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Boron (Dédougou) : des oiseaux migrateurs dévastent 2 à 3 hectares par jour et les agriculteurs appellent à l’aide

Publié le mercredi 22 octobre 2014 à 19h18min

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Boron (Dédougou) : des oiseaux migrateurs dévastent  2 à 3 hectares par jour et les agriculteurs appellent à l’aide

Nous sommes à 28 kilomètres de Dédougou dans le village de Boron, où les oiseaux migrateurs hantent les esprits des agriculteurs. Ils constituent aujourd’hui la menace potentielle pour les champs des « Boronais ». En ce sens que tous les champs sont sur haute surveillance. Une journée suffirait aux oiseaux pour dévaster deux à trois hectares (ha) de mil ou de sorgho. Monsieur Sékou Sérépé est l’un des plus touchés. En moins d’une journée et demie, dans son champ de 1,75 ha, il n’a trouvé que des tiges de sorgho. Les « Boronais » appellent les autorités à agir afin de prévenir la famine ou une crise alimentaire au plan national.

Réunir les agriculteurs de Boron de nos jours relève d’un parcours du combattant. Chacun surveille son champ contre les oiseaux migrateurs. En effet, des oiseaux migrateurs sont arrivés plutôt que prévu. Selon les agriculteurs, autrefois les oiseaux venaient trouver que les champs de céréales notamment de mil et de sorgho sont à leur maturité. Cela limitait les dégâts. Aujourd’hui, ils sont arrivés au mauvais moment. A une époque où les céréales sont mi-mûres et mi-crues. Une période de leste pour les oiseaux. Car les grains de céréales n’étant pas bien solides, cela leur permet de les picorer très rapidement et à volonté. Les agriculteurs se retrouvent ainsi dans un dilemme. Entre faire coucher les tiges des céréales non matures avec le risque de ne rien y récolter ou les laisser à la merci des oiseaux migrateurs.

Là-dessus les intéressés s’expriment.

Robert Coulibaly, est le président du groupe « Siguitémogoson » de l’Union générale pour la commercialisation des produits agricoles (UGCPA). Il a cultivé environ 13 hectares cette année, soit 6 hectares de coton, 1 ha de sorgho et 0,25 ha de mil, le reste concerne le maïs, l’arachide et le sésame. Pour lui, nonobstant quelques poches de sécheresses et quelques inondations isolées, les récoltes s’annoncent passablement bien. Mais « en cette fin de saison agricole, souligne-t-il, nous sommes confrontés à un seul problème. Celui du phénomène des oiseaux migrateurs. Ils ont ravagé presque toute la r écolte qu’il y a des champs où le propriétaire ne récoltera même pas une graine de mil ou de sorgho ». Et de poursuivre, ceux qui n’ont pas encore eu la visite des oiseaux s’empressent actuellement à faire coucher les tiges de leur sorgho et mil avec espoir qu’ils vont murir à même le sol. Ceux dont les céréales sont en phase finale de maturation, les récoltent en dépit du fait que la maturation n’est pas effective. Et tout ça à cause des oiseaux. Sinon ces champs n’ont pas encore atteint la phase de la récole.

« Finir un champ en un ou deux jours ! Cela ne s’était jamais produit »

Selon monsieur Coulibaly chaque année, ils ont toujours eu la visite des oiseaux migrateurs. Il y aurait des années où les oiseaux ne viennent pas en grand nombre, tandis qu’ils le sont pour certaines années. « Seulement pour cette année c’est grave. Ça dépasse les bornes » indique-t-il. Avant de s’exclamer, « les années antérieures, ils pouvaient dévaster des champs, mais finir un champ en un ou deux jours ! Cela ne s’était jamais produit. Mais cette année, s’ils viennent dans ton champ, même si ça vaut 2 à 3 hectares, ils en finissent en une journée. Tu ne vas rien obtenir de ce champ ». Le président du groupe « Siguitémogoson » explique le mode opératoire de ces oiseaux. « Ils viennent en groupe. Seul, tu ne peux même pas les chasser. Le bruit ne suffit même pas pour les amener à s’envoler. Il faut utiliser nécessairement les lance-pierres. Parce qu’ils sont nombreux de sorte qu’ils n’ont même pas peur de la présence d’un être humain ». Et de déplorer, « aujourd’hui dans mon champ, j’ai perdu environ 10 sacs de 100kg ».

Monsieur Sékou Sérépé est aussi membre de l’UGCPA à travers le groupement « Siguitémoson ». Cette année, il a cultivé 1,75 ha de sorgho, 2 ha de coton et un hectare de maïs. Les oiseaux migrateurs ont détruit ses 1,75 ha de sorgho en moins de deux jours. A l’entendre, il attendait 20 à 25 sacs de 100 kg. Nous avons fait une visite guidée des 1,75 hectares de sorgho dévasté en compagnie du propriétaire, monsieur Sérépé. Après le tour du champ, Sérépé Sékou nous raconte son malheur. « J’étais malade, je n’ai pas pu venir au champ. A mon retour, j’ai constaté que les oiseaux ont enlevé leur part du gâteau. Ils ont dévasté le champ de sorgho en deux jours. Parce que j’ai quitté au champ le samedi, le dimanche je n’ai pas pu venir. Et le lundi soir j’ai constaté qu’on ne pouvait plus rien récolter de ce champ. Comme toi-même tu es témoin, il n’y a rien à récolter dans ce champ à fortiori à donner à quelqu’un pour honorer une promesse ».

Les agriculteurs appellent au secours

Pour Robert Coulibaly, « nous avons vraiment besoin d’une aide pour faire face à ces oiseaux migrateurs. Sinon, ils vont vraiment provoquer la famine dans notre pays. Car, se justifie-t-il, ils ne vont pas se limiter seulement à Boron. Ils vont aller dans d’autres localités du pays ». Il prévient « le gouvernement même va subir les conséquences de ce que nous vivons actuellement ». Pour sa part, Sékou Sérépé souhaite d’abord un soutien de la part de l’Etat afin de pouvoir assurer ses obligations de père de famille. En sus, il se joint à M. Coulibaly pour demander à l’Etat de voir dans quelle mesure il peut intervenir pour limiter les dégâts des oiseaux migratoires. Et à Abnéko coulibaly membre de « Siguitémogoson » de renchérir. Il pense que la culture du coton ces dernières années à Boron est due à la menace des oiseaux migrateurs. « Avant on ne cultivait même pas le coton ici. Mais de plus en plus, les gens transitent vers le coton pour sauver la situation. Parce que si tu cultives beaucoup de sorgho et que tu n’as pas pu protéger ton champ contre les oiseaux migrateurs, tu risques de ne rien récolter. Ça apporte finalement la famine et les gens vont t’accuser de n’avoir pas cultivé assez alors que tu as cultivé. Par exemple cette année j’ai cultivé 1 hectare de sorgho, 1 ha de maïs contre 3 h de coton ». Et d’implorer, « nous voulons sincèrement un soutien pour faire face aux attaques aviaires puisqu’aujourd’hui c’est ça notre cheval de batail ».

Les semences améliorées (OGM) comme solution

Les agriculteurs qui ont déjà fait l’expérience des semences améliorées soutiennent qu’elles pourraient être l’une des solutions. C’est le cas de Sérépé Osé, président du groupement varossi, qui travaille maintenant avec le Kalpèlga en lieu et place de la semence locale. « Aujourd’hui le problème qui traumatise tous les gens de notre localité c’est la question des attaques aviaires. Dans le passé, nous en avons beaucoup souffert. Donc nous avons maintenant changé de cap pour travailler selon le mode de production du Conseil à l’exploitation familiale (CEF). Nous avons aussi adhéré à la nouvelle dynamique de notre pays. Ce qui nous a permis d’obtenir de nouveaux types de semence qui murit vite et nous permet d’éviter les attaques aviaires », a-t-il signifié. Il n’y est pas allé du dos de la cuillère en donnant sa preuve, « de nos jours mon champ de sorgho est mûr, mais je n’ai pas encore procédé à sa récolte. Or nombreux sont ceux qui font le bruit qu’il y a les oiseaux ».
Kafa Coulibaly, animateur endogène en conseil à l’exploitation familiale au niveau de l’Union générale pour la commercialisation des produits agricoles à Boron, abonde dans le même sens, « ma stratégie contre les attaques aviaires est mon attachement à la semence améliorée ».

Ibrahima TRAORE
Lefaso.net

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