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Missions d’explication sur le vote des burkinabè de l’étranger : Auguste Barry et sa délégation accueillis par des acteurs de la société civile

Publié le vendredi 13 mars 2015 à 23h18min

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Missions d’explication sur le vote des burkinabè de l’étranger : Auguste Barry et sa délégation accueillis par des acteurs de la société civile

Lundi 9 mars 2015 au Consulat du Burkina Faso à Abidjan. Dans le cadre de la tournée entreprise depuis le 27 février par le Ministre de l’Administration territoriale, de la décentralisation et de la sécurité, Auguste Barry et sa suite doivent rencontrer les burkinabè vivant en Côte d’Ivoire. Le mauvais sang de certains participants l’a voulue autrement.

Cette rencontre qui devait permettre à la délégation de revenir sur les raisons qui ont conduit le gouvernement du Burkina Faso à ne pas autoriser le vote de ses compatriotes vivant hors du pays pour les scrutins d’octobre 2015 tourne pratiquement au pugilat. Des chaises et des tentes renversées, des compatriotes plutôt favorables rudoyés, une délégation obligée d’interrompre la séance d’explication pour être exfiltrée par les forces de sécurité ivoiriennes, … le spectacle a indigné plus d’un dans la capitale burkinabè. En fin de mission et de retour au pays ce jeudi 12 mars, la délégation a été reçue par une foule venue témoigner sa solidarité d’avec l’action gouvernementale.

Quand nous arrivions à l’aéroport international de Ouagadougou à 12h, heure annoncée du rassemblement, le dispositif était toujours en formation. Côté dispositif plus ou moins mobile, il y avait ces six cavaliers sur leurs imposants chevaux dans d’incessants va et vient, ou encore ce crieur public qui faisait la ronde dans une voiture d’un certain âge. Côté ressources humaines c’est par vagues que les délégations arrivaient. Toutes composées d’acteurs de la société civile pour la plupart. Certains en tenue de ville, d’autre en tee shirts « corporatistes », où nous lisons le « Mouvement Plus Rien ne Sera Comme Avant » sur certains d’entre eux.

Un autre tee shirt dont la blancheur attire à distance, et comme directement sorti d’usine portait cette mention côté plexus : « Nous n’avons qu’une seule patrie, nous la protègerons vaille que vaille ! ». Sans plus. La distribution de ce précieux bijou s’est poursuivie d’ailleurs un bout de temps sur place. Parfois par petits groupes.

Dans le sous groupe des gros bras- reconnaissables à leur forme hors de la norme-, un jeune homme aux biceps impressionnants demande en langue nationale dioula « Qui des nôtres n’a pas eu », (allusion au tee shirt). Personne ici, sauf certains retardataires qui seront approvisionnés sur place. Un peu plus loin c’est un monsieur qui réclame sa part de tee shirts, pour « mes hommes de l’arrondissement 6 », ajoute- t- il. L’on procède à un réajustement des tenues, dans un défilé de policiers, certains en tenue de combat, d’autres en tenue de cérémonie, certains armes en mains, d’autres sans armes.

La guerre des slogans

Comme au bon vieux temps de la lutte contre la modification de la constitution, les pancartes et autres banderoles étaient aussi de la partie. Le M21, né dans ce contexte un certain 21 avril 2013 arrive avec sa banderole sur laquelle il est écrit, « Pour l’extradition de Blaise Compaoré et de son frère François Compaoré, le M21 soutient la transition ». Une autre pancarte du « Mouvement des blessés de l’insurrection populaire », ou encore cet autre qu’un monsieur nous plaque à la face et sur laquelle on pouvait lire « Si vous pouvez venir pour étalons, vous pouvez venir voter », la foule grossissait au fil du temps, la tension aussi.

C’est tout irrité qu’un manifestant a lâché en langue nationale mooré : « On a vu des burkinabè vivant en Italie construire des centres de santé et offrir des ambulances. Vous burkinabè vivant en Côte d’ivoire qu’avez-vous fait pour le développement de votre pays ? Que celui qui y a contribué lève le petit doigt. Excepté Pat ».

L’arrivée de la délégation est annoncée pour 14h, en attendant, c’est Idrissa Nogo, le coordonnateur national du « Mouvement Plus Rien ne Sera Comme Avant » qui galvanise la foule. A fort renfort de slogans. Tels : « On a abandonné, on n’a pas oublié », « Blaise Compaoré, jugement », « Les militaires candidats, on ne veut pas », ou encore « RSP, dissolution ». Quand celui- ci veut bien suspendre pour répondre à certaines questions des journalistes, il est très ferme. « Nous sommes venus pour dire que si quelqu’un commet l’erreur de toucher à la transition, il nous trouvera sur son chemin. La transition est un train qui doit arriver à bon port à la date indiquée, et nous allons nous donner tous les moyens d’y parvenir » lance t- il.

Tout aussi ferme est le discours d’Hervé Ouattara du Collectif anti- référendum (CAR) quand il arrive dans l’entre temps, « Il est temps aujourd’hui que le gouvernement s’assume, qu’il interpelle tous ceux qui continuent de narguer le peuple burkinabè d’arrêter, et je crois que cela doit commencer par des arrestations claires et simples de tous ceux qui ont saigné ce peuple- là, et aussi de l’arrestation du président Compaoré (l’ex président Blaise Compaoré, ndlr) et de tous ceux qui l’ont suivi à l’étranger ; et le rapatriement des fonds qui appartiennent au Burkina Faso et au peuple burkinabè » suggère t- il.

L’Hymne national en chœur, des slogans hostiles au « régime déchu » comme ils l’appellent, l’élan est entretenu jusqu’à 13h56 quand atterrit un avion « Air Côte d’Ivoire ». L’avion se stabilise et le premier ministre Yacouba Isaac Zida que nous n’avons pas vu arriver attend la délégation. Il reçoit et sert la chaleureuse poignée de mains aux principaux membres de la délégation que sont le Ministre Auguste Barry de l’Administration territoriale, de la décentralisation et de la sécurité, Me Barthelemy Kéré le président de la commission électorale nationale indépendante, le Secrétaire général du ministère des affaires étrangères et de la coopération régionale et le secrétaire permanent du conseil supérieur des burkinabè de l’étranger. Ensemble, ils s’enferment dans un salon, loin des projecteurs et en ressortent une dizaine de minutes plus tard.

« La position du gouvernement est irréversible et non négociable »
Ce n’est pas courant, un premier ministre qui vient accueillir son ministre de retour de mission. Pour Yacouba Isaac Zida, « Nous sommes venus dire que chaque burkinabè, où qu’il soit et qui qu’il soit, doit avoir une attitude qui élève le burkinabè et non pas qui ternit notre image aux yeux de la communauté internationale ». Respect entre burkinabè, respect de l’autorité, le mot respect reviendra plus d’une fois dans les propos que le ministre Barry a tenus au cours de la conférence de presse organisée pour la circonstance.

De cette mission qui a débuté le 27 février pour marquer une halte au Ghana, au Mali, en Côte d’Ivoire et au Gabon, il aura été indigné par le comportement de ses compatriotes vivant en Côte d’ivoire. Les autres compatriotes n’auraient pas trouvé d’inconvénient à ce que le vote se déroule pour une fois sans eux, sauf certains de la Côte d’Ivoire. Ceux- ci lui auraient manqué de respect, l’auraient injurié et empêché la tenue de sa rencontre de sensibilisation. C’est très amer qu’il a lâché, « Lorsqu’un enfant ne reconnaît pas ses parents, on est en droit de se demander s’il mérite de porter le nom de cette famille. Lorsque des gens qui prétendent être des burkinabè refusent qu’une délégation envoyée par les plus hautes autorités du pays dont ils réclament l’identité, alors on peut se demander véritablement si ces gens- là sont dignes d’être burkinabè ».

Et son discours très ferme sur la décision –par ailleurs expliquée par des difficultés diverses- du gouvernement de ne pas autoriser le vote des burkinabè de l’étranger pour cette année 2015, « Après avoir procédé à une évaluation objective de la situation, et après avoir entrepris une explication auprès de nos compatriotes de l’étranger, si nous sommes compris, c’est tant mieux, si nous ne sommes pas compris, et sur la base des déclarations du genre que nous avons entendues, nous disons que la position du gouvernement est irréversible et non négociable ».

Sorti de la salle de l’aéroport le point levé, il a été accueilli par une foule sui scandait « Barry ! Barry ! ». Une foule qui l’a suivi jusqu’à sa voiture, une foule qui l’a accompagné sur une bonne distance hors de l’enceinte de l’aéroport.

Samuel Somda
Lefaso.net

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