi ?

O.N : Dans le cinéma, je crois que ça été un mauvais départ. J’avais mon scénario, j’ai rencontré une autorité à qui j’ai parlé du projet et de mon ambition de réaliser le film. L’Autorité a donné son aval pour nous soutenir dans ce projet qui devait coûter 35 millions et nous proposait de faire un plan de financement dans lequel nous associons d’autres partenaires qui se sentiront concernés par le projet.

Nous sommes partis donc sur cette base et nous sommes allés à Koudougou pour lancer le tournage, et c’est une fois sur place là-bas que nous nous sommes rendus compte que toutes les démarches que nous avions menées allaient rester vaines, les engagements n’ont pas été respectés. Au finish, rien n’a été fait. C’est donc une expérience qui n’a pas porté fruit, mais nous espérons qu’à l’avenir les gens respecteront jusqu’au bout leurs engagements.

Quelles sont les ambitions futures de Omar NIKIEMA ?

O.N : Comme ambitions, dans les mois à venir, nous comptons créer, un éditoriat dans le but de travailler avec des écrivains pour que, de façon mensuelle, trimestrielle ou semestrielle, nous ayions à publier des écrits. Si vous prenez par exemple le roman « Arlequin », c’est vrai que c’est une série sentimentale mais c’est une œuvre qui est publiée mensuellement et en plusieurs numéros. Au Burkina, les compétences existent, nous pouvons le faire et nous pensons que nous allons nous réunir pour voir ensemble et travailler dans ce domaine en recueillant des manuscrits que nous allons essayer de publier.

Que dites-vous aux jeunes qui veulent s’essayer dans la littérature ?

O.N : Aux jeunes qui veulent s’essayer dans la littérature, je leur dirai dans un premier temps d’accepter le sacrifice. Parce que c’est un domaine très difficile. Quand on commence dans cette activité, il faut avoir du courage, de la persévérance, ne jamais baisser les bras. Parce que, ce que l’on fait, ce n’est plus pour soi-même, mais l’on se dit que le travail qu’on abat est d’un intérêt national. On a envie d’éduquer, on a envie de sensibiliser, on a envie d’informer.

Et quand on part avec une telle idée en tête, quels que soient les obstacles que l’on va rencontrer, on arrive toujours à les surmonter. Aujourd’hui nous tenons personnellement à dire merci à des autorités notamment au président de l’Assemblée nationale, au Premier ministre, au ministre de la Culture qui nous ont à chaque fois apporté soutien et réconfort dans notre travail. Je voudrais aussi profiter de l’occasion pour demander aux organismes et aux institutions qui ont des lignes budgétaires pour les activités culturelles de soutenir les écrivains, d’accorder une attention particulière à tous ceux qui tapent à leurs portes avec des manuscrits.

Des attentes particulières ?

O.N : Aujourd’hui je suis fier pour mon pays parce que nous avons des compétences dans le domaine de l’écriture, nous avons des écrivains qui méritent d’êtres soutenus, d’être encouragés. Quand je vais au Mali, les honneurs que je reçois, c’est très fort et je me dis que c’est mon pays qui à travers ma modeste personne est honoré. Tout ce que nous faisons aujourd’hui, c’est pour l’intérêt national, c’est pour lutter contre des fléaux qui ravagent notre pays, nous nous investissons pour notre patrie et nous nous battrons pour que ce pays soit respecté, soit honoré.

Interview réalisée par Frédéric ILBOUDO
L’Opinion

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Vos commentaires

  • Le 3 août 2005 à 16:18 En réponse à : > Omar NIKIEMA : “Je suis l’un des écrivains le plus lu au Burkina”

    Cher Monsieur et ami du Burkina,
    Félicitations ! je découvre à l’instant votre entrevue. Il faut en effet beaucoup de persévérance, mais soutenue par l’enthousiasme, pour "se faire une place", comme on dit chez nous. Mais se faire une place dans le but de servir d’aiguillon aux autres, de les aider à se forger un jugement à travers ce que l’on écrit, c’est encore plus louable. Je ne vous connaissais pas il y a quelques minutes, je suis professeur documentaliste et m’intéresse beaucoup à l’Afrique noire et je tente de faire porter à nos jeunes un regard différent sur ce continent. Je vais conseiller la lecture du site et de votre article. J’ai moi-même écrit et auto-édité des plaquettes sur certains aspects de l’Afrique (ses symboles, drapeaux, etc entre autres). Je m’intéresse aussi à quelques langues que je tente d’apprendre en autodidacte (dont le mooré), mais seul ce n’est pas facile, et si quelqu’un de "sérieux" (c’est-à-dire voulant simplement échanger culturellement dans le but d’échanger des impressions sur des cultures différentes) pouvait me servir à améliorer un peu mes connaissances, ce serait avec grand plaisir.
    Avec ma meilleure considération.
    Patrice de La Condamine

  • Le 27 décembre 2022 à 21:24, par Hien M.G ALINE En réponse à : Omar NIKIEMA : “Je suis l’un des écrivains le plus lu au Burkina”

    J’ESPÈRE que vous allez me l’envoyer svp avant la rentrée scolaire 2023

    Merci à vous

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