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Crise ivoirienne : raison d’une manœuvre dilatoire

Publié le mardi 18 janvier 2005 à 06h59min

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Les réactions constatées au sein de la classe politique ivoirienne au lendemain du sommet de Libreville, ne laissent pas augurer un retour rapide de la paix en Côte d’Ivoire.

Une situation dont est en grande partie responsable le camp présidentiel pour des raisons diverses allant d’une absence de légitimité à une gestion politique et économique catastrophique.

Si la volonté de sortir de la crise ivoirienne existait vraiment, alors le sommet de Libreville du 10 janvier dernier, n’aurait jamais dû se tenir. Car, après le Sommet d’Accra III du 29 juillet 2004, toutes les conditions étaient réunies pour ramener la paix en Côte d’Ivoire. Le nœud gordien de la crise, à savoir les conditions d’éligibilité à la magistrature suprême avait, en effet été dénoué.

Il avait été convenu que l’article 35 serait révisé par la voie législative et que le président de la République devait user de ses pouvoirs spéciaux pour promulguer la nouvelle loi. Nulle part n’était ressorti l’idée d’un référendum pour ce faire, même si les tambours-majors et les faucons du FPI exigeaient celui-ci dans leurs discours. La tactique du chaud et du froid usitée depuis le déclenchement de la crise par le camp présidentiel était une fois de plus remise au goût du jour.

Et Gbagbo qui en est le concepteur et le maître d’œuvre s’engouffrera dans la brèche pour s’asseoir sur la nouvelle volonté manifestée à Bamako II puis à Accra III pour exiger le référendum. Thabo Mbeki, le dernier négociateur commis à la tâche par l’UA et qui ne connaît pas, ne lui en déplaise toutes les péripéties du dossier ivoirien, s’est laissé prendre par les belles paroles "nationalistes" du président ivoirien. Gbagbo a en effet, convaincu Mbeki le combattant de l’ANC que la Côte d’Ivoire livrait une "guerre de libération" contre l’impérialisme français et ses relais sous-régionaux.

Pourquoi cette fuite en avant

Une réthorique qui ne pouvait laisser indifférent l’héritier des luttes de l’ANC qui a presque vu dans le président ivoirien, un héros.

En fait de héros et de libérateur, le président ivoirien n’est qu’un homme entré par effraction dans l’histoire de son pays et qui, depuis, s’est caractérisé par une gestion politique et économique désastreuse.

Héritier d’un pays à bout de souffle économiquement (le boom du cacao n’a pas servi à moderniser les structures économiques), Gbagbo a accentué la tendance en siphonnant les caisses de l’Etat.

Dans sa "folie sécuritaire", il n’a pas hésité à s’armer à coup de milliards, persuadé que la Côte d’Ivoire avait été attaquée parce qu’elle "n’avait pas d’armée".

Et comme il faut des hommes pour manier ces armes, des mercenaires ont été aussi recrutés et sont payés grassement par un régime qui a peur de sa propre ombre. Avec le clientélisme développé par Gbagbo (prédicateurs, "marabouts", "jeunes patriotes" etc.), ce sont d’autres fonds du trésor public qui sont utilisés pour des intérêts partisans.

Comme sa politique xénophobe a désorganisé la filière café-cacao en chassant les vrais producteurs (ceux-ci sont des étrangers pour la plupart), d’une part et en laminant le secteur des PME-PMI, de l’autre (un secteur où les "Blancs" étaient majoritaires), le pays ne pouvait s’engager que sur la voie de la récession économique. Lassées par les nombreuses tracasseries dont elles sont l’objet, beaucoup d’ONG préfèrent désormais investir en zone "rebelle" (entendez au Nord) ou leur sécurité est garantie.

Si le désastre est économique, il est aussi politique et se manifeste par le refus du dialogue qui a conduit à de nombreuses dérives. "Mal élu" selon ses propres propos, Gbagbo a dû recourir à la force pour se maintenir

Dès octobre 2000, il se "légitimait" dans le sang en massacrant des manifestants qui exigeaient la reprise de l’élection présidentielle.

Le charnier de Yopougon inaugurait une longue parenthèse de sang jusqu’au 19 septembre 2002 où les "moutons" ne voulaient plus se laisser tondre. La dérive répressive atteignait son paroxysme avec des massacres savamment planifiés et exécutés. Après les 24 et 25 mars, l’ONU produisait un rapport non-équivoque sur la responsabilité du camp présidentiel dans ces pogroms. Pour en revenir au marasme économique, disons qu’il est tels que les producteurs de cacao commencent à ne plus voir la couleur de leur argent.

Les caisses de l’Etat étant vides, il ne reste plus que l’argent du cacao et les taxes portuaires pour éviter la banqueroute et payer tous les parasites qui maintiennent le régime à bout-de-bras. Le plus grand danger pour Gbagbo viendra peut-être de ce côté car, les honnêtes producteurs ne pourront plus supporter que l’on vole ainsi leur argent en toute impunité.

En attendant cette occurrence, Gbagbo ne peut donc que se maintenir au pouvoir par tous les moyens, car sa chute (qui est évidente en cas d’élections ouvertes et transparentes) entraînerait son "transfert" devant le Tribunal pénal international. Il ne peut donc qu’user de manœuvre dilatoire tel que ce référendum impossible à tenir dans un pays divisé en deux.

Or, pas de référendum, pas d’élections. Conclusion, le boulanger reste au pouvoir et continue de rouler tout le monde dans la farine. Il n’y a cependant pas de quoi désespérer, car, "c’est celui qui est pressé qui achète la tête du chien". La paix se fera un jour en Côte d’Ivoire.

B. SY
Sidwaya

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Vos commentaires

  • Le 18 janvier 2005 à 22:28, par Beret Ouadraogo(Koudougou) En réponse à : > Crise ivoirienne : raison d’une manœuvre dilatoire

    Ces ecrits venant d’un partisan de Compaore ne peuvent surprendre personne ici au Burkina. Tu sais, a force de privilegier l’usage des armes pour tout resoudre et meme pour se debarasser d’un frere (Thomas Sankara, Nobert Zongo etc...) on oublie les voies les plus democratiques dont fait partie le Referendum.
    Alors honneur a Gbagbo qui veut organiser un referendum face a une opposition qui se reclame largement majoritaire. Ce monsieur a finit par me covaincre grace a son courage politique que tres peu de chef d’etat peuvent revendiquer.
    Aujourd’hui le vrai combat qui vaille la peine ,c’est d’unir nos forces pour que ce Referendum soit tres bien organise pour voir le poids politique reel du camp rebelle (G7)et celui du camp de Gbagbo.
    Puisse son courage politique inspirer notre president compaore qui s’enferme dans un desir d’eternite au pouvoir.

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