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Etats-Unis-Europe : La virtuose du piano joue un air apaisé

Publié le jeudi 10 février 2005 à 08h27min

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Quelque deux semaines après sa confirmation à son poste par le Sénat américain, la nouvelle secrétaire d’Etat américaine a entamé le 3 février dernier une tournée qui l’a conduite successivement à Londres, Berlin, Varsovie, Ankara, Jérusalem, en Cisjordanie, à Rome, Paris, Bruxelles et Luxembourg. Condoleezza Rice fait le tour du vieux continent pour plaider,...

...entre autres, l’engagement de tous en Irak afin de relever le défi de la reconstruction du pays après les élections du 30 janvier, ainsi que la poursuite des efforts pour l’apaisement entre Israéliens et Palestiniens et dans la région en général.

Comme on le voit, il s’agit pour Miss Rice de prendre langue avec l’Europe, aussi bien la nouvelle, portée aux nues par son collègue Donald Rumsfeld, que la vieille, vomie et honnie du fait de sa résistance à l’unilatéralisme américain.

Durant son périple, la dame de fer de Washington a certes magnifié les liens séculaires qui lient le Vieux Continent au Nouveau Monde et leur commun attachement à la démocratie, à la liberté et aux droits de l’homme, mais les motifs de conflits n’ont pas manqué pour autant.

Il y a par exemple le problème du nucléaire iranien ; et quelque peu la crise irakienne. Les alliés européens s’étant rangés bon gré mal gré derrière les positions américaines, mais aussi la crise israélo-palestinienne, dans laquelle, on le sait, les USA sont juge et partie.

Les différences d’approches entre l’Union européenne et l’Amérique sont parfois si grandes qu’on se demande si leurs positions sont conciliables, cela d’autant plus que "Condi", comme s’est plu à l’appeler Michel Barnier, le chef de la diplomatie française, n’est pas réputée être une colombe.

C’est même l’un des faucons de l’administration Bush, qui sait avoir la dent dure et le verbe impitoyable. N’est-ce pas elle qui avait déclaré après la guerre en Irak qu’il fallait "pardonner à la Russie, ignorer l’Allemagne et punir la France" ?

Coupable de s’être liguée pour empêcher l’invasion de l’Irak. Mais si l’hégémonie et l’unilatéralisme yankee ne sont pas rangés dans les placards du secrétariat d’Etat, la virtuose du piano, qui vient de s’y installer, veut, du passé, faire table rase, en jouant un air apaisé sur tous les sujets de discorde.

Il est d’ailleurs un point sur lequel les deux parties peuvent faire front, même si, jusque là, leurs attitudes respectives vis-à-vis d’Israël sont pour le moins divergentes : il s’agit, on l’aura compris, du conflit au Proche-Orient, où les espoirs de paix n’ont jamais été aussi grands que depuis la mort de Yasser Arafat et l’élection de Mahmoud Abbas le 9 janvier 2005 à la tête de l’Autorité palestinienne.

L’un était présenté comme le principal obstacle à la paix, l’autre, sinon comme une colombe, à tout le moins comme un modéré avec qui tout devient possible.

Il est vrai que les signes de bonne volonté se multiplient derrière les grillages et le mur de sécurité. On a même eu droit mardi dernier à Charm el Cheikh à une poignée de main, certes pas particulièrement chaleureuse, mais une poignée de main quand même entre Abou Mazen et Ariel Sharon.

C’était lors du sommet sur la paix au Proche-Orient, convoqué dans cette station balnéaire égyptienne sur les bords de la mer Rouge. Les deux hommes devraient d’ailleurs se revoir en tête-à-tête à Ramallah dans les prochains jours.

Certes on est encore très loin d’une entente cordiale, encore moins d’une paix entre ces ennemis de toujours, tant le mur de haine et de défiance est haut.

Mais c’est déjà un signe encourageant, car, pour le moment, il faut avoir des ambitions modestes, qui consistent à renouer le fil du dialogue, interrompu depuis belle lurette, avant d’entamer de véritables négociations qui déboucheraient sur la création d’un Etat palestinien viable aux côtés de l’Etat hébreu sécurisé.

Il faut aller au-delà des mesures cosmétiques actuelles, qui consistent à vouloir démanteler des colonies à Gaza quand, ailleurs, d’autres colons s’implantent ou poussent des racines ; arrêter de détruire maisons et vergers, d’asphyxier des Palestiniens contenus dans des ghettos, sans quoi l’arrêt des violences, que le nouveau président de l’Autorité palestinienne est parvenu à instaurer dans les territoires, fera long feu.

Le Hamas n’a-t-il d’ailleurs pas déjà déclaré qu’il ne se sentait pas engagé par les concertations de Charm el Cheikh ?

Si donc on ne veut pas fragiliser Mahmoud Abbas et faire le jeu des faucons des deux camps, il faut s’engager résolument sur le chemin de la paix, certes escarpé, mais salutaire, y compris pour les Etats-Unis. Cela, Condoleezza Rice le sait ; ses alliés européens aussi.

Voilà donc qui devrait les rapprocher au lieu de ces éternels fuites en avant qui ne font l’affaire de personne. Car si l’image de l’Oncle Sam est aussi détestable dans le monde et particulièrement dans le monde arabo-musulman, c’est, entre autres griefs, à cause de son soutien inconditionnel et aveugle à Tel-Aviv.

Kader Traoré
L’Observateur Paalga

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