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Proverbe du Jour : “Nous sommes lents à croire ce qui fait mаl à сrοirе. ” Ovide

Autant le dire… : Ainsi, on tue l’industrie et on fait des chômeurs

Publié le dimanche 24 mars 2013 à 22h16min

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Dans un supermarché, à la recherche d’un jus de fruits, j’ai dû fouiller pendant longtemps dans le réfrigérateur pour retrouver mon Dafani national, produit à Orodara, à base de mangues et d’oranges produites par nos parents, ces braves producteurs qui gagnent ainsi leur vie et celle de leurs familles.

Dans les rayons du même supermarché, comme dans bien d’autres, le Dafani, pur produit de chez nous, était encore plus noyé dans la flopée de jus de fruits aux couleurs et aux noms difficiles à retenir. Mieux, à la caisse, ces produits venus d’ailleurs coûtent moins chers que le Dafani. Comprenez que malgré la volonté du client de participer à l’effort des travailleurs et promoteurs de cette unité nationale de création d’emplois et de production de revenus, le choix est vite fait de prendre autre chose. Les surprises ne s’arrêtent pas là. Les emballages de certaines de ces marques de jus de fruits ne portent même pas de pays d’origine. Quant à la date de péremption inscrite sur le même emballage, il ne restait plus que quelques deux mois ou même moins pour y arriver.

Les producteurs d’huile alimentaire et d’aliments de bétail ont été obligés de monter au créneau ces temps-ci pour crier à la fraude, à l’entrée d’huiles sur le marché national. Ce qui crée naturellement, à leur niveau, de la mévente, et qui pourrait, si on ne prend pas de dispositions, avoir des menaces dangereuses et graves sur les emplois qu’ils assurent. Comme dans le cas des jus de fruits par exemple, ces huiles rentrent de partout sur le marché national et concurrencent les productions nationales d’huile. La Société africaine de pneumatiques (SAP) procède régulièrement à la destruction de pneumatiques fraudés et qui, une fois sur le marché national, mettent à rudes épreuves la production nationale de pneumatiques en même temps qu’ils menacent de disparition la nationale de production des pneus et chambres à air. Avec les emplois qui y sont liés. Les exemples sont nombreux et peuvent être multipliés à souhait.

Voici des produits qui entrent sur notre territoire, qui sont mis à la consommation sans que le client ne sache exactement de quels pays ils viennent. Voici des produits qui viennent d’ailleurs et qui, curieusement, coûtent moins chers que ceux qui sont produits sur place. Il y a un problème. Voici des produits qui viennent de pays qu’on ne connaît pas et dont la date de péremption pourrait être manipulée et qui malheureusement, menacent les emplois de nos frères et sœurs. Voici des produits importés par des Burkinabè et qui viennent malheureusement menacer de disparition le tissu industriel et économique du pays. Et le comble dans tout cela, est que chaque jour, ils en rentrent de plus belle.

En effet, les questions qu’on peut bien se poser, sont entre autres, de savoir si l’ouverture des frontières veut dire entrée tous azimuts de produits provenant de n’importe quel pays ? Est-ce que l’ouverture des frontières au marché mondial, sous-régional veut dire entrée frauduleuse de produits sur le marché national ; l’ouverture des frontières suppose-t-elle qu’on ne protège pas notre tissu industriel et économique surtout quand on sait que ce sont des emplois qui sont menacés et par ricochet le bien-être et la paix sociale ? L’Etat a été obligé d’intervenir très récemment pour sauver Dafani. Pourquoi ne prendrait-il pas des mesures pour la sauver davantage et assurer les emplois du personnel et les revenus des producteurs de mangues et d’oranges ? Ne peut-il pas, dans le même cadre, assurer la survie des unités industrielles de production d’huile alimentaire qu’il a soumises à un cahier de charges ? Puisqu’en le faisant, il assure la santé de la Sofitex auprès de laquelle il est intervenu plusieurs fois pour la remettre sur les rails. On peut bien s’ouvrir aux marchés extérieurs, mais pas au détriment des efforts nationaux de développement de l’industrie.

Dabaoué Audrianne KANI

L’Express du Faso

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Vos commentaires

  • Le 25 mars 2013 à 06:33, par AT En réponse à : Autant le dire… : Ainsi, on tue l’industrie et on fait des chômeurs

    Ma chère Kani,
    On peut comprendre parfaitement ton cri de coeur qui du reste est légitime, mais ce qu’il faut retenir c’est le lien ombilical entre le politique, l’économique et le social. On ne peut pas se complaire dans le manque notoire de moral en politique et croire que tout peut être rose dans les autres secteurs. Ce n’est pas possible, à moins de couper ce lien ombilical là.On aura beau rusé pendant longtemps, tôt ou tard, on sera rattrappé par la réalité des faits. Tant qu’on aura un système politique débridé, on aura toujours un tissu économique désarticulé et des conditions sociales difficiles. Acceptons donc courageusement un changement qualitatif à tout les niveaux.

    • Le 25 mars 2013 à 14:32, par micheline En réponse à : Autant le dire… : Ainsi, on tue l’industrie et on fait des chômeurs

      l’offre et la demande, rapport qualité/prix et accessibilité du produit en fonction des bourses. Explique alors pourquoi ces produits sont de plus bas prix de Danfani ? et pourquoi ils sont importés ? ben il y a de la clientèle, le marché existe. Si tout le monde réfléchit tel, on ne va plus exporter Danfani nul part.

  • Le 25 mars 2013 à 06:46, par tagsda En réponse à : Autant le dire… : Ainsi, on tue l’industrie et on fait des chômeurs

    Bien dit mais l’etat n’y est pour rien du moment ou le pauvre Burkinabé encourage la consommation des produits importés au detrima de nos produits locaux 100 pour 100 naturelle et de meilleur qualité. Si nous continuons a ouvrir plus de pharmacies que de donner des conseils sur ce que nous devons consommer pour rester en bonne santé le pire est inevitable

  • Le 25 mars 2013 à 07:15 En réponse à : Autant le dire… : Ainsi, on tue l’industrie et on fait des chômeurs

    " On peut bien s’ouvrir aux marchés extérieurs, mais pas au détriment des efforts nationaux de développement de l’industrie."

    voilà ce qui est bien Monsieur Kani.

  • Le 25 mars 2013 à 07:35, par Benji En réponse à : Autant le dire… : Ainsi, on tue l’industrie et on fait des chômeurs

    Merci à Dabaoué Adrianne KANi de L’Express du Faso pour cette interpellation du gourvernement et de la DOUANE (corrompue) en particulier.Le ministère de l’emploi,la douane et la ligue des consommateurs doivent tout mettre en oeuvre pour empêcher que cette situation continue.

  • Le 25 mars 2013 à 07:54, par Bala Wenceslas SANOU En réponse à : Autant le dire… : Ainsi, on tue l’industrie et on fait des chômeurs

    Monsieur le journaliste, je vous suggère de pousser votre écrit en procédant à des investigations auprès de services techniques en charge de la lutte contre la fraude. Vous serez certainement édifiez et moi avec des efforts consentis, mais, mais sans forcément les effets escomptés. Pourquoi ?
    Votre écrit peut certainement passer sous silence, sans réaction ; ce qui serait du reste une réaction, traduisant l’accoutumance ’d’un peuple et de ses dirigeants’ à ce que vous décrivez. Il y a comme une manifestation d’impuissance face à la fraude. Et pourquoi certains devraient-ils continuer à se battre si leurs efforts sont sanctionnés par l’impunité, la remise en circulation des voleurs et trafiquants ?
    Un peuple où l’exemple de la gouvernance ne provient pas des dirigeants à travers des actes et comportement (et non une rhétorique désuette) est voué au laissé-aller, au clientélisme. Impunité quand tu tiens, tu réussis à faire baisser les bras à plusieurs honnêtes gens ! Pourtant, il faut y croire, et se remettre chaque jour à la tâche si on aime son pays. Dénonçons en étant conséquent avec nous-mêmes ; en travaillant honnêtement chaque jour. Le vent du changement est entrain de souffler lentement mais surement sur la terre libre du Burkina. Il faut y croire et se battre pour ; nous réussirons.

  • Le 25 mars 2013 à 08:33 En réponse à : Autant le dire… : Ainsi, on tue l’industrie et on fait des chômeurs

    Bonne analyse Mme Kani. Nos frontieres sont devenues poreuses et toutes sortes de marchandises pillulent nos alimentations. Le gouvernement y est responsable et n’encourage pas la creation d’emploi. Si le gouvernement chante nuit et jour l’hymne de l’entreprenariat, on se rend compte par ailleurs que sa passivite a l’entree des produits non controles sur le territoire noyerait toutes ces actions. Souvent je me demande si le Burkina Faso est vraiment dirige. c’est un laisser aller qui ne dit pas son nom. Puisse Dieu proteger toutes les familles de ce cher pays !

    • Le 25 mars 2013 à 11:30, par JOHNNESS En réponse à : Autant le dire… : Ainsi, on tue l’industrie et on fait des chômeurs

      J’adhère aux différentes analyses déjà faites. Mais l’Etat et le consommateur sont les principaux coupables. L’Etat pour ne protégeant pas ses populations du danger de ces produits qui sont parfois refoulées dans les pays voisins (Ghana et Côte d’Ivoire) et que, connaissant le doute entourant ces produits, les laisse entrer sur le territoire. les Consommateurs et donc les populations, ne faisant que consommer et ruminer seulement au lieu de porter un coup à travers de vigoureuses protestations. Vivement que chacun se réveille pour dénoncer cet état de fait.

  • Le 25 mars 2013 à 11:13 En réponse à : Autant le dire… : Ainsi, on tue l’industrie et on fait des chômeurs

    Vous n’avez pas poser la question la plus importante : pourquoi autant de produits importés entrent dans ce pays et inondent les alimentations ? Vous n’évoquez pas la fraude et la corruption généralisée dans ce pays. Les intérêts de Dafani pèsent peu face à certains opérateurs économiques habitués à frauder en masse ou lorsqu’ils sont gérés par des prêtes noms.
    Si vous allez dans un supermarché, vous pouvez constater que la moitié de ces produits ne devraient pas y être car ils ne respectent pas la législation en terme d’information du consommateur ; sans parler de la qualité douteuse. Vous devriez vous renseigner et je suis sûr que plus de la moitié de ces produits ont entrés frauduleusement dans ce pays.
    Le Burkina dans le cadre de l’UEMOA peut taxer à l’importation certains produits pour protéger en partie sa production nationale. Est-ce fait ?

  • Le 25 mars 2013 à 17:42, par mammabao En réponse à : Autant le dire… : Ainsi, on tue l’industrie et on fait des chômeurs

    tout à fait d’accord:je suis une blanche Burkinabé de coeur et j’aprécie beaucoup, entre autre, le Dafani et je dis qu’il faut sauvegarder et encourager les productions locales et ce n’est que quand elles seront prédominantes sur le territoire qu’elles seront moins chères

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