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Développement : et si on supprimait l’aide à l’Afrique ?

Publié le mercredi 19 janvier 2005 à 07h40min

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Les milliards de dollars d’aide déversés sur l’Afrique ne sont toujours pas parvenus à amorcer le processus de développement du continent noir. La plupart des Etats africains sont des loosers, très peu ont pu sortir la tête de l’eau après plus de 40 ans d’indépendance et d’aide. Cette forme de coopération internationale aura fait la preuve de son échec.

Et si l’on changeait de stratégie pour sortir la mère Afrique de sa torpeur ? Car autant on change ou recompose invariablement une équipe qui ne gagne pas, autant on pourrait changer de schéma pour développer l’Afrique, en cessant par exemple de l’aider.

La solution pour le continent africain serait de le responsabiliser, en le laissant à lui-même. Il faut l’obliger à trouver en son propre sein les moyens de son développement économique et social ; son orgueil doit être chatouillé. Dos au mur, l’Afrique pourrait être capable d’un sursaut jusque-là insoupçonné. Les grandes idées naissent généralement des situations difficiles. Sur le plan intellectuel par exemple, les Africains ont produit leurs meilleures oeuvres artistiques et littéraires sous l’oppression coloniale. Il pourrait en être des réalisations socio-économiques comme il en a été des oeuvres de l’esprit.

Sans possibilité d’appui extérieur, les Etats seront obligés d’utiliser judicieusement le peu dont ils disposent, en recentrant les priorités. Et celles-ci ne pourront aller que vers les secteurs producteurs de richesses. Ce sera l’occasion pour les gouvernants et les peuples africains de se rappeler et surtout de suivre l’exemple des pays qui ont réussi leur décollage économique à partir de rien. Le développement réside dans la méthode et le travail. Sinon un pays comme la République démocratique du Congo (très riche en ressources naturelles) serait plus prospère que le Japon (au sous-sol pauvre) et le Gabon surplomberait la Suisse dans l’indice du développement humain durable.

L’aide constipe l’inspiration : à quoi bon se casser la tête à réfléchir sur les moyens de s’autofinancer, si l’on peut solliciter et obtenir de Paris ou de Londres, de l’aide ? Dans son fond, l’aide aliène ; elle asservit. Elle rend dépendantes les politiques nationales, des pays donateurs. Qu’est-ce que l’indépendance politique, si elle n’est pas accompagnée d’une indépendance économique ? Dans sa forme actuelle, l’aide est inopérante. Elle maintient parfois sous perfusion des Etats peu viables qui s’enorgueillissent cependant de leur indépendance. Sans elle, ceux-ci seront obligés de se fondre dans de grands ensembles économiquement viables. L’Europe n’offre-t-elle pas le meilleur exemple dans ce domaine ?

Au moment où les Européens suivent sur écrans géants les photos de Titan, prises à plus d’un milliard de km de la terre, et où ils inaugurent des avions capables de transporter en une seule fois tous les habitants d’un département burkinabè, en Afrique, l’équation quotidienne à résoudre pour bon nombre de ses habitants est de trouver à manger et à boire. Si la géhenne existe vraiment, l’Afrique doit en être une succursale. Tous les maux s’y retrouvent : guerre, famine, maladie, etc. Ceux qui sont certains d’aller en enfer après le jugement dernier peuvent venir s’acclimater en Afrique.

La coupure de l’assistance au continent noir pourra être remplacée par un plan Marshall, qui sera l’ultime geste de la communauté internationale pour sortir l’Afrique de son sous-développement chronique. Ce plan a aidé à la reconstruction des deux grands perdants de la deuxième guerre mondiale, l’Allemagne et le Japon. Cette idée de Tony Blair est à mettre au compte du pragmatisme anglo-saxon. Les Etats-Unis par exemple mettent plus d’accent sur l’aide aux infrastructures porteuses de développement, que sur l’assistance financière. Leur appui est structurel et structurant.

L’idée d’AGOA (Africa grouth and opportunity act) qui favorise l’accès au marché américain de certains produits du Sud, représente l’un des coups de fouets dont les Etats africains ont besoin pour se développer. A d’autres égards, les règles du commerce international doivent être redéfinies pour permettre à l’Afrique de tirer le maximum de revenus possibles de ses matières premières. Il en est de même de la détérioration des termes de l’échange et des subventions aux producteurs européens et américains.

Il reste maintenant à savoir si l’Occident veut véritablement du développement de l’Afrique. Une Afrique sans défense, fragile, dépendante est bien plus accommodante. C’est un réservoir de voix pour appuyer les décisions occidentales au sein des institutions internationales. Mais à la guerre comme à la guerre. Il appartient aux Africains de tracer eux-mêmes leurs propres schémas de développement. Et on rendrait un grand service à l’Afrique si on lui apprenait à pêcher, plutôt qu’en lui donnant indéfiniment du poisson.

Le Pays

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