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Burkina-UE : "La SOSUCO exporte environ 8000 tonnes de sucre sur le marché européen"

Publié le jeudi 10 mars 2005 à 10h59min

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A la fin de la visite présidentielle en Belgique, l’Hebdo du Burkina s’est entretenu avec M. Kadré Désiré Ouédraogo, ambassadeur auprès du Royaume de Belgique et des autres pays du Benelux, du Royaume Uni, auprès de l’Union européenne et du Groupe ACP.

KDO, pour les intimes, nous parle de l’importance stratégique d’un pôle diplomatique comme celui de Bruxelles, des perspectives des relations bilatérales Burkina-Belgique et multilatérales ACP-UE. On lira avec intérêt qu’en plus d’être l’avocat du coton africain, Blaise Compaoré se fait l’avocat du sucre ACP.

L’Hebdomadaire du Burkina (H.B) : Le président du Faso au cours de la rencontre avec la communauté des Burkinabè vivant en Belgique a déclaré que "Bruxelles est l’un des poumons de la diplomatie burkinabè". Quelles sont les limites territoriales de la juridiction dont vous avez la charge et qu’est-ce qui fait sa particularité ?

Kadré Désiré Ouédraogo (KDO) : Nous sommes très honorés et très heureux de la visite qu’a effectuée le président du Faso dans notre juridiction. Comme il l’a dit, Bruxelles est l’une des plus grandes places diplomatiques au monde.

Pour ce qui est du Burkina par exemple, en plus des relations bilatérales avec la Belgique où nous sommes accrédités, nous représentons notre pays dans les autres pays du Benelux à savoir le Luxembourg et le Royaume des Pays-Bas. Nous sommes aussi accrédités auprès du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord. Déjà vous voyez que Bruxelles est une place d’importance pour notre pays. Et quand s’ajoute à cela le fait que Bruxelles est la capitale de l’Union européenne qui, en termes d’aide au développement, est notre premier partenaire, vous mesurez encore plus l’importance de cette mission. En outre, Bruxelles est le siège de l’OTAN, de l’Organisation mondiale des douanes, etc., Bruxelles est donc une capitale internationale. Vous avez évoqué tout à l’heure les relations avec l’UE, mais vous n’ignorez pas que nous avons ici, l’ensemble des 79 pays représentants le groupe des Etats d’Afrique des Caraïbes et du Pacifique qu’on appelle communément le groupe ACP dans lequel les ambassadeurs sont activement impliqués pour négocier chaque jour avec nos partenaires de l’Union européenne. C’est dire que nos relations avec l’Union européenne comportent deux volets.

Il y a le volet bilatéral qui concerne les relations directes entre l’UE et le Burkina et un volet multilatéral par lequel nous négocions ensemble avec les autres Etats ACP des questions d’ordre général concernant principalement l’accord de Cotonou qui lie l’Union européenne à tous ces 79 Etats des ACP. Quand on considère que l’Union européenne s’agrandit - elle compte maintenant 25 pays membres et il y a 4 autres qui frappent à la porte - on mesure encore plus l’importance de la place diplomatique qu’est Bruxelles car l’UE c’est bientôt 29, voire 30 pays avec 500 millions d’habitants. Du reste, la construction européenne dépasse aujourd’hui la coopération économique et vise l’intégration politique. Plus cette construction politique de l’UE va s’approfondir, plus Bruxelles sera une place diplomatique importante. Il est donc important que nos relations avec toutes les institutions qui y siègent soient au beau fixe. C’est l’objectif que travaille à atteindre notre diplomatie. Il est évident que cette visite du président du Faso va y contribuer grandement.

H.B : Quels sont les domaines spécifiques de la coopération bilatérale et multilatérale qui ont bénéficié dans l’immédiat des effets positifs de cette visite ?

KDO : Tous les secteurs de notre coopération et de l’aide au développement vont bénéficier des effets de cette visite officielle. C’est toute la dynamique qui est relancée. Vous avez écouté le Premier ministre de Belgique qui a déclaré avoir donné instruction pour qu’une mission de haut niveau du ministère de la Coopération et du ministère des Affaire étrangères se rende au Burkina pour une évaluation de la coopération entre les deux pays. Cette mission s’attachera à relancer sur des programmes concrets qui contribuent au développement de notre pays. C’est dire que non seulement les secteurs traditionnels de la coopération belge avec notre pays qui concerne la coopération universitaire, les transports - les bus de la société de transport urbains au Burkina sont le résultat de cette coopération - la santé, l’éducation - (la Belgique soutient le Programme décennal de développement de l’éducation de base) - etc. Tous ces secteurs vont bénéficier du renforcement de nos relations bilatérales avec la Belgique, mais de nouveaux secteurs vont être aussi explorés.

H.B : Néanmoins le Burkina a-t-il déjà retenu des axes prioritaires de discussion avec la mission du gouvernement belge qui viendra bientôt ?

KDO : Non ! Je pense que l’objectif de cette mission gouvernementale belge est de faire le point avec la partie burkinabè. Elle procèdera à une évaluation globale de cette coopération à l’étape actuelle pour voir dans quels secteurs et dans quelle direction relancer ou renforcer cette coopération. C’est une excellente chose qui augure des perspectives heureuses pour le développement de nos relations. Nous nous attendons donc à une mission d’évaluation et d’exploration. A partir de ses résultats et suivant la volonté et les décisions des deux gouvernements nous saurons désormais où mettre l’accent.

H.B : Avec l’élargissement de l’UE au pays d’Europe de l’Est, l’impression générale c’est qu’on assiste à une diminution de l’aide publique au développement en direction des pays africains.

Est-ce que la coopération bilatérale et multilatérale avec le Burkina ne va pas être affectée par cette tendance générale qui n’est pas favorable ?

KDO : Non, je ne pense pas qu’on puisse dire cela. Lorsque vous regardez les conventions financières qui ont toujours accompagné d’abord les accords de Yaoundé, ensuite de Lomé et maintenant de Cotonou entre l’UE et les pays ACP vous vous rendez compte que les programmes quinquennaux au niveau financier vont toujours en s’accroissant en ce qui concerne l’UE. Pour le 9e FED en cours, il y a un important volet d’aide aux ACP qui est de 12 milliards d’euros. Pour l’accord de Cotonou, l’enveloppe financière apportée par l’UE n’est pas moins de 15 milliards d’euros mis à la disposition des ACP. En ce qui concerne donc l’Union européenne, on ne peut pas dire que l’aide va diminuer.

Dans le cadre de la coopération bilatérale, il est vrai que le volet aide budgétaire a été fortement diminué ces dernières années. Mais pour le volet d’aide au programme et d’aide au développement, au contraire il y a eu augmentation. Bien sûr, on n’est jamais totalement satisfait. On voudrait que le soutien soit plus important. Pour le Burkina, dans le cadre du 9e FED nous avons une affectation de 275 millions d’euros dans l’enveloppe A et 70 millions d’euros dans l’enveloppe B soit une affectation totale de plus de 300 millions d’euros. Nous assistons donc à un accroissement du soutien de l’UE au développement de notre pays.

H.B : Au cours de son intervention devant le groupe ACP, le président du Faso a de nouveau évoqué le problème des subventions accordées aux cotonculteurs européens et américains. Mais il a aussi parlé de l’exportation du sucre des ACP vers l’UE. C’est là un problème nouveau qui n’est pas connu du grand public. De quoi s’agit-il ?

KDO : Pour le coton, le problème est suffisamment connu. Je ne reviens donc pas là-dessus. Je signale néanmoins que l’ambassade du Burkina en Belgique a longtemps représenté notre pays auprès de l’OMC avant l’ouverture d’une mission résidente qui a pris le relais a partir de juillet 2004. Le chargé d’affaire suit donc le dossier et des discussions se poursuivent à l’OMC pour trouver une solution acceptable pour tous à cette question du coton. Je voudrais par contre donner quelques détails sur le problème du sucre. Beaucoup de Burkinabè ne savent pas que notre pays exporte du sucre vers l’UE. Notre principale unité de production, la SOSUCO est l’une des premières entreprises pourvoyeuses d’emplois. Il est donc normal que les autorités du pays puissent l’accompagner dans son développement. C’est pourquoi notre pays s’est battu pour que la SOSUCO puisse être membre de ce qu’on appelle le "Protocole sucre" de l’UE. Cette admission est en voie et le président du Faso a abordé cette question avec ses interlocuteurs belges et de l’UE.

Mais pour résumer ce que le président a dit aux ACP, vous savez que l’Union européenne qui admettait le sucre produit dans les pays ACP sur son marché avec des quotas à des prix intéressants, a décidé de réformer son "régime sucre" dans le cadre des accords avec les pays ACP. Cette réforme et cette libéralisation du marché du sucre en Europe, va entraîner une baisse du prix préférentiel qui était accordé par l’UE. C’est la raison pour laquelle, les pays ACP plaident pour que, malgré la réforme, on tienne compte du fait que le sucre représente pour ces pays un produit d’exportation très important qui favorise le développement de ces pays. Pour les ACP, il faut donc faire en sorte que la modification du régime soit appliquée graduellement pour ne pas entraîner un déficit brusque dans les recettes d’exportation des pays ACP producteurs de sucre.

Pour ce qui concerne le Burkina, avec l’initiative "Tout sauf les armes", notre pays est admis en tant que PMA (les pays les moins avancés) à exporter un certain quota de sucre vers l’UE sans droit de douane et à des tarifs préférentiels. Grâce à cette initiative, la SOSUCO exporte voilà maintenant 3 ans environ 8000 tonnes de sucre par an sur le marché européen. C’est un avantage qui peut être consolidé si le Burkina est admis entièrement dans le "Protocole sucre" de l’UE pour bénéficier des mêmes avantages que les autres pays ACP exportateurs de sucre.

H.B : A la rencontre des Burkinabè vivant au Benelux avec le président du Faso, nous avons vu une forte communauté. Mais les lois d’immigration en Europe sont de plus en plus draconiennes. Est-ce que nos compatriotes sous votre juridiction ne sont pas en bute aux difficultés des "sans papiers" que vivent bien d’Africains sur d’autres cieux en Europe ?

KDO : Les Burkinabè vivant en Belgique ont une très bonne réputation. Ceci est un acquis grâce à leur sérieux, à leur bon comportement, si bien que nous avons très peu de problèmes dans le genre que vous évoquez. Bien sûr il ne manque pas de petites difficultés d’ordre divers pour l’un ou l’autre, mais nous avons très peu de "sans papiers" ou des cas d’expulsion. Quand ces cas se présentent, l’ambassade apporte le maximum d’assistance en rapport avec les autorités judiciaires et politiques du pays hôte.

H.B : Un dernier mot... Quelque chose que vous voulez dire pour conclure cette interview.

KDO : Cette visite présidentielle nous a apporté beaucoup de satisfaction. Non seulement elle consacre une visite retour de celle qu’a effectuée M. Romano Prodi au Burkina quand il était président de la Commission de l’UE mais également au niveau de la Belgique, elle répond à l’amitié dont nous avait honoré le Premier ministre belge M. Guy Verhofstadt et Mme le ministre présidente de la communauté française de Belgique lors de leur séjour au Burkina à l’occasion du Sommet de la Francophonie.

Nos hôtes ont loué la grande capacité organisationnelle du Burkina qui leur avait fait grande impression et salué à nouveau le succès de cette rencontre francophone.

Au niveau de l’ambassade, le séjour du président du Faso est un grand encouragement et je redis devant votre micro notre total engagement et notre disponibilité à travailler pour élargir encore plus le cercle des amis du Burkina au Benelux et également améliorer les relations de notre pays avec tous les pays de la juridiction. Elles sont d’ailleurs excellentes, mais on peut faire encore mieux et nous nous y attelons avec l’ensemble de nos collaborateurs.

Interview réalisée à Bruxelles
Par Djibril TOURE


Secteurs et thèmes prioritaires de la coopération bilatérale Belgique-Burkina

Secteurs

- les soins de santé de base y compris la santé reproductive ;

- l’enseignement et la formation ;

- l’agriculture et la sécurité alimentaire ;

- l’infrastructure de base ;

- la prévention des conflits et la consolidation de la société

Thèmes transsectoriels

- le rééquilibrage des droits et des chances des femmes et des hommes ;

- le respect de l’environnement ;

- l’économie sociale.

Par ailleurs, la coopération bilatérale entend veiller au renforcement du développement socio-économique endogène par les acteurs locaux, dans le cadre d’une approche participative. Elle s’inscrit dans la philosophie du processus de décentralisation en cours au Burkina Faso. Enfin, elle privilégie également les initiatives de coopération régionale.

D.T

L’HEbdo

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