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Banfora : Les populations prennent connaissance du rapport 2011 de l’ITIE-BF

Publié le dimanche 6 juillet 2014 à 21h49min

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Banfora : Les populations prennent connaissance du rapport 2011 de l’ITIE-BF

L’équipe de dissémination du 3e rapport de l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE-BF) continue sa « croisade ». Le 04 juillet 2013, Sidiki Guiré (chef de mission) et ses camarades étaient à Banfora pour présenter le rapport 2011. Là, ils eu affaire à des interlocuteurs très intéressés qui ont posé toutes sortes de question en lien avec l’exploitation minière au Burkina.

C’est l’ancienne mairie de la cité du paysan noir qui a abrité la rencontre. Conseillers municipaux, représentants d‘organisations de la société civile, coutumiers et religieux ont pris part à cet atelier d’échanges. C’est la première fois que les « ouvriers de l’ITIE » séjournent à Banfora pour parler questions minières. Plusieurs pays ont connu des guerres ou conflits à cause de l’exploitation des richesses du sous-sol. C’est pour éviter ces problèmes que le Burkina a décidé d’adhérer à cette initiative (ITIE). Le principe de l’ITIE veut que les sociétés déclarent ce qu’elles paient et les Etats déclarent ce qu’ils ont reçu. Le dernier rapport (2011) montre que l’Etat burkinabè a engrangé plus de 109 milliards de francs CFA en termes d’impôts et de taxes. L’on retiendra également qu’en 2011, les collectivités abritant des zones minières ont perçu environ 785 millions de francs CFA (dons et contributions volontaires).

Au nombre des sociétés minières prises en compte dans le rapport 2011, il y a la société Gryphon mining qui opère dans la région des Cascades, plus précisément dans les communes de Dakoro, Loumana et Niankorodougou. C’est d’ailleurs la raison qui a sous-tendu la tenue de cette rencontre de présentation du document à Banfora.

Après la présentation du document, les panélistes ont dû répondre à un « livre de questions ». Et, les questions embrassent tous les aspects de l’exploitation minière (le relogement des populations, les quantités d’or exploité, expropriation des terres, l’après-mine, la restauration de l’environnement, les cahiers de charge, l’orpaillage traditionnel, les retombés financières pour les localités abritant les mines, mécanisme de reversement de la taxe superficiaire).

C’est l’étape de Banfora qui a mis fin à l’axe 2 de la tournée de dissémination du rapport ITIE-BF. Comme l’étape de Zabré, la satisfaction est au rendez-vous. « L’objectif était de rencontrer les populations cibles que nous avions identifiées. On a pu les rencontrer. La participation était d’un bon niveau et les questions très pointues auxquelles nous avons donné les réponses que nous pouvions. L’objectif du rapport, c’est de susciter des débats. De ce fait, nous pouvons dire que cette 2e étape encore est une satisfaction », soutient Sidiki Guiré, le chargé du rapport et du renforcement des capacités de l’ITIE. Seul bémol : le représentant des Organisations de la société civile n’a pas pu prendre part à cette tournée.

Moussa Diallo

Lefaso.net

Propos de quelques participants à l’atelier

Dayorma Ouattara, 2e adjoint au maire de la commune de Banfora

C’est une très belle initiative de venir informer et sensibiliser les différentes couches sociales de la commune sur l’ITIE qui œuvre pour la transparence dans les activités minières au Burkina. Etant donné que c’est une initiative qui tente d’instaurer la transparence, je pense qu’elle va promouvoir le développement durable.

Ce qui est déjà fait est très bien, mais il reste à organiser l’orpaillage pour permettre à l’Etat et aux collectivités locales de profiter de ces ressources minières. Nous sentons qu’à ce niveau, il y a beaucoup de déperdition.

Lassina Coulibaly, président de la commission environnement et développement local de la commune de Banfora

Je suis un ancien mineur de Poura. Je veux dire qu’effectivement, l’or du Burkina n’est pas bien géré. Pas du tout. On prend les grandes industries avec des programmes bien faits, mais en réalité l’orpaillage traditionnel nous cause de problèmes sérieux. Dans la zone de Banfora, on ne sait même pas le nombre de sites d’orpaillage. Il y en a tellement. Et, il y en a qui sont de gros calibres qui viennent avec des autorisations, on ne sait d’où, et ils commencent à exploiter sans venir voir les responsable locaux. Actuellement, si tu rentre dans nos villages, toutes les terres sont perforées, les arbres coupés, l’environnement détruit. Et quand on entend qu’il y a un grain d’or quelque part, tout le monde fuit vers là-bas. On part détruire et on repart vers un autre coin encore. A cette allure, en fin de compte, on ne pourra pas s’en sortir. Il faut revoir ce côté, je crois que c’est très important. Si on est là qu’on veut l’or et on est en train de détruire l’avenir de nos enfants, ça ne va pas. On vivait sans or avant. Maintenant qu’il y a l’or, il faut bien organiser avant de commencer l’exploitation. On peut donner l’autorisation localement pour que nous, on interdise et on prend des dispositions qui sied avant de commencer. Je pense que notre or est très très mal géré. Mais, ce n’est pas tard, on peut mieux faire.

Mariam Bonkoungou/Sawadogo, coordonnatrice d’association : « Il faut être vigilant »

Je pense que cette rencontre est la bienvenue parce qu’il faut informer la population de tout ce qui se passe. On apprend qu’il y a de l’or dans notre pays, que ça fait rentrer de l’argent… donc il faut qu’on ait des informations précises là-dessus. Donc, il faut encore multiplier ces genres d’initiatives pour que toute la population du Burkina soit informée de tout ce qui se passe par rapport à l’or. Si on n’a pas l’information, on ne peut rien dire. On entend des rumeurs, on voit à la télé qu’on signe des conventions, mais en réalité qu’est-ce qui se passe. Je crois que c’est à cette question que l’équipe de l’ITIE est venue répondre et ça ne fait que nous éclairer.

Il faut être plus vigilant afin que ce qui est arrivé en Centrafrique n’arrive pas chez nous. On voit qu’il y a de l’or partout, il y a plein de sociétés minières qui viennent s’installer, il ne faut pas que les gens profitent de ça pour piller notre or. Je pense qu’il faut être vigilant dans tous les domaines et s’occuper beaucoup du domaine social. Je suis dans le domaine de l’éducation, je sais ce qui se passe. Il y a plein d’abandons scolaires surtout dans les zones où il y a des sites d’or. Il y a aussi la prostitution, il y a même l’excision qui se développe dans ces zones. Donc, il faut vraiment être vigilant.

Moussa Traoré, président de la commission économique et financière de la commune de Banfora :

« C’est ma première fois d’entendre parler d’ITIE. Le rapport présenté est celui de 2011. C’est vrai que vous parlez de N-2, mais je disais qu’actuellement, on devait avoir les informations de 2013. Mais, je suis très ravi parce que c’est une promotion que vous avez eu à faire. Vous êtes venus à la base passer l’information. Je souhaite que ça se répète. Nous qui avons été informé, c’est à nous aussi d’informer la population de tout ce qui se passe dans le domaine minier.

Il faut amener les sociétés minières à faire le goudron entre leur base et le chef-lieu de la région parce que tant que les voies ne sont pas goudronnées, il y a moins de trafic.

Au niveau de notre budget, on n’a pas d’indice concernant les mines actuellement. Pourtant s’il y a des retombés, nous devons faire ressortir ça. Mais on n’a rien vu jusque-là.

Le site de Gryphon mining ne fait pas partie de la commune de Banfora. C’est peut-être avec l’exploitation artisanale qu’on pourrait avoir un peu d’argent. Donc, il faut que l’Etat autorise les maires à agir afin que l’or profite à tous.

Bazona Aimé Bado, questeur de la mairie de Banfora : « Les gens n’ont pas été préparé à cette nouvelle dynamique »

Par rapport à cette question de l’or, on a eu beaucoup d’information sur les industries extractives, sur les différentes déclarations de paiement des parties prenantes dans ce processus. C’est une très bonne chose qui montre le degré de transparence avec lequel on veut gérer la question de l’or. C’est à encourager. Il faut donc travailler davantage à ce que ça soit bien fait. Il faudrait aussi que notre code minier soit relu au profit de nos populations financières.

L’exploitation soulève beaucoup de question environnementale et sociale parce que les gens n’ont pas été préparés à cette dynamique nouvelle qu’entraine la question de l’or. C’est une dynamique nouvelle en termes de population, de surpopulation, en termes de besoins en eau, de besoins en habitations… Les gens ont été du coup submergés. Une population qui n’avait pas l’habitude de l’extraction de l’or se retrouve subitement envahie par une autre qui a déjà cette expertise. C’est une dynamique nouvelle avec tout son pesant social, notamment les questions de prostitution, de vol, de grand banditisme… Si les populations avaient été sensibilisées en amont, elles pouvaient peut-être mieux réagir face à cette nouvelle dynamique.

Propos recueillis par Moussa Diallo

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