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Pouvoirs occultes et jeunesse : « Les pouvoirs occultes ne sont pas des « histoires ». Je suis prêt à initier tout jeune qui croit à nos us et coutumes » dixit Bandjougou Ben Diawara, Soma de profession

Publié le lundi 6 mai 2013 à 21h00min

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Pouvoirs occultes et jeunesse : « Les pouvoirs occultes ne sont pas des « histoires ». Je suis prêt à initier tout jeune qui croit à nos us et coutumes » dixit Bandjougou Ben Diawara, Soma de profession

Face au manque du respect des jeunes vis-à-vis des « us et coutumes », nous avons rencontré un jeune qui a fait de la défense de la culture africaine, son cheval de bataille. Bandjougou Ben Diawara, puisque c’est de lui qu’il s’agit, nous livre des témoignages, s’engage à partager son savoir avec toute personne prête à apprendre avec lui. Il fait une mise au point entre un Dozo, un Dandaga et un Soma. Lisez plutôt.

Qui êtes-vous, monsieur Bandjougou Diawara ?

Je suis le coordonnateur des Soma et Dozo de la région des Cascades. Je suis ici présent à Bobo, dans le cadre du « Djibon » de Richard Kaboré. Je suis venu lui apporter mon soutien afin que vivent nos us et coutumes.

Quelle est donc la différence entre un Soma et un Dozo ?

Un Soma et un Dozo ont les mêmes origines. Mais il y a nuance. Le Dozo est issu du « Dandaga ». Car lorsque le chasseur est en action, et qu’il va en brousse à la recherche de gibier, on l’appelle « Dandaga ». Quand il prend de l’âge, on l’appelle alors « Donso » (ndlr Dozo) (rentre à la maison). Donc, un « Dandaga » très expérimenté devient Dozo et reste au service de la population en matière de soins. On peut dans ce cas précis, l’appeler Soma. Car les produits qu’il utilisait en brousse pour faire face aux animaux dangereux et autres génies, il peut s’en servir pour guérir des maux, et c’est cette tâche qui est dévolue au Soma. Ce sont les Dozo devenus Soma qui forment alors les autres générations, comme nous, qui avons opté pour être Soma. Si vous voulez, le Dozo a souffert dans sa chair, par contre, le Soma apprend dans des conditions moins difficiles.

Vous venez de dire que vous êtes Soma. Pensez-vous que le Soma a toujours sa place dans ce monde régi par le modernisme ?

Je dirai que le Soma est de nos jours plus utile que le « Dandaga » et le Dozo, dans la mesure où les animaux constituent aujourd’hui une ressource à préserver. En ces périodes de modernité, il est effectivement difficile pour eux de mener à bien leur fonction. Le Dozo qui ne sait pas grand-chose en matière de soins, n’est pas très utile de nos jours. Car la chasse est très réglementée. Par contre le Soma qui traite les maladies, est chaque fois sollicité. Dans ces conditions, le Soma ne peut pas être déphasé malgré le modernisme.

Par ailleurs, je profite de vos lignes, pour interpeller les vieux qui vendent les fétiches à des gens nantis. Quand un fétiche est ainsi acquis, le nouveau propriétaire ne fait que chercher le profit et non la satisfaction des populations. Aussi voudrais-je dire aux maîtres du savoir de songer à l’avenir de nos valeurs qui disparaissent à cause des personnes cupides. A ce propos, mon maître m’a conté l’histoire de deux béliers. Un bélier noir et un autre blanc. Malgré le fait que le bélier blanc dominait le noir en poids et en rondeurs, il n’arrivait pas à vaincre le noir. Des gens se sont étonnés de cette scène. C’est alors que mon maître m’a fait savoir que l’avenir de nos valeurs traditionnelles est à l’image de ces deux béliers. Le noir qui symbolise le mensonge, vaincra la vérité que représente le blanc. De nos jours, ils se comptent sur les bouts des doigts, les Africains qui respectent les conditions requises par nos pouvoirs traditionnels.

Parlant du respect des conditions, est-ce que vous qui êtes dans la jeunesse de l’âge, vous pouvez remplir les conditions exigées ? Car la situation dont vous parlez est beaucoup plus causée par les jeunes qui acquièrent des connaissances mystiques grâce à l’argent.

Si je vous dis que j’ai fait trois mois dans la folie, allez-vous me croire ?
NON ! Ok. J’ai fait trois mois dans la folie. Sachez que le pouvoir que je détiens vient de ma mère. Si celle-ci te dit que la tombée de la nuit ne te trouvera pas en vie, tu mourras réellement. Si elle dit que le lever du jour ne te trouvera pas aussi en vie, ce sera vérifié. Nous avons un puits dans notre cour qui a complètement tari. Ma mère y a jeté une pierre sur laquelle elle a proféré un langage mystique. C’est dire que le pouvoir quand il est sincèrement acquis, le respect des règles y relatives est obligatoire.

Je suis diplômé en informatique. Je devais aller en Allemagne pour la suite de mes études. Les forces mythiques de ma mère ont exigé que ce soit moi qui lui succède. Ainsi, après mes trois mois de maladie mentale, j’ai appris beaucoup de choses avec elle. Après cette phase, j’ai appris à connaître le « Komon ». Grâce au « Komon », je connais les vertus de 107 arbres différents de nos jours. C’est vous dire que j’ai appris à distinguer les choses. Je ne peux que suivre la « ligne tracée » malgré mon jeune âge.

Parlons de cette affaire du Premier ministre mauritanien. De quoi s’agit-il au juste ?

En toutes choses, il faut savoir garder le secret. Tu me vois comme ça, j’ai installé plusieurs autorités en Afrique. Ceux qui en sont témoins, peuvent le confirmer. Mais ce n’est pas pour autant que je vais m’en vanter. Partout où je passe, ma présence est signalée par des actions concrètes. Grâce au « Komon », il y a beaucoup de choses que j’ai pu faire pour aider des gens qui me sollicitent. Les pouvoirs occultes ne sont pas des fantaisies.

J’ai fait enregistrer un message à l’intention de Diafar Héma qui traite les Dozo comme étant des personnes malpropres. Son papa à lui, paix à son âme, était un maître Dozo très respecté pour son engagement. Donc, il n’a pas à traiter les Dozo comme il le fait. Je suis d’accord avec lui qu’il y a des personnes qui « se font passer » pour des Dozo et posent des actes indignes, mais qu’à cela ne tienne ! Je pense qu’il n’y a pas d’amalgames à faire en la matière.

J’ai dit tantôt que je connais les vertus de 107 arbres différents. Quel fétiche peut-on fabriquer aujourd’hui sans l’un de ces 107 arbres ? Ceci pour dire que le « Komon » n’est pas un pouvoir à minimiser. La preuve est que bien de gens en ont profité pour être riches de nos jours. On les respecte partout où ils passent. Mais quand ils sont dans des « pétrins », ils courent nous solliciter pour une aide efficace. C’est vous dire que le fétichisme n’est pas que satanique. Le seul Satan, si je peux le dire, reste la femme sur cette terre. Que toutes les femmes m’en excusent. Car si une femme décide d’anéantir mon pouvoir aujourd’hui, elle peut le faire facilement. Donc, en dehors des pouvoirs de la femme qui restent immaîtrisables, le reste est gérable. Tous ceux qui se cachent derrière nos pouvoirs occultes pour « arnaquer » les gens ne font que salir le nom de tous. Sinon… Nous sommes très utiles pour la société.

Quel message à l’endroit de tous ceux qui ne respectent plus les us et coutumes ?

Quand un pouvoir est sincère, on n’a pas besoin de faire de la publicité. Il y a des gens qui viennent d’Europe pour demander mes services. J’ai toujours dit que, tant que le « Komon » continuera de soulager les peines des gens, moi Bandjougou, j’aurai toujours mon pain quotidien. Aucune somme ne peut me corrompre de nos jours. J’ai reçu des sommes importantes de part et d’autre. Tout ce qui est important pour moi, c’est de pouvoir résoudre les problèmes de mon prochain. Que chaque Soma en fasse un engagement pour que les arnaqueurs n’aient plus leur place dans notre confrérie.

Si tout va bien, je vais vous inviter à Banfora pour m’entretenir avec les jeunes en votre présence sur l’importance de nos us et coutumes. Sinon à cette allure, dix ans après notre génération, l’Afrique va perdre ces valeurs mystiques par manque de personnes initiées. Personnellement je ne souhaite pas mourir avec mon pouvoir. C’est pourquoi je vais organiser une rencontre populaire avec les jeunes afin de faire des démonstrations pour donner preuves à certaines réalités. Contrairement à beaucoup, moi je reste ouvert pour enseigner l’acquisition de ces « savoirs » à tout jeune qui voudra bien être formé dans le sens du bien. Nos us et coutumes ne sont pas « des histoires ».

Interview réalisée par Souro DAO
L’Express du Faso

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