LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Nous sommes lents à croire ce qui fait mаl à сrοirе. ” Ovide

Déclarations de la liste des biens des membres du gouvernement de la Transition : le retour de l’intégrité au Faso ?

Publié le samedi 25 avril 2015 à 12h36min

PARTAGER :                          
Déclarations de la liste des biens des membres du gouvernement de la Transition : le retour de l’intégrité au Faso ?

Il y a de cela quelques jours, les membres du gouvernement de la transition, à la suite du Professeur Luc Marius Ibriga, ont déclaré publiquement leurs biens. Cette initiative s’affiche dans le sens de la transparence et de la révolution d’octobre 2014. L’esprit est très noble et est à féliciter car c’est un pas en avant vers la bonne gouvernance. S’inscrit-elle dans le sens de l’intégrité et un renouement avec les idées si chères au père de la révolution burkinabè Thomas Sankara ?

« La patrie ou la mort, nous vaincrons », tel était l’un des refrains de la jeunesse burkinabè et des politiciens lors de l’insurrection populaire des 30-31 octobre 2014. Devons-nous nous arrêter au sens premier des mots ou aller au-delà ? Comme le dit l’adage, « la parole est moins chère et les actions parlent plus haut que les mots. »

Le gouvernement de transition, émanation du peuple a eu pour principal défi d’assurer la continuité de l’Etat en empêchant les institutions de s’effondrer et d’ouvrir le chemin à un pouvoir élu. Les récentes déclarations de biens des membres de ce gouvernement sont-elles un signal vers d’autres lois en cours pour l’examen des candidatures des potentiels candidats à la magistrature suprême et à l’hémicycle ou est-ce juste un pas vers l’application stricte de la nouvelle loi anti-corruption au cours des élections prochaines ? Et cela face à l’esprit grandissant de la population qui appelle à une opération « mains propres » ?

Certains pourraient penser que l’exemple de déclaration des biens des membres du gouvernement de transition doit être étendu aux prétendants au fauteuil doré de Kosyam et élargi de façon plus détaillée y compris la déclaration des biens aux membres de la famille proche des différents candidats.

Si j’étais candidat dans le contexte actuel de transparence, j’aurais…

Une révolution appelle à un changement radical d’un système qui ne répondait pas aux aspirations des révolutionnaires. Dans le contexte actuel, si j’étais candidat, et pour courtiser la voix des électeurs, je bondirai sur l’opportunité pour me détacher du passé prérévolutionnaire. Je parlerais de ma carrière politique et/ou sociale. Je démontrerais au peuple Burkinabè que ma lutte a toujours été dans le sens de l’intégrité et que je me suis toujours placé du côté des plus faibles. Je mettrais à la disposition du jugement populaire la liste de mes biens ces cinq dernières années y compris les dons majeurs reçus et transferts et je soumettrai ce même test à mon conjoint (e) et à mes enfants car les fortunes peuvent parfois être dissimulées et éparpillées au sein de la famille immédiate. Dans ce sens, je pourrais sainement montrer au peuple burkinabè que si j’ai occupé des postes d’Etat dans le passé, c’était pour me mettre au service du peuple avec le peuple et pour le peuple sans chercher à m’enrichir de manière illicite et pour être un exemple pour le burkinabè moyen ; j’inviterais mes concurrents à en faire autant.

Je me refuse à croire aux accusations contre nos politiciens sur leur gestion des deniers publics, car un patriote ne se laisserait pas tenté par les biens que lui confie son peuple, surtout dans un pays aux ressources très limitées comme le Burkina Faso. Néanmoins, étant un ambassadeur de la transparence, j’ai toujours nourri l’opportunité d’être éclairé, surtout dans ce contexte post-insurrection où nos gouvernants sont soumis à un observatoire public.

Pas de procès contre la richesse, ni contre les riches ?

Quand j’étais plus jeune, le plus riche Burkinabè à l’époque était Feu Oumarou Kanazoé (paix à son âme). A cette époque, la rumeur qui courait était que M. Kanazoé a débuté ses activités par la vente de colas et par son dur labeur et grâce aux opportunités de son temps, il a pu fructifier sa fortune et même après lui, l’empire qu’il a créé continue d’employer des centaines et peut-être des milliers de Burkinabè et contribue à l’économie du pays. Si Oumarou Kanazoé a pu le faire, chaque Burkinabè a le droit de rêver à la fortune avec bien sûr son dur labeur et son dynamisme et ce qui doit l’accompagner sont les règles égales de libre marché et de compétition établies pour tous et respectées par tous comme le recommanderaient certains économistes contemporains.
De plus, dans l’administration publique ou dans le secteur privé, il y a surement des fonctionnaires qui par des activités secondaires essayent d’aspirer à une situation plus confortable. Il n’y a donc pas de problème à être riche même dans un pays sous développé comme le nôtre.

A quoi devrait ressembler le visage du gouvernant post insurrection ?

Nous respectons et honorons tous ceux qui se lancent en politique car la cause « explicite » est noble : trouver des solutions adéquates aux problèmes que vivent nos sociétés. Dans mon enfance, une phrase dans un documentaire sur la santé au Burkina Faso avait capté mon attention : 1 million de franc CFA peut sauver une vie burkinabè. Je souhaiterais retourner la question aux politiciens et leur demander combien de vies ont-ils sauvé par leurs actions de gouvernance et de lutte contre la corruption dans leur quotidien ? Le gouvernant post insurrection a le devoir de communication et d’action coordonnée avec le peuple burkinabè dans sa gestion du patrimoine de l’Etat.

Que doivent comprendre le peuple burkinabè et les politiciens par « La patrie ou la mort, nous vaincrons »

L’héritage le plus précieux que le président Thomas Sankara a laissé au peuple Burkinabè est son exemple d’intégrité ; héritage qui devrait être source d’une prospérité durable. Nous évoquons tout le temps Thomas Sankara et ses célèbres citations, mais incarnons nous toujours ces valeurs d’intégrité dans nos vies quotidiennes ?

La révolution d’octobre 2014 doit bien se terminer sinon le Burkina Faso risque de passer dans une série de révolutions sans vraiment aborder le vrai problème de l’intégrité. Le risque alors est le transfert de nos maux aux générations futures. L’exercice actuel du peuple burkinabè consiste à faire émerger le Burkinabè intègre en accord avec la vision du peuple sur la gestion des deniers publics et ses actions passées. Il sera porté en apothéose par le peuple au trône de Kosyam.

Et tous ensemble, soit nous renouons avec l’intégrité et la dignité ; à défaut, il faudra sûrement rebaptiser le Burkina Faso.

Dakissé Tiendrebéogo, CPA
Citoyen Burkinabè

PARTAGER :                              

Vos commentaires

 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique
Burkina Faso : Justice militaire et droits de l’homme
Burkina Faso : La politique sans les mots de la politique
Le Dioula : Langue et ethnie ?