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Charles Taylor transféré en Grande Bretagne : Les Etats africains ont-ils encore raté l’occasion de s’assumer ?

Publié le mercredi 16 octobre 2013 à 23h35min

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Charles Taylor transféré en Grande Bretagne : Les Etats africains ont-ils  encore raté l’occasion de s’assumer ?

Après sa condamnation définitive, l’ex-président libérien, Charles Ghankay Taylor a été transféré le 15 octobre 2013, en Grande Bretagne où il devra purger sa peine. Ce transfèrement intervient dans un contexte africain teinté non seulement de méfiance vis-à-vis de la Cour pénale internationale, mais aussi de velléités de maintien des délinquants du continent sur place.

Jugé le 26 avril 2012 coupable de 11 chefs d’accusation rangés en crimes de guerre et crimes contre l’humanité, l’ancien président libérien a été condamné à 50 ans d’emprisonnement ferme. Cette condamnation devenue définitive le 26 septembre dernier cinq ans après l’ouverture du procès, c’est la Grande Bretagne qui l’a accueilli pour qu’il purge cette lourde peine. En effet, le Tribunal pénal spécial pour la Sierra-Léone qui l’a jugé et condamné, a signé en 2007, un accord par lequel les autorités britanniques ont pris l’engagement d’offrir un exil carcéral à Charles Taylor ; les Pays-Bas ne voulant pas le garder. C’est donc conformément à cet accord que le transfèrement du 15 octobre 2013 s’est opéré.

L’ex-président libérien accusé d’avoir aidé et encouragé entre 1991 et 2002, les rebelles sierra-léonais du Front révolutionnaire uni (RUF) en leur fournissant armes et munitions en échange de diamants, est aujourd’hui âgé de 65 ans. Il devra ainsi passé le reste de sa vie derrière les barreaux, loin de l’Afrique. Et ce, en dépit de son souhait de passer sa vie carcérale dans un Etat africain.

Charles Taylor a, en effet, en date du 10 octobre 2013, adressé une lettre au Tribunal qui l’a condamné, dans laquelle il a émis le souhait de purger sa peine au Rwanda. Il veut, semble-t-il, tout en purgeant sa peine, se sentir proche de sa famille. Et l’autre raison, c’est qu’il dit craindre pour sa sécurité en Grande Bretagne, l’autre bailleur de fonds en plus des Etats-Unis d’Amérique, du Tribunal pénal spécial pour la Sierra-Léone. Serait-ce de façon désintéressée que la Grande Bretagne a ainsi mobilisé des milliards de dollars ? L’on peut bien se poser cette question.

Le Rwanda ira-t-il jusqu’au bout ?

De l’autre côté, saisi de cette lettre du 10 octobre, le gouvernement rwandais promet de l’étudier. Prendra-t-il la décision courageuse de faire ramener l’ex-président libérien sur le continent ? Rien n’est moins sûr. En tout cas, le faire, ce serait en son honneur. Mieux, cela ferait honneur à tous les Etats africains qui, en plus de s’ériger massivement contre la justice internationale, en l’occurrence version CPI, souhaitent que les délinquants africains, quels qu’ils soient, soient jugés et incarcérés sur le continent.

Dans cette posture, si nos chefs d’Etat veulent vraiment rompre avec la culture de l’impunité, il faudrait qu’ils présentent, à tout le moins, des gages sûrs de procès bien conduits à terme, quand on sait que ce ne sont pas les graves violations des droits de l’Homme qui vont manquer. Et l’offre de cadre carcéral serait, nous semble-t-il, la moindre des choses dans cette dynamique.

La vie carcérale de Charles Taylor est-elle trop dispendieuse pour nos Etats ? L’homme Taylor fait-il peur à ses ex-compagnons ? Ces interrogations méritent de retenir l’attention face au refus ou à tout le moins, au manque d’empressement pour accueillir l’ex-président libérien. Et si les choses restent en l’état, les pays africains auront encore raté l’occasion de s’assumer.

Fulbert Paré

Lefaso.net

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