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Présidentielle togolaise : Entre le "Vieux" et le "Jeune"

Publié le lundi 21 mars 2005 à 06h32min

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Si la date est maintenue, les Togolais devraient se rendre aux urnes le 24 avril prochain pour élire leur président de la République après la mort, le 5 février dernier du général Gnassingbé Eyadema.

Cette élection aura été le résultat de négociations difficiles entre la communauté internationale et les nouveaux dirigeants togolais qui s’étaient emparé du fauteuil présidentiel contre les textes constitutionnels en vigueur dans le pays.

Aujourd’hui, à voir les Togolais s’agiter, il s’agit désormais pour eux de parer au plus pressé, au plus important : avoir un homme à la tête de l’Etat. Il n’est pas facile de remplacer Eyadema. Après quarante ans à la tête de ce minuscule pays de 56 000 km2, l’ancien président togolais avait fini par tout identifier à sa personne : l’armée, l’administration publique pour ne citer que celles-ci relevaient toutes de lui. Il était si "omniprésent", si "puissant" que peu de Togolais pensaient à une disparition aussi brutale de leur chef. On l’appelait affectueusement le "Vieux" (entendez le sage, donc celui qui doit diriger) comme le disaient naguère les Ivoiriens du président Houphouët.

Il est "étonnant" dès lors d’entendre, à quelques jours de la présidentielle les partisans de ce "Vieux sage" qu’a été le général Eyadema utiliser l’argument de l’âge quand Bob Akitani (74 ans) a été choisi par six partis de l’opposition pour la course à la magistrature suprême. Si le destin n’avait pas décidé autrement, il n’est pas certain qu’Eyadema aurait quitté le pouvoir même à quatre vingts (80) ans. Les propos de ses partisans ne sont qu’hypocrisie.

Voilà ainsi posé le problème de l’âge des candidats aux compétitions électives, surtout à la plus élevée comme l’élection présidentielle. Au Bénin, la constitution écarte tous ceux qui ont soixante dix (70) ans et au-delà de l’élection présidentielle. Parce que cette haute charge exige beaucoup d’efforts physiques et intellectuels qu’on ne peut soutenir à un certain âge. Parce que la gestion d’un Etat moderne dans un environnement intérieur et extérieur aux contours parfois difficiles à cerner est contraignante et demande à celui qui en est le responsable beaucoup de disponibilité et de discernement. Selon certaines informations, l’ancien président américain, Ronald Reagan, arrivé à la Maison Blanche à plus de soixante dix (70) ans, avait ce "malin plaisir" à ne parler que de la bombe atomique et des moyens de détruire les "ennemis" des Etats-Unis. Vraie ou fausse, on ne peut mettre cette "manie" de Reagan sur le seul compte de l’âge. Des responsables politiques plus jeunes ont été auteurs de pires atrocités.

La République populaire de Chine comme à une certaine époque l’URSS ont été dirigées par une gérontocratie avec ce que tout cela avait de positif et de négatif. Tout comme des Etats ont été gérés avec plus ou moins de bonheur par de jeunes responsables : la plupart des dirigeants du Conseil national de la Révolution (CNR) au Burkina Faso n’avaient pas plus de trente-cinq (35) ans. Le président Kadhafi au pouvoir depuis plus de trente (30) ans n’avait que vingt-sept (27) ans quand il s’est emparé, à la faveur d’un coup d’Etat militaire, des rênes de l’Etat. Ceux qui ont visité ce pays ces dernières années vous diront que la différence entre la Libye de Kadhafi et celle du roi Idriss est celle qu’il y a entre le jour et la nuit.

On peut multiplier à souhait les exemples et même remonter dans l’histoire pour démontrer que l’âge des premiers responsables politiques n’est pas toujours un critère d’efficacité.

Si dans le camp de la majorité présidentielle togolaise on évoque la question de l’âge du principal adversaire qu’est Bob Akitani, c’est de plus en plus par manque d’assurance face à une opposition qui semble croire en ses chances de battre le jeune candidat du pouvoir Faure Eyadema (39) ans, par ailleurs fils du défunt président.

Le plus urgent pour les Togolais, notamment pour la classe politique, c’est de tourner le dos à certaines pratiques d’antan, telle la personnalisation du pouvoir et de construire un Etat moderne. Le plus urgent aussi, c’est la réconciliation nationale après tant de blessures et de déchirures sociales. Plutôt que de parler de l’âge des candidats pour distraire, il faut éviter l’accaparement de l’appareil de l’Etat par un clan et la tendance à se pérenniser au pouvoir.

Par Bessia BABOUE
Sidwaya

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