LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Nous sommes lents à croire ce qui fait mаl à сrοirе. ” Ovide

Autant le dire… : Le réalisme américain et l’aveuglement français

Publié le mardi 18 décembre 2012 à 01h29min

PARTAGER :                          

Les Français et la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest veulent intervenir militairement pour libérer le Nord du Mali. Sans cohérence aucune puisque les Etats-Unis, pour l’instant ne veulent pas s’associer à ce que leur représentante, Susan Rice, considère comme une « merde ». Aussi, l’Organisation des Nations unies (ONU) ne semble pas trop pressée pour donner un quelconque accord à toute intervention. On peut bien comprendre cette position pour deux raisons principales. La première est qu’une intervention militaire ne résoudra pas définitivement la crise au Mali.

Car nécessairement, il faut dialoguer. Que ce soit avant ou après une action militaire. Et toute action militaire prendra plus de temps que prévu. Aussi, faudra-t-il suffisamment de moyens financiers et de temps pour aller en guerre au Mali. C’est en partie la position de la médiation burkinabè qui voudrait tout faire pour éviter une intervention armée au Mali.

Deuxièmement, la France semble avoir oublié que son intervention en Libye, à travers le largage d’armes de pointe a permis aux groupes islamistes d’en avoir à portée de main pour exiger la partition du Mali. Ouvrir un front militaire au Nord Mali alors qu’on n’arrive même pas pour l’instant à interdire le trafic de tout genre qui s’y déroule, consistera à « afghanister » le Sahel. En clair, il s’agira de créer une insécurité totale dans toute la région ouest-africaine. Et puis, tant que la France et les pays de l’Afrique de l’Ouest n’auront pas réussi à éjecter du pouvoir la junte militaire dont son capitaine Amadou Haya Sanogo, toute intervention militaire sera vouée à l’échec.

L’armée malienne dont il vante les mérites et la bravoure, ne dispose pas de moyens militaires humains et logistiques suffisants pour faire la guerre au Nord. Elle est tellement en lambeau qu’il faut la refonder totalement avant toute intervention. D’ailleurs, pourquoi s’entêter à aller faire une guerre au Mali, alors que toutes les conditions ne sont pas remplies ? Pourquoi faire la guerre alors qu’on peut négocier ? Qui assurera la sécurité sous-régionale après qu’on aura éparpillé tous les groupes islamistes dans les autres pays de la sous-région ?

Dès le début de la crise, nous ne cessons de dire qu’il faut laisser les Maliens tranquilles. S’ils ont besoin qu’on les aide à libérer le Nord de leur pays des islamistes, c’est à eux de formuler la demande. S’ils ont besoin d’armement, d’hommes pour renforcer leur armée, c’est à eux de formuler la demande. A l’étape actuelle, tout porte à croire qu’on veut forcer les Maliens à accepter l’aide internationale. Tant que ce sera ainsi, la mayonnaise ne prendra jamais.

Et toute intervention militaire sera vouée à l’échec. On comprend donc la position américaine qui veut qu’on négocie, qu’on regarde la réalité en face et qu’on mette les Maliens au centre de toute action. S’ils veulent libérer leur pays, ils sauront comment cela doit se passer. Ce qui se passe actuellement au Mali n’est pas nouveau et ils savent bien comment cela est arrivé.

Mais cela ne veut dire en aucun cas, qu’il faut abandonner le peuple malien. Au contraire, il faut l’aider à prendre une position, mais non se substituer à lui. C’est un peuple valeureux qui a mené de grands combats de libération et de développement. C’est un peuple digne qui sait ce qu’il veut et comment le conquérir. Aller donc combattre une partie des Maliens au nom d’une quelconque recherche de paix, de stabilité, sera une grave erreur, une grosse cicatrice qu’on ne pourra effacer de si tôt. Allons aux négociations, car la guerre finie toujours par la négociation.

Dabaoué Audrianne KANI

L’Express du Faso

PARTAGER :                              

Vos commentaires

 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique
Burkina Faso : Justice militaire et droits de l’homme
Burkina Faso : La politique sans les mots de la politique
Le Dioula : Langue et ethnie ?