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Lettre ouverte de Emile PARE à Soungalo Ouattara, président de l’Assemblée nationale et aux députés : « Le peuple, la nation entière et le monde ont les yeux rivés sur vous aujourd’hui »

Publié le lundi 27 octobre 2014 à 14h51min

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Lettre ouverte de Emile PARE à Soungalo Ouattara, président de l’Assemblée nationale et aux députés : « Le peuple, la nation entière et le monde ont les yeux rivés sur vous aujourd’hui »

Le feuilleton « Article 37 » est à son deuxième épisode. Le 1er épisode qui est l’adoption du projet de loi est joué depuis le conseil de ministre extraordinaire du mardi 27 octobre par Blaise Compaoré et ses ministres. Vous êtes aujourd’hui les deuxièmes acteurs de ce feuilleton de la traîtrise de notre peuple et sa démocratie.
Le 30 octobre 2014 vous avez à répondre à une et une seule question : « Allez-vous choisir le camp de la traîtrise : celui de Blaise Compaoré, ses ministres, le CDP, le front républicain, l’ADF/RDA et alliés ou le camp du peuple,...

... de la révolution démocrate conduite par les partis membres du CFOP (l’UPC, le MPP, le front progressiste Sankariste, le PDS/METBA, le PDC, le Faso autrement, le parti de l’espoir, etc.) et la société civile progressiste (la CCVC, le balai citoyen, le comité anti référendum, le mouvement y a en marre, le mouvement « ça suffit », le mouvement brassard noir, le mouvement en rouge, etc. ».

Bref, votre responsabilité est lourde en ce moment. Blaise Compaoré a déjà gravement violé la Constitution depuis le 21 octobre 2014.

Votre plénière du 30 octobre 2014 doit jeter le projet de loi à la poubelle par « une question préalable » et passer ensuite à une autre question principale « la mise en accusation du Président du Faso et des ministres devant la Haute Cour de justice pour « haute trahison », d’attentat à la Constitution et violations des accords et traités de la CEDEAO et de l’UEMOA, en application des articles 138, 139, 140 et 151 de la Constitution du 02 juin 1991.

Monsieur le Président de l’Assemblée,

Cinq ans renouvelables deux fois soit 15 ans non renouvelables. Toutefois « cette nouvelle disposition s’applique au mandat en cours ». Puis « cette disposition nouvelle fait désormais partie des domaines non révisables ». En lisant l’article 37 nouveau en français facile pour les auditeurs mossi » de la radio de Sid Naaba c’est ainsi : « la limitation de mandat est levée pour permettre à Blaise Compaoré de se présenter pour un dernier mandat de 5 ans, et après lui aucun autre Burkinabè ne peut dépasser le record de temps mis par Blaise Compaoré au pouvoir ».

Monsieur le Président de l’Assemblée,

Allez-vous conduire les débats ce 30 octobre 2014 sur une telle modification ? Sur un article aussi scandaleux dont le caractère honteux pour vous, les députés, notre peuple et sa démocratie ne font aucun doute ?

Donner un « lenga » de 5 ans à Blaise Compaoré pour « terminer ses chantiers ». Que les députés Soungalo, Mélégué, Nabaho disent à haute et intelligente voix ce 30 octobre 2014 au peuple, à leurs électeurs et à moi quels sont ces grands chantiers qu’un autre Burkinabè « Roch Marc Christian KABORE » par exemple ne peut pas achever ?

Une question personnelle à Yé Bognessan : pourquoi le projet de loi a été introduit à l’Assemblée par le ministre de l’administration et non par vous ministre des Réformes politiques et chargé des relations avec le Parlement ? Ne pensez-vous pas que ce coup d’Etat gouvernemental vers un coup d’Etat constitutionnel suffit pour que vous rendiez le tablier ? Quelle humiliation attendez-vous encore ?

Messieurs les députés,

Les 28, 29, 30 octobre 2014 commence le « Printemps noir » ou le « printemps burkinabè ». Après le printemps latino-américain, le printemps chinois, le printemps arabe, voici venu l’heure du « printemps noir ».

L’honneur est donné au Burkina Faso de l’annoncer. Ce printemps doit emporter, « dégager » tous ces chefs d’Etat de l’Etat d’exception qui se sont maquillés jusque-là de manteau de démocrates pour endiguer, liquider de l’intérieur le vent de Renouveau démocratique qui souffle sur le continent noir africain depuis le début des années 1990. Les autres peuples africains nous observent en ce moment, observent particulièrement vous les députés : Allez-vous aller contre les aspirations de votre électorat, de votre peuple, du peuple africain pour vous mettre au service d’un individu, d’un clan, d’un syndicat de Chef d’Etat monarcho-démocrates ?
En tout cas chaque député doit prendre ses responsabilités.

A Gilbert Ouédraogo et à ses députés

Vous nous disiez dans le débat sur l’article 37 et de façon oh combien agaçante que c’est vous avec vos 18 voix qui avez la clef de l’article 37. Comme une « jeune fille mossi au sein tendu », la majorité CDP et l’opposition CFOP vous ont fait la cour. Avec arme et bagage vous avez atterri dans la cour du CDP. Vous dites que c’est la démocratie c’est vrai. Mais c’est encore plus démocratique si vous écoutez les cris de tristesse, de désolation du peuple du Yatenga, du Gourma, de Tenkodogo, de Ouagadougou et de Bobo-Dioulasso « vos fiefs traditionnels ». Dans tous les cas, la rue, la désobéissance civile est aussi démocratique.

Quand les instruments de la démocratie représentative sont désuets, le peuple reprend son pouvoir délégué par la démocratie directe. C’est ce que les printemps latino-américains et arabe nous ont enseigné ces dernières années.

A Alain Yoda et aux députés CDP

Vous qui avez pour certains : Nabaho, Mélégué, Achille, Yoda, etc. 20 ans de parlementarisme à l’Assemblée nationale, aux assemblées africaines et internationales : CEDEAO, UEMOA, UA, ACP-UE, francophone, voulez-vous être la risée de la population, la risée des députés des autres pays africains dans les jours à venir ? Comment une même tête, un même cerveau, les mêmes méningites peuvent dire :
1. Oui à la limitation des mandats à 14 ans (1991) ;
2. Non à la limitation des mandats ; à 7 ans renouvelables à volonté (1997) ;
3. Oui à la limitation des mandats à 10 ans (2000) ;
4. Oui à la levée de la limitation du mandat pour Blaise pour 5 ans puis à la limitation des mandats à 15 ans à partir de 2020 à la fin du « lenga » de Blaise ? C’est terrible et terrifiant et même horrible.

A Maître Sankara et aux députés de l’opposition

Qu’attendez-vous d’une Assemblée illégitime ? Vous n’avez qu’une seule attitude : l’affirmation de la position du peuple par un boycott actif : les tables de l’hémicycle ce 30 octobre 2014 doivent craquer sous les coups de vos « talons et de vos hauts talons ».

Enfin aux électeurs et au peuple tout entier

Le parlement est par excellence le symbole de la démocratie. Que les représentants de cette institution veulent trahir ou ont trahi ce peuple qui leur a délégué son pouvoir, eh bien, ce peuple se réapproprie sa chose par la démocratie directe.
Ce 30 octobre 2014, c’est la marche sur l’Assemblée nationale comme au Sénégal (gloire au peuple sénégalais), c’est « la prise de la Bastille » (gloire au peuple et aux forces démocratiques et progressistes français). C’est « la prise de la Douma (gloire au peuple russe avec son perestroïka et sa glasnost).

Messieurs les députés

Vous devez « Ecrire avec nous une nouvelle page de l’histoire de notre peuple ».
Sachez en tout état de cause que la lutte des peuples est ainsi faite, que personne ne peut perennément arrêter le cours de son histoire. Homme aussi fort soit-il ne peut arrêter le peuple burkinabè en marche pour sa véritable, sa pleine démocratie pluraliste.
Le Burkina Faso a besoin aujourd’hui d’institutions fortes expression d’une démocratie forte et non d’homme fort fut-il s’appeler « enfant terrible ».

Docteur Pargui Emile PARE

Ancien député à l’Assemblée (1992-1997)
Ancien parlementaire de la CEDEAO, du Parlement ACP-UE
et du Parlement francophone
Militant du MPP

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