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Myriam Yelkouni/Ouédraogo expert-comptable, Commissaire aux comptes : « La profession d’expertise comptable reste encore majoritairement masculine en France »

Publié le jeudi 31 octobre 2013 à 14h00min

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Myriam Yelkouni/Ouédraogo expert-comptable, Commissaire aux comptes :  « La profession d’expertise comptable reste encore majoritairement  masculine en France »

Troisième d’une famille de sept enfants, elle est née à Lyon et à grandi à Ouagadougou jusqu’à l’age de 20 ans. Elle vit en France depuis 1993 avec son mari et ses deux enfants. Du haut de ses 40 ans, elle force l’admiration et le respect dans un domaine encore très majoritairement masculine même en France : l’expertise comptable. Immigrée et femme « en plus », seule la compétence compte. Il s’agit de Myriam Yelkouni, expert-comptable à Lyon. Rencontre !

Amener les enfants à l’école, s’occuper des activités parascolaires, s’occuper du foyer, bref…, malgré toutes ces occupations, le temps ne manque pas à Myriam Yelkouni pour traiter avec brio les dossiers comptables que lui soumettent ses clients. Titulaire du Baccalauréat série D obtenu en 1993 à Ouagadougou, elle revient en France d’où elle était partie avec ses parents, pour poursuivre ses études universitaires en Ecole de Commerce. « Pour diverses raisons, je me suis orientée vers l’expertise comptable, métier que je connaissais un peu de par mon père qui est aussi expert-comptable de profession et dans lequel j’ai baigné depuis mon enfance sans pour autant en connaître les détails », dit-elle. Des détails, qui aujourd’hui, constituent un quotidien pour elle. Bien avertie des questions comptables, elle a pris son envol en suivant tout simplement les pas de son père. Et, dit-elle : « Ce n’est pas mal ». Elle qui compte 16 ans d’expérience dans le domaine à nos jours.

Prendre son destin en main

C’est à Nantes en France qu’elle a débuté son parcours professionnel comme collaboratrice comptable. Pour des raisons de famille, elle déménage avec mon époux à Lyon (sa ville natale) en 2008 où elle va toujours continuer à travailler dans différents cabinets d’expertise dont un d’envergure internationale. Elle explique qu’au bout de 15 ans d’expérience : « j’ai ressentie le besoin de poser ma plaque et de faire ma propre expérience en ayant ma propre clientèle ». Ainsi est née alors « Alliance Comptabilité Audit et Conseils (ACAC) », son cabinet d’expertise comptable qui forge bien son chemin. Les choses n’ont pourtant pas été autant faciles. « Dans mon parcours, j’ai dû mené de front ma vie de famille et mon travail. En effet, c’est pendant mes études que j’ai eu mes enfants. Ce qui n’était pas du tout facile. Il fallait aussi faire le stage d’expertise comptable et passer le diplôme. J’ai donc géré en même temps mon poste de collaboratrice en cabinet, le stage avec la contrainte de la rédaction du mémoire, la grossesse et un enfant. Je pense que j’ai bien fait de m’accrocher. Je suis expert-comptable depuis fin 2011, et c’est une réelle victoire » raconte-elle.

Femme africaine et expert-comptable en Occident !

« Ouvrir sa propre entreprise dans un pays étranger n’est pas une mince affaire, reconnaît Mme Yelkouni. Et quand on devient soi-même chef d’entreprise, il faut mettre les bouchées doubles ». « Alliance comptabilité Audit et Conseil » a été un challenge de vie qu’elle dit avoir réussi avec le soutien de son père, et de son époux sans lequel, confie-t-elle : « Je n’aurai pas pu mener cette activité. Parce que quand on est entrepreneur, on n’a pas la même rémunération qu’en tant que salarié et du coup, il est primordial d’avoir le soutien moral et financier du conjoint ». L’entreprise marche pour le mieux, et Myriam compte aujourd’hui une clientèle d’origine africaine et européenne.

Une profession encore très majoritairement masculine en France

La profession d’expert-comptable est encore très majoritairement masculine en France. Pour preuve, seulement 30 % de la population des experts-comptables est féminine. Ce n’est pas beaucoup. L’impact n’est cependant pas seulement au sein de la profession, mais c’est surtout vis-à-vis du client. Souvent en tant que femme et africaine de surcroît, « nous sommes parfois un peu cataloguée », dit-elle, ajoutant : « on nous imagine d’emblée dans des métiers de ventes de produits exotiques, coiffeuse, etc. » Il faut donc parfois montrer sa carte de visite, expliquer qu’on est inscrit auprès d’un Ordre professionnel. C’est après un traitement technique des dossiers que les clients se rendent compte des compétences. Il faut faire plus d’efforts, être encore plus intransigeant et plus rigoureux dans le métier, pour prouver ses compétences. Bien que les choses aient énormément évoluées, il y a existe encore des préjugés sur les femmes africaines en Europe.

Une grande ambition : faire grandir ACAC

Des projets ne manquent pas, à en croire dame Yelkouni. Dans l’immédiat, elle souhaite faire grandir son cabinet. Elle veut, à moyen terme, installer une activité d’expertise comptable et de commissariat au compte au Burkina. Mettre en place une structure associative pour aider les jeunes femmes en auto-entrepreneuriat, en les accompagnant sur la gestion administrative et comptable de leur projet et leur entreprise est aussi une de ses ambitions. Qu’en est-il de son avis sur ce qui fait la femme ? Elle répond : « la femme est l’élément central de la famille, mais il revient aux femmes de prendre conscience de leur capacité, leurs valeurs. Il faut qu’elles s’affirment, car personne ne viendra vanter leurs mérites ». C’est pourquoi, elle demande aux jeunes filles d’avoir confiance en elles, et oser entreprendre. « Il ne faut pas réfléchir par rapport à quelqu’un d’autre. Intrinsèquement, elles doivent réfléchir à ce qu’elles veulent donner comme sens à leur vie et ce qui les anime réellement », conseille-t-elle, tout en exprimant une satisfaction quant à l’amélioration de la situation des femmes au Burkina, car elles n’attendent plus qu’on leur « apporte à manger ». Elles se battent pour avoir leur propre revenu.

Bassératou KINDO

L’Express du Faso

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