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Maison d’arrêt et de correction de Kaya : Un milieu à humaniser

Publié le vendredi 1er février 2013 à 00h58min

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Maison d’arrêt et de correction de Kaya : Un milieu à humaniser

Kaya, chef-lieu de la Région du Centre-nord, dispose d’un Tribunal de grande instance (TGI) et d’une Maison d’arrêt et de correction qui accueille aussi bien les présumés coupables dans l’attente de leur jugement, que les condamnés afin qu’ils purgent leurs peines privatives de liberté. Au-delà des insuffisances hygiéniques courantes que l’on peut constater au sein de la plupart de ces types d’établissements sous nos tropiques, la situation de la Maison d’arrêt et de correction de Kaya frappe par des eaux usées à odeur hors qualificatif et à coloration indescriptible. Autre particularité de cet établissement, il n’est pas clôturé. Drôle de prison !

Dans le cadre de sa tournée dans la Région du Centre-nord, le Premier ministre Luc Adolphe Tiao a visité le 27 janvier dernier, la Maison d’arrêt et de correction de Kaya. Cette visite a d’abord consisté à faire le tour de l’établissement pénitentiaire, ensuite l’intérieur des deux bâtiments (répartis entre hommes et femmes) dont l’ensemble n’est pas clôturé, et enfin les cellules d’internement.

A la fin de cet exercice, Luc Adolphe Tiao a confié avoir touché du doigt les réalités de l’univers carcéral de Kaya, en déplorant non seulement le fait que des détenus soient en cellule depuis sept ans sans jugement, mais aussi de très graves problèmes d’hygiène. « Si des gens sont en prison, c’est parce qu’ils ont enfreint à la loi », a laissé entendre le Premier ministre qui, toutefois, dit ne pas concevoir la garde à vue plus de sept ans durant. Les problèmes d’hygiène sont liés à l’écoulement d’eaux usées d’une odeur à couper le souffle, de l’intérieur jusque dans les concessions voisines ; la prison se trouvant sur une sorte de pente ascendante et insérée entre des concessions d’habitation. Cette situation fait pratiquement des habitants des cours voisines, eux aussi, des prisonniers.

Si à l’extérieur les odeurs que dégagent ces eaux peuvent être amoindries par le contact avec l’air ambiant, à l’intérieur de la prison, ces odeurs obstruent l’oxygène, exposant ainsi à la mort, à moins de développer une seconde nature d’être vivant résistible au seul gaz carbonique contenu dans l’air. Plus qu’un problème d’hygiène, c’est en réalité un problème de négation de la vie humaine que pose ces eaux plus qu’usées. Le moins que l’on puisse dire, c’est que la Maison d’arrêt et de correction de Kaya ne ressemble pas à un milieu humain. C’est sans doute au vu de cette situation que le Premier ministre dans sa déclaration de politique générale devant la Représentation nationale le 30 janvier 2013, annonçait que « l’univers carcéral doit être humanisé et devenir un espace préparant à une future réinsertion sociale ».

Il est fort probable qu’il ne puisse y avoir une véritable réinsertion sociale pour quelqu’un qui a passé sept années de sa vie derrière les barreaux dans des conditions inhumaines et, où respirer l’air oxygéné semble relever d’un luxe, dans l’attente de son jugement. Et ce d’autant plus que si un jour il venait à être reçu à une audience de jugement, encore que les reports d’audiences sont fréquents, il n’aura pas à écoper d’une peine d’emprisonnement ferme de moins de sept ans. En pareil cas et dans la pratique en effet, le juge du jugement s’arrange pour prononcer une peine d’emprisonnement qui ne soit inférieure au temps passé en détention préventive. Est-on encore vraiment une personne quand on est dans l’impossibilité de se réinsérer dans sa communauté après une dégradation civique de plus de sept ans ? On peut franchement en douter. Et c’est à cette situation qu’expose la Maison d’arrêt et de correction de Kaya.

Ce qui retient aussi l’attention dans ce milieu carcéral de Kaya, c’est l’ingéniosité des détenus hors cellule. Ces derniers confectionnent, en effet, des sandales et des sacs de très bonne qualité. En tout cas les visiteurs du 27 janvier s’en sont servis, à commencer par le Premier ministre « himself » qui, en plus d’en avoir achetés, a été gratifié par ces détenus du fruit de leur savoir-faire. Parallèlement à cette activité artisanale, ils entretiennent un jardin assez fourni en légumes.
Cette visite n’aura pas été bénéfique qu’aux prisonniers qui savent que leur situation va sans doute toucher des sensibilités salvatrices ; elle l’a été également pour le personnel de la Garde de sécurité pénitentiaire (GSP).

En effet, le premier responsable de l’établissement pénitentiaire, l’inspecteur Claude Ouédraogo pour qui « il est inconcevable que dans un pays, on puisse construire une prison sans clôture », a saisi l’occasion pour relever l’absence de véhicule de service, ni pour le premier responsable, ni pour les escortes de détenus. Ainsi, « les multiples escortes de prisonniers de la Maison d’arrêt au Tribunal se font à pieds », a indiqué l’Assistant GSP Roland Douamba qui a égrené, au nom de l’ensemble du personnel de la Maison d’arrêt, un chapelet de doléances à l’endroit du Premier ministre.

Relativement à l’origine des eaux usées qui coulent de tous les côtés de la prison, l’inspecteur Claude Ouédraogo dira qu’elles proviennent des « fosses septiques qui ont cédé ». Toutefois, note l’inspecteur, ce problème devra trouver solution courant 2013. Trois entrepreneurs sont déjà passés pour l’étude de faisabilité ; mieux, l’appel d’offre est lancé, à en croire l’inspecteur.

La surpopulation carcérale y est également une réalité. Avec une capacité d’accueil de 150 détenus, la Maison d’arrêt de Kaya compte aujourd’hui plus de 200 détenus, selon le responsable de l’établissement.
Mais en attendant que cet établissement soit déplacé comme l’a promis le Premier ministre ou qu’une solution soit trouvée à l’écoulement de ces eaux usées, ce sont des pensionnaires meurtris et des populations riveraines empoisonnées quotidiennement qui subissent de très graves violations de droits humains jusqu’à ceux de première génération dont le droit à la vie.

Fulbert Paré (stagiaire)

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Vos commentaires

  • Le 1er février 2013 à 02:18, par ça En réponse à : Maison d’arrêt et de correction de Kaya : Un milieu à humaniser

    pour moi c’est bien mais c’est pas arrivé. en effet dans les normes ce etat de fait devrait être relevé par le ministre de la justice him self. combien de temps va t’il continuer à faire le travail des autres. je pense qu’il faut confier le ministère de la justice au Président du Faso lui même pour la gérer.

  • Le 1er février 2013 à 07:33, par impartial En réponse à : Maison d’arrêt et de correction de Kaya : Un milieu à humaniser

    Je ne sais si le pm a vraiment parlé de garde à vue, mais je crois que le terme approprié c’est la détention préventive. Toutefois ces questions de terminologie ne justient en rien l’injustice que vivent ces détenus.

  • Le 1er février 2013 à 07:46, par le dur En réponse à : Maison d’arrêt et de correction de Kaya : Un milieu à humaniser

    c’est pas maintenant que cette prison existe,ce qui veux que le ministre de la justice doit avoir honte lui qui es songé faire respecter les normes d’hygène,et en plus des gens travaillents dedant éh prauvre policiers,c’est pas la peine !!!!!

    le pays n’est pas pauvre c’est les gens qui jouent aux pauvres !!!!

  • Le 1er février 2013 à 09:27 En réponse à : Maison d’arrêt et de correction de Kaya : Un milieu à humaniser

    Pour qui connait le TGI de Kaya, il est à l’image de la maison d’arrêt : Dans un état de délabrement total car ce batiment construit depuis 1983 n’a jamais reçu une seule refection et il n’est pas non plus cloturé ni suffisamment éclairé d’ou le cambriolage qui s’y est produit il ya quelques mois. Pour les conditions de travail c’est encore plus lamentable. Pour la maison d’arrêt le problème subsiste depuis plusieurs années et toutes ces autorités sont au courant. En 2010 il ya meme eu une evasion massive de plusieurs detenus potentiellement dangereux principalement des "coupeurs de routes". Pour la detention preventive de plus de sept ans il s’agit probablement de coupeurs de route qui pullulent dans la région.

  • Le 1er février 2013 à 09:31, par fongnon En réponse à : Maison d’arrêt et de correction de Kaya : Un milieu à humaniser

    quand on a pas quelqu’un de haut placé dans ce pays,c’est l’injustice qu’on subit.ce que guiro a fait depasse mille fois pour ces detenus qui croupissent depuis 7 ans en prison,pourtant lui,n’a meme pas fait 6 mois.

  • Le 1er février 2013 à 09:44, par Uncitoyen En réponse à : Maison d’arrêt et de correction de Kaya : Un milieu à humaniser

    Le premier ministre doit donner des instructions au ministre de la justice afin que le prévenu qui a fait 7 ans sans être jugé soit situé sur son sort.C’est inadmissible ça. Peut -être même que cette personne a été enfermé pour des peccadilles ou pour un différend avec un bonze du CDP et on l’a oublié expressement pour le punir. honte à la justice

  • Le 2 février 2013 à 12:06, par Le professeur En réponse à : Maison d’arrêt et de correction de Kaya : Un milieu à humaniser

    Pour une fois, un Samo a fait du bon travail. Et dire qu’il n’est encore qu’un stagiaire. Bon vent à Monsieur Paré qui se laisse lire facilement et qui va au fond des choses.

  • Le 3 février 2013 à 05:36, par le gardien En réponse à : Maison d’arrêt et de correction de Kaya : Un milieu à humaniser

    Merci au PM d’avoir accepter visiter une prison et de s’apercevoir aussi bien des conditions de vie des détenus que du milieu de travail des GSP. A ma connaissance, depuis près de 15 ans aucun ministre de la justice a plus forte raison un PM n’a fait une tournée dans les prisons pour s’apercevoir de ces réalités. on mobilise chaque fois les moyens que pour la police et la gendarmerie oubliant que cela pourrait être peine perdue si les moyens ne suivent pas au niveau des prisons qui deviendront des écoles de la délinquance. quand on ne connait pas ce milieu l’on pense que c’est des tueurs et de voleurs seulement qui y sont. certains y sont illégalement ou de façon abusive ; par contre d’autres devraient y être et ne le sont pas parce qu’ils ont de l’argent, des proches bien places ou des relations...

  • Le 3 février 2013 à 10:50, par X En réponse à : Maison d’arrêt et de correction de Kaya : Un milieu à humaniser

    Je ne sais quoi dire tellement meurtrie par cette situation réelle et attristante. Cependant, cette situation n’est pas unique en son genre, elle n’est pas nouvelle et n’est pas extraordinaire. C’est l’ensemble des maisons d’arret et de correction du Burkina ainsi que l’ensemble des juridictions qui se trouvent dans cette situation de denuement total. L’autorité administrative ne peut nier avoir les rapports reguliers de ses agents ; le problème a chaque fois, l’on pretexte n’avoir pas les moyens. Le budget du ministère de la justice atteint rarement 1% du budget de l’Etat ; les audiences de la chambre criminelle qui logiquement devaient être regulières, ne le sont pas par defaut de moyens.
    J’ai l’habitude de dire que l’Etat de droit a ses exigences ; soit on est prêt et on y va, soit on n’est pas prêt et on reste dans nos gargottes.

  • Le 3 février 2013 à 12:02, par ganglito En réponse à : Maison d’arrêt et de correction de Kaya : Un milieu à humaniser

    larticle pein une situation plus que reelle et entr nou il st o couran d ca ! La population rivereine vi ds ca depui lgtps mai tt ca va fini un jr si dieu l veu, mai gar a vs si cett populat s revolt c qu j souhait dayeur.

  • Le 3 février 2013 à 14:33, par le gardien En réponse à : Maison d’arrêt et de correction de Kaya : Un milieu à humaniser

    les magistrats sont les agents de l’Etat les mieux payEs au burkina ; un jeune magistrat sortie de l’ENAM n’est pas soumis au SND et touche plus de 350 000 FCFA ( aller verifier si vous n’etes pas d’accord avec moi). En terme d’effectif, dans un tribunal comme celui de Kaya ils vallent 10 et sont incapables de resoudre le probleme de detention preventive prolongEe. Aujourd’hui, au lieu de faire leur preuve c’est des vehicules personnels et des villa qu’il reclament a l’Etat.

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