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Les instruments économiques de politiques environnementales

Publié le dimanche 30 novembre 2014 à 21h02min

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Les instruments économiques de politiques environnementales

Un instrument économique est une mesure qui utilise le système des prix et les forces du marché pour atteindre un objectif donné. Les instruments peuvent être qualifiés d’économiques lorsqu’ils ont un effet sur l’estimation des coûts et des avantages des différentes possibilités d’action qui s’ouvrent aux agents économiques.

L’utilisation des instruments économiques dans un objectif de protection de l’environnement et de développement durable consiste donc à accroître les coûts des activités ayant des incidences négatives sur l’environnement, ou à réduire les coûts des activités bénéfiques à l’environnement. Les taxes, redevances, permis d’émissions négociables, garanties financières, etc., sont des exemples d’instruments économiques.

Parmi toutes les définitions que l’on retrouve dans la littérature concernant les instruments économiques, on retient deux caractéristiques majeures : (i), les instruments économiques fonctionnement par le biais des prix, et (ii) les instruments économiques laissent aux entreprises et aux particuliers le soin de choisir leur moyen d’action.

Les instruments économiques de protection de l’environnement sont appliqués dans un but précis, à savoir l’amélioration de l’environnement en assignant un prix à ses différentes utilisations. Dans le cas de la pollution par exemple, les instruments visent à réduire les émissions nocives liées aux processus de production ou de consommation. Ils constituent un moyen d’intervention des pouvoirs publics modifiant les prix relatifs et les signaux du marché afin de décourager certains modes de production et de consommation et d’en encourager d’autres entraînant une moindre dégradation de l’environnement.

L’utilisation des instruments économiques poursuit généralement trois types d’objectifs. Le premier est un objectif de financement, c’est-à-dire la récolte de fonds qui permettront de couvrir les coûts des impacts sur l’environnement ou qui seront redistribués pour favoriser des activités de prévention ou de restauration de la qualité de l’environnement ou de recherche et développement. Le second objectif est d’influencer le comportement des consommateurs afin de réduire ou d’optimiser l’utilisation des ressources, en exerçant une pression à la hausse sur le prix des produits ou des activités nuisibles pour l’environnement. Enfin, il y’ a l’objectif de prévention qui consiste à adopter une approche de plus en plus préventive en matière de pollution de l’environnement.

Les instruments économiques de politiques environnementales (taxes, redevances, permis d’émissions négociables, etc.) présentent par conséquent plusieurs avantages, parmi lesquels la réduction de la pollution à moindre coût, l’encouragement à l’innovation et les recettes. Concernant la pollution, les instruments économiques comme les taxes tiennent compte des différences de coûts de dépollution. Ainsi, les pollueurs qui ont les coûts de dépollution les plus faibles auront intérêt à dépolluer plutôt qu’à payer la taxe. À l’inverse, ceux qui ont les coûts de dépollution les plus élevés préféreront payer la taxe plutôt que de dépolluer. L’incitation à l’innovation apparait surtout lorsque les coûts de dépollution sont plus faibles que la taxe. Les entreprises dans une telle configuration sont alors toujours incitées à innover et à trouver de nouveaux moyens pour réduire leurs émissions afin de maximiser leurs profits. Enfin, les recettes générées par les instruments économiques peuvent être réinvesties dans la protection de l’environnement et répondent au principe pollueur-payeur.

Si les instruments économiques de politiques environnementales démontrent de nombreux avantages, ils présentent également certains problèmes qu’il ne faut pas sous-estimer. D’abord, une taxe est efficace lorsqu’elle touche directement l’activité de pollution concernée. Pour cela il faut pouvoir mesurer précisément les émissions (ou l’externalité négative engendrée), et ce n’est pas toujours réalisable. C’est pourquoi, il est souvent préférable de faire appel à des normes règlementaires plutôt qu’à des normes de performance ou l’instauration d’écotaxes. Ensuite, l’utilisation d’instruments économiques crée de l’incertitude quant aux résultats obtenus.

En effet, la réduction de la pollution résultant d’une taxe sur un produit polluant dépendra du taux de la taxe et de la sensibilité des acheteurs à la hausse du prix. S’ils sont peu sensibles, la taxe aura peu d’effet. Enfin, l’utilisation d’instruments économiques suppose implicitement que l’impact de la pollution est le même peu importe la source d’émission ; ce qui n’est pas vrai puisque les écosystèmes ont des capacités d’assimilation différentes.

Un minimum de précaution s’impose donc lorsqu’un instrument économique de protection de l’environnement est envisagé. Dans le cas de la taxe, c’est davantage l’incidence finale, c’est-à-dire qui supporte en fin de compte la charge de la taxe plutôt que l’incidence formelle, c’est-à-dire qui paie la taxe qu’il faut considérer. Une taxe peut avoir des effets directs sur les achats des ménages mais également des effets indirects puisque la charge de la taxe qui est acquittée par les entreprises peut toujours être répercutée sur les ménages ou les clients. C’est pourquoi, il est important avant d’instaurer une nouvelle taxe, d’en évaluer les effets. L’instauration de taxes environnementales peut également avoir des effets sur la compétitivité internationale des entreprises.

Ainsi, les entreprises à forte intensité de pollution peuvent constater une détérioration de leur position concurrentielle due aux frais encourus par le paiement de taxes ou redevances environnementales par rapport à des entreprises d’un autre pays qui n’ont pas à payer de telles redevances. Cependant, les taxes environnementales ne diffèrent pas des autres taxes quant à leurs effets sur la compétitivité, et le problème de la compétitivité dans le cas des taxes environnementales est facilement surestimé. Il est en effet possible de compenser, au moins en partie, l’impact des taxes environnementales sur la compétitivité par un allégement d’autres taxes pesant sur les entreprises, grâce aux recettes produites par les taxes environnementales. L’objectif incitatif est ainsi maintenu.

Joël Awouhidia P. KORAHIRE
Attaché de Recherche

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Vos commentaires

  • Le 1er décembre 2014 à 10:25, par Toutcourt En réponse à : Les instruments économiques de politiques environnementales

    Salut Mon Chercheur. Belle analyse. Félicitation. Toutefois, je reste sur ma faim car tout ce qui est dit nous aurait servi ou servi le politique si et seulement si, l’analyse faite débouchait sur des mesures concrètes à l’endroit des entreprises burkinabè.

    On t’attend sur ce chantier mon frère. Il faut que les fruits de la recherche soient désormais appliqués à nos économies.

    Bon courage !!!

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