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Entretien des zones humides au Burkina : Naturama appelle à une mobilisation autour de la cause

Publié le dimanche 27 avril 2014 à 23h51min

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Entretien des zones humides au Burkina : Naturama appelle à une mobilisation autour de la cause

Permettre aux journalistes de renforcer leurs capacités sur les questions de conservation des zones humides et sur les problématiques auxquelles font face ces zones ; c’est à cette fin que l’ONG Naturama, en partenariat avec l’association Média Vert, a conduit les 24 et 25 avril 2014, une visite de presse au niveau du lac Higa et de la mare d’Oursi. La présente sortie a également été l’occasion pour les Hommes de média d’appréhender au mieux les menaces qui planent sur les oiseaux – sédentaires comme migrateurs – pourtant facteurs de l’importance internationalement reconnue aux sites visités.

La mare d’Oursi et le lac Higa, sont deux retenues d’eau d’apparition naturelle dans le sahel Burkina. Il s’agit de zones humides qui abritent d’importantes ressources fauniques dont des oiseaux migrateurs en provenance de l’Europe. Et c’est sans doute au regard de ces potentialités qu’ils jouissent, respectivement depuis 1990 et 2009, d’une reconnaissance internationale en tant que zones humides. En effet, la mare d’Oursi et le lac Higa sont inscrits – avec 13 autres sites de notre pays - sur la liste Ramsar des zones humides d’importance internationale. Une liste établie par la ‘’Convention relative aux zones humides d’importance internationale particulièrement comme habitats des oiseaux d’eau’’ adoptée en 1972 dans la ville iranienne de Ramsar et entrée en vigueur le 1er octobre 1986, avec pour objectif majeur d’encadrer la conservation et la gestion rationnelle de telles zones ainsi que les ressources qui s’y trouvent. Un site inscrit sur cette liste appartient désormais et au pays qui l’abrite, et à la communauté internationale. D’où il ressort que l’entretien de la mare d’Oursi et du lac Higa incombe aussi bien aux populations riveraines, à l’Etat burkinabè, qu’à la communauté internationale, qui ont tous des droits sur ces sites. Ils doivent surtout conjuguer leurs efforts pour les protéger contre les menaces de disparition.

Mais tel ne semble véritablement pas être le cas. Le moins que l’on puisse dire sur la base du constat fait ces 24 et 25 avril 2014 dans le cadre de la visite de presse, c’est que ces deux zones humides du sahel Burkina sont sous une menace multidimensionnelle qui, visiblement, ne date pas d’aujourd’hui. Une menace de disparition sur fond d’ensablement, de déboisement abusif des berges, d’exploitation difficilement supportable qu’exercent l’Homme et le bétail, d’émergence de plus en plus forte de nénuphars hostiles à la pureté des eaux, de destruction des habitats d’oiseaux.

Et c’est surtout pour contrer cette dernière dimension de la menace et rendre lesdites zones plus profitables aux populations riveraines, que l’ONG Naturama - grâce à l’appui financier de la loterie nationale hollandaise - conduit depuis 2011, un projet pilote intitulé « Amélioration des habitats des oiseaux migrateurs et des moyens de subsistance au Sahel ». Assise sur une démarche dite de « faire faire », la mise en œuvre dudit projet associe également les autorités locales de chaque site. En effet, non seulement un groupe de soutien a été installé, formé et équipé sur chaque site d’intervention du projet, mais aussi un Comité de suivi réunissant entre autres le Secrétaire général de la région concernée, le Haut-commissaire de la province, les autorités communales, chapeaute le suivi des activités sur le terrain. Tous ces acteurs s’activent pour faire en sorte que ce projet permette de contribuer à l’amélioration des habitats naturels des oiseaux sédentaires dans le sahel, et à y maintenir les populations d’oiseaux migrateurs saines, stables ou en augmentation. A cet effet, l’un des préalables consiste en l’identification – dans le cadre d’inventaires réguliers - des espèces d’oiseaux sur chaque site.

Des milliers d’oiseaux sans abri au niveau du lac Higa

C’est ainsi qu’un inventaire réalisé entre mars 2012 et mars 2014 a permis d’identifier au niveau du lac Higa, 98 espèces d’oiseaux savanicoles dont 81 espèces africaines et 17 espèces migratrices d’origine européenne. Incontestablement, ces oiseaux donnent de voir en ce lac, le mérite de zone humide d’importance internationale.

Situé dans la province du Yagha et plus précisément dans la commune rurale de Tankougounadié, le lac Higa s’étale sur environ 4 kilomètres de long et sur une largeur d’environ 700 mètres. Il est à une quinzaine de kilomètres de la frontière du Burkina Faso d’avec le Niger, deux pays voisins qui ont été servis le 16 avril 2013 en décision de la Cour internationale de justice (CIJ) relativement à un litige frontalier qui les opposait. Mais, rassure le Secrétaire général de la province du Yagha, Abdoul-Manguidou Ouédraogo, « le lac Higa n’est pas touché » par cette décision dont l’exécution devra engendrer quelques pertes de portions territoriales de part et d’autre.

Il n’y a donc pas d’inquiétude quant à l’existence intégrale du lac Higa sur le territoire burkinabè. Un lac qui a un volume de stockage annuel estimé à 4 500 000 m3. Mais au constat le 25 avril dernier, il est à 1/3 sec. Pire, sa pauvreté en végétation force la pitié à l’égard des oiseaux qui ne désemplissent toutefois pas ses abords.

Une steppe sous forte animation d’oiseaux

Quant à la mare d’Oursi, elle est située dans la province de l’Oudalan et précisément dans la commune rurale dont elle porte le nom. D’un bassin versant de 25 900 km², c’est une mare qui, au jour du 25 avril 2014, a été retrouvée presqu’entièrement sec. Mettant ainsi des milliers de ruminants et d’oiseaux dans le désarroi. En effet, selon une source documentaire de l’ONG Naturama, des inventaires réguliers réalisés entre mars 2012 et mars 2014 ont permis de recenser 74 espèces d’oiseaux savanicoles dont 59 espèces africaines et 15 espèces migratrices d’origine européenne. Ces oiseaux disposent quand même d’une steppe arbustive et arborée avec des fourrés qui présentent une disposition parallèle alternant avec des espaces dénudés, et des dunes légèrement couvertes d’herbes. A l’approche de cette steppe, c’est un véritable foisonnement de chants d’oiseaux qui accueille ; un cadre à cacophonie qui force l’admiration pour les oiseaux. Du reste, le lac Higa et la mare d’Oursi, Birdlife international aussi les a identifiés comme étant des zones d’importance pour la conservation des oiseaux.

Restauration des habitats et planification de la gestion comme palliatifs

Et si, comme le relève Prudence Tankoano, le Chargé du suivi écologique dans le cadre du projet en cours, les prélèvements ne constituent pas encore une véritable menace à même d’influencer négativement les populations d’oiseaux, la destruction des habitats l’est. Une destruction qu’engendre notamment la disparition persistante des végétations aquatiques et marécageuses.
En réponse à cette disparition regrettable, Naturama a entrepris de scarifier d’importantes superficies de terres riveraines de ces zones humides, dans l’optique de restaurer des sols fertiles et donc propices aux espèces herbacées et arborées et/ou arbustives. Toute chose qui permettrait aux oiseaux de disposer d’habitats naturels, gages de survie sereine et d’augmentation de leurs populations.
Malheureusement, et à en croire Adama Nana, directeur des études au sein de l’ONG Naturama, par ailleurs coordonnateur du projet ‘’Amélioration des habitats des oiseaux migrateurs et des moyens de subsistance au Sahel’’, la récupération des espaces arides dans des zones de fortes pressions pastorales comme celles de la mare d’Oursi et du lac Higa, prend beaucoup de temps. En tout cas, l’incidence de l’action de Naturama dans ce sens – sur 50 ha pour les deux sites réunis - est encore loin du compte.

En plus de cette stratégie de récupération des terres, M. Tankoano préconise la mise en œuvre d’un plan d’aménagement et de gestion véritablement participative de ces zones humides. Déjà, l’autre constat est celui d’une parfaite collaboration entre Naturama et les autres acteurs intervenant dans la mise en œuvre du projet dont la présente phase devra prendre fin en 2015. Et en termes de perspectives, en sus de la consolidation des acquis, l’extension de l’intervention à d’autres sites Ramsar du pays, est annoncée. C’est du moins, ce qu’a confié M. Nana avec précision à l’appui, « un processus de réflexion est en cours ».

Au-delà, relève M. Nana, il est impératif - au regard de l’état actuel de dégradation avancée du lac Higa et de la mare d’Oursi - que l’Etat burkinabè et la communauté internationale s’investissent vraiment, à la fois dans la préservation et dans le rayonnement de ces zones humides à importance multidimensionnelle conventionnellement établie pour les oiseaux. Mieux, l’importance de ces sites est incontestablement générale, tant elle est effective pour l’Homme, l’arbre, et l’animal.

Fulbert Paré

Lefaso.net

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