Lettre ouverte à SEM le Premier Ministre : Faut-il donner de l’eau aux écoliers ou leur réserver de petits cercueils ?
Excellence,
Je m’excuse très profondément de vous « emmerder » avec cette lettre qui, dans une administration normale, ne devrait pas vous être adressée. Mais comme dans l’Administration publique, même pour aller aux toilettes, il faut demander la permission au Patron, je me vois dans l’obligation de vous interpeller, intuitu personae.
Depuis plusieurs mois, le Ministère de la Santé appelle à plus de précautions pour éviter le virus Ebola. Que Dieu continue de protéger les fils et filles du Burkina Faso, en nous éloignant cette maladie. Malheureusement, il peut sembler que cet appel n’est pas un souci partagé. Sauf ignorance, je n’ai pas connaissance de mesures spécifiques ciblant les petits enfants que sont nos écoliers.
Par exemple, la haute hiérarchie de l’Eglise catholique a pris position énergiquement afin de prémunir le peuple de Dieu : on ne se serre plus les mains à l’église et l’on ne s’attrape plus les mains pour prier, en autres.
Mes neuf et demi propositions
Prenant exemple et en droite ligne des efforts du Ministère de la Santé, je voudrais vous suggérer d’instruire les Ministres concernés de pendre les mesures suivantes pour la préservation de nos écoliers.
1) Encourager tout responsable d’établissement d’enseignement à parler aux élèves une fois par semaine du virus Ebola et de ses conséquences. (La répétition est pédagogique).
2) Instruire tout responsable d’établissement d’enseignement à encourager chaque élève à se laver les mains, au moins après chaque récréation, avant de rentrer en classe. Considérons comme acquis que chaque élève se lave les mains avant chaque repas.
3) Instruire tout responsable d’établissement d’enseignement de demander aux élèves d’éviter de toujours se partager le morceau de pain à la sauce qu’ils achètent chez la vendeuse dans la cour de l’école. Nos enfants, très généreux et solidaires, se partagent tout ce qu’ils achètent au PM (petit marché), et certains après y avoir mordu.
4) Instruire tout responsable d’établissement d’enseignement d’inviter les élèves à se serrer moins les mains, de moins s’agripper en jouant. Mais comme le propre de l’enfance c’est le jeu, la camaraderie et qu’ils continueront de marcher main dans la main, les responsables d’établissement d’enseignement devront insister sur le bon réflexe de la propreté, c’est-à-dire se laver fréquemment les mains.
5) Encourager les chefs d’établissement à maintenir leur environnement propre en faisant balayer la cour de l’école et son environnement chaque matin et en installant plus de poubelles dans la cour de l’école.
6) Encourager les chefs d’établissement à exiger des femmes, qui vendent des friandises au petit marché, plus de propreté.
7) Inviter les chefs d’établissement à encourager chaque élève à venir à l’école avec son bidon plein d’eau qu’il pourra remplir à nouveau, en cas de besoin, au robinet.
8) Instruire les chefs d’établissement de supprimer les jarres d’eau à usage commun.
9) Inviter les chefs d’établissement à encourager les élèves à ne plus boire dans le même récipient (gobelet ou bidon). Chaque élève doit avoir impérativement son propre bidon.
½. Inviter…, non, j’arrête sinon vous risquez de croire que je me prends pour Moïse pour vous dicter la table de la Loi.
L’ONEA et les Communes, préférer d’abord les enfants !
Excellence, certains élèves viennent à l’école avec la solution alcoolisée pour se nettoyer les mains. C’est vraiment formidable. Malheureusement tous les élèves ne peuvent pas avoir cette solution. Pis, le récipient qui contient ce liquide n’est pas pratique pour le ranger dans un sac d’écolier ni pratique pour la poche d’une jupe ou d’un pantalon.
Je vous suggère donc, d’instruire, spécifiquement, Monsieur le Ministre chargé de l’Industrie d’encourager toutes les industries nationales et / ou toute productrice de savon de produire de petites boules de savon qui ne coûteront pas plus de 25F la boule. Ainsi chaque élève pourrait acheter une boulette avec laquelle il se lavera fréquemment les mains. Une boulette de savon sec est plus facile à ranger dans un sac d’écolier ou dans une poche. Encore une fois, comme ce sont des enfants, il faut éviter les savons liquides car en cas d’ouverture non voulu du capuchon, leurs cahiers et livres peut être salis.
Comme vous le savez, Excellence, dans le cahier des charges des écoles, toute école doit avoir un point d’eau. Beaucoup d’écoles dans les villes sont connectées au « réseau ONEA ». Malheureusement ce n’est pas le cas dans beaucoup de centres urbains. Il me semble que ce devait être une priorité pour l’ONEA et ses partenaires que sont les Communes. Mais vous avez certainement entendu la rengaine … Et comme je ne suis pas mauvaise langue, je ne vais pas la répéter.
Excellence, vous le savez certainement mieux que moi, l’ONEA facture les écoles comme si il facturait une industrie d’élevage. Ainsi, si une école de 300 à 400 élèves voulait appliquer quelques mesures ci-dessus suggérées, se laver les mains et remplir son petit bidon d’eau ne serait-ce qu’une fois par jour, par expérience vécue, cette école se retrouvera avec une facture mensuelle de plus de 100 000Fcfa. Et, croyez-moi, c’est beaucoup même pour les écoles fortunées.
Cela dit, quand on a la forte et terrible impression, c’est juste une impression, mais une impression basée sur du vécu, quand on a l’impression, dis-je, que l’ONEA est très braquée contre les écoles, qu’il jubile en coupant l’eau dans les écoles, même pour un jour de retard, vous comprendrez pourquoi les robinets des écoles sont cadenassés.
L’eau ou le cercueil, que choisir ?
Cela dit, Excellence, je vous prie de me croire. Ma folie n’est pas si grave pour plaider pour la gratuité de l’eau dans les écoles. C’est une folie douce qui plaide pour que l’eau soit facturée à un tarif unique dans toute école. C’est pour nos enfants. Permettez-moi la redondance : c’est pour la bonne cause, c’est pour les petits écoliers du Burkina.
Excellence, si nous, responsables, ne libérons pas l’argent pour subventionner l’eau dans les écoles, afin de favoriser l’éducation de nos écoliers à la propreté et à l’hygiène, nous décaisserons cet argent pour acheter de petits cercueils pour les enterrer. Je touche du bois et, fou doux, je crache par terre !
Pour conclure, laissez-moi vous confesser mon pressentiment : la grosse entrave viendra de vos services. Ils tenteront de vous démontrer la formule de l’eau : rare, donc chère.
Plaise à Dieu qu’ils ne vous écrivent pas ce commentaire à la marge : « mieux vaut laisser mourir les écoliers que de baisser le prix de l’eau dans les écoles ».
Je vous prie, Excellence, de croire en mon dévouement.
André-Eugène ILBOUDO
Vos commentaires
1. Le 17 février 2015 à 13:53 En réponse à : Lettre ouverte à SEM le Premier Ministre : Faut-il donner de l’eau aux écoliers ou leur réserver de petits cercueils ?
Merci à M. Ilboudo pour tes propositions. Que force reste aux propositions pour l’amélioration des conditions des vie de la population. Je trouve par contre que tes "dix commandements" sont un minimum pour tout enseignant et responsable d’école. On n’a pas besoin d’arrêtés ministériels pour les appliquer. Autrement dit il y’a quelque chose qui ne va pas chez nos chers "éducateurs". Pour la gratuité de l’eau à l’école, je ne suis pas le premier ministre mais je crois que je suis partant mais il faut des préalables sinon la population se servira à l’école.
2. Le 17 février 2015 à 18:27, par le ble En réponse à : Lettre ouverte à SEM le Premier Ministre : Faut-il donner de l’eau aux écoliers ou leur réserver de petits cercueils ?
l’Ensp de fada ecole profesionnelle sensée etre exemplaire dans la lutte contre ebola ne dispose pas d’eau au vue et au sus de l’administration ni d’eau pour boire ni pour laver les mains on attent toujour le pire pour agir pourtant l’ecole est doté d’un chateau d’eau
3. Le 17 février 2015 à 18:50, par Drt En réponse à : Lettre ouverte à SEM le Premier Ministre : Faut-il donner de l’eau aux écoliers ou leur réserver de petits cercueils ?
Bonjour. Franchement cette histoire de virus Ebola sème la terreur au point de nous ôter la convivialité et tout l’humanisme que nous manifestons les uns envers les autres. Si les enfants ne doivent plus jouer, se serrer les mains,...
Que Dieu nous protège !!!
4. Le 17 février 2015 à 21:54, par bintoa En réponse à : Lettre ouverte à SEM le Premier Ministre : Faut-il donner de l’eau aux écoliers ou leur réserver de petits cercueils ?
J avais la naïveté de croire que l eau était gratuite dans les établissements scolaires. Pourtant il y a les mogo puissants de ce Faso qui ne payent pas ce liquide précieux. Ils ont pourtant plus de moyens !
5. Le 18 février 2015 à 07:11, par Citoyen En réponse à : Lettre ouverte à SEM le Premier Ministre : Faut-il donner de l’eau aux écoliers ou leur réserver de petits cercueils ?
je valide oui le ralentissement du virus ne signifie pas que nous sommes épargnés pour toujours. pourquoi au Burkina nous n’avons pas le sens de l’anticipation ? Nous avons de mauvaises habitudes. avec un systèmes de santé déjà essoufflé ( le personnel fait un travail formidable dans des conditions difficiles)si Ebola (je touche du bois) entre au Burkina nous assisterons a une CATASTROPHE SANITAIRE. ALORS POURQUOI JOUONS NOUS A LA POLITIQUE DE L’AUTRICHE.? VIVEMENT QUE LES AUTORITÉS PRENNENT DES MESURES ENERGIQUES EN COMMENCANT PAR LES ECOLES UNIVERSITES MARCHES LIEUX DE CULTES CAR PERSONNE MÊME AU PLUS HAUT NIVEAU NE SERA ÉPARGNÉ
A l’auteur de cet mot merci ce n’est pas la folie merci d’avoir posté ce mot
Web Master si tu publie pas mon message c’est que tu es pour la propagation du virus
QUE DIEU NOUS PROTEGE !
6. Le 18 février 2015 à 07:50, par Yelenpass En réponse à : Lettre ouverte à SEM le Premier Ministre : Faut-il donner de l’eau aux écoliers ou leur réserver de petits cercueils ?
Belle et très émouvante lettre. J’espère que ce cri du Coeur sera entendu par son destinataire.
7. Le 18 février 2015 à 09:43, par Megd’ En réponse à : Lettre ouverte à SEM le Premier Ministre : Faut-il donner de l’eau aux écoliers ou leur réserver de petits cercueils ?
Ce gouvernement et en particulier, le ministère de la santé ne soucie point de la santé des Burkinabè. Pour eux, ce sont les financements qui les intéressent et ils utiliseront ces sous pour se payer les frais de mission et voyage. Sinon, comment comprendre qu’au sein de l’hôpital Yalgado vous ne trouvez pas de mesures prises pour se laver les mains ? Si, par endroit, l’on voit les jarres, il n’y a pas d’eau et l’état de la jarre vous en dit long sur le désintéressement de la mesure.
Certains maquis et restaurants disposent de matériels pour se laver les mains, mais d’autres n’en disposent pas. Ce qui me fait plus mal, plus nous nous rendons dans des endroits proche de la frontière de la Côte d’Ivoire, c’est la désolation. J’ai séjourné une fois à Bobo et je me suis rendu dans une pharmacie, mais que ne fut pas ma surprise de constater que la pharmacie ne disposait d’aucune jarre pour se laver les mains. On remarquait les affiches qui expliquaient la conduite à tenir, mais combien de nos compatriotes savent lire ? Pourquoi ne pas mettre à disposition de la population des jarres et du savon pour se laver les mains ? La mesure doit être prise dans les écoles, dans les gares et les services.
8. Le 18 février 2015 à 10:01, par le peuple d’abord En réponse à : Lettre ouverte à SEM le Premier Ministre : Faut-il donner de l’eau aux écoliers ou leur réserver de petits cercueils ?
votre plaidoyer, bien qu’il ne sera pas vu de l’unique manière et cela pour des questions de transdisciplinarité est, je l’avoue un pas pour la réflexion et je vous en félicite.
Le Ministère de la santé surtout est interpeller. Depuis la question d’Ebola beaucoup de mesures sont prises en ville, pas en zone rural.
Au niveau des centres de santé périphériques c’est toujours du traditionnel, au niveau des districts les plans de ripostes sont des plans traditionnel deal, de quête pour ne rien faire alors que ces plans devraient faire des propositions d’activité ou de stratégie à tous les niveaux de leur aire de responsabilité et impliquer les acteurs des différents secteurs.
biensur, la question de la santé ne saurait être la seule affaire des agents de santé, encore moins une affaire du seul médecin assis dans le bureau à ouaga et croyant savoir tout.
9. Le 18 février 2015 à 11:43, par Ledoc. En réponse à : Lettre ouverte à SEM le Premier Ministre : Faut-il donner de l’eau aux écoliers ou leur réserver de petits cercueils ?
Merci Monsieur André-Eugène. Du peu que je vous connais je crois que vous êtes un fou raisonnable ;un fou qui a toujours eu un mal fou à aimer les petits enfants. Ce que vous dites hélas, est la vérité. Effectivement prions Dieu que cette maladie continue à s’estomper sinon si elle devrait atteindre notre pays, tel que je nous connais, les conséquences seraient désastreuses....A toi de répondre Monsieur le PM !
10. Le 18 février 2015 à 15:53, par pecos En réponse à : Lettre ouverte à SEM le Premier Ministre : Faut-il donner de l’eau aux écoliers ou leur réserver de petits cercueils ?
merci mr Ilboudo ^pour cette analyse très pertinente. mais hélas, ce qui m’indigne le plus c’est comme vous le dites si bien l’ONEA qui se plait à couper dans les écoles primaires. comment comprendre que nos petites écoles paient des factures d’eau et d’électricité alors que le secondaire ne le fait pas. je voudrais vraiment etre éclairer la dessus. si notre souci est de protéger les tout petits, alors donnons l’eau aux écoles pour qu’elles permettent aux enfants de s’approprier les vertus de la propreté. merci
11. Le 18 février 2015 à 20:42, par Seydou TRAORE En réponse à : Lettre ouverte à SEM le Premier Ministre : Faut-il donner de l’eau aux écoliers ou leur réserver de petits cercueils ?
Il faut être un peu logique dans certaines déclarations. Connaissez vous un seul enseignant qui ne parle pas à ses élèves des mesures à prendre pour lutter contre Ebola. Vous même en tant que parents vous devez d’abord obliger les enfants à se laver les mains à la maison avant de se rendre à l’école. Et une fois à l’école si les élèves se saluent, ce sont des mains propres qui serreront des mains propres. La charge des enseignants sera facilité à la source. Ils ne pourront pas réussir ce combat tout seul. N’accusons pas les enseignants de tous les péchés d’Israel. Que chacun joue sa partition dans l’éducation des enfants. Les parents ne doivent pas abdiquer et laisser tout le boulot aux seuls enseignants.
12. Le 19 février 2015 à 12:21 En réponse à : Lettre ouverte à SEM le Premier Ministre : Faut-il donner de l’eau aux écoliers ou leur réserver de petits cercueils ?
Bonjour Monsieur Seydou,
C’est dommage de vous le confesser, mais je connais, hélas, des enseignants qui sont crasseux. Je suis moi même enseignant, donc vous mesurez ma peine. Cela dit, je n’accuse personne. JE CONSTATE que la plupart des enseignants ne sont pas TRES propre. Regardez simplement les cours de nos écoles. Et si vous êtes parent d’élèves, par curiosité entrez dans les salles de classe et regardez le bureau des maîtres (quand ils en ont). Moi je suis moaga, et j’imagine que vous êtes un TRAORE de l’Ouest. Je suis allé une fois dans l’ouest profond, derrière KANKALABA, le soir après avoir fini de manger, les femmes ont rassemblé les ustensiles, elles les ont lavé et les ont place sur le "gabougou", (sorte de petit hangar). J’espère ne pas déclencher la 4ème guerre mondiale en vous disant qu’à 10km de Ouagadougou, vous arrivez dans une famille, la cour n’est pas balayée (ce n’est pas grave) mais la bonne maman pour vous servir l’eau de l’étranger ramasse la calebasse qui traine, prend quelques morceau de paille et caresse la calebasse et vous sert une eau douteuse. Et si vous ne buvez pas, l’on va vous dire que "vous faites le blanc".
Cela dit, mon intention, loin de là, n’est d’accuser les enseignants. Moi-même je suis du corps mais je n’arrive pas à être corporatiste. A chacun ses défauts. Bien à vous !
Aeugène ILBOUDO