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Editorial de Sidwaya : Logique de paix contre logique de guerre

Publié le lundi 8 octobre 2012 à 01h48min

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Editorial de Sidwaya : Logique de paix contre logique de guerre

Malgré le verdict des urnes et les affrontements meurtriers, nombre d’Ivoiriens semblent regretter le retour à la paix. Sont de ceux-là, les pro-Gbagbo. Voulant vaille que vaille revenir aux affaires, ceux-ci sont prêts à brûler la Côte d’Ivoire et même la sous-région pour se faire cuire un œuf. Pour certains irréductibles, le plus important est la reconquête du pouvoir quelles que soient les voies à emprunter, quelle que soit l’ampleur des dégâts ou le nombre de morts. L’important pour eux, c’est de régner, multiplier les sales besognes, se remplir les poches, cultiver la haine de l’étranger… Un rapport de l’ONU cité par RFI donne une idée sur les intentions des partisans du pensionnaire de la CPI, Laurent Koudou Gbagbo.

En effet, selon ce rapport, « le 12 juillet dernier, une réunion s’est tenue à Takoradi, au Ghana, où trois groupes d’exilés -composés, chacun, de militaires et de civils- ont décidé d’unir leur force et de définir ensemble une stratégie pour reprendre le pouvoir à Abidjan. Ainsi (sans que cela soit exhaustif), l’ex-directeur du port autonome d’Abidjan, Marcel Gossio, le pasteur Moïse Koré, Charles Blé Goudé, Justin Koné Katinan ou encore la seconde épouse de Laurent Gbagbo, Nady Bamba, soutiendraient politiquement et financièrement les opérations armées menées depuis le Ghana et le Liberia. »

L’ex-directeur du port autonome d’Abidjan, Marcel Gossio, à travers le canal de RFI, a démenti les informations contenues dans le rapport, en l’occurrence son implication dans ce projet lugubre de déstabilisation. Mais l’organisation mondiale chargée de la paix et de la sécurité peut-elle se permettre à traiter avec beacoup de légèreté un dossier aussi sensible ? Si M. Gossio conteste le rapport onusien, qu’il fournisse les preuves qui démontent un à un les éléments de ce document.

Et ce n’est pas tout ! Le rapport indique qu’une connexion existe désormais entre les pro-Gbagbo, la clique du capitaine Sanogo et les Jihadistes du groupe Ansar Dine. Incroyable ! Ne faut-il pas être un fossoyeur de la paix et de la stabilité pour vouloir tout remettre à plat par tous les moyens ? Pendant que les populations de Gao, de Kidal ou de Tombouctou appellent au secours pour les sortir de “l’enfer” à elles imposé par les islamistes depuis mars-avril, des Ivoiriens qui se disent soucieux de leur pays tentent de nouer des relations avec eux. Pourquoi veut-on replonger les populations ivoiriennes dans la tourmente ? Pourquoi milite-t-on pour un retour en enfer ? Faut-il une Eburnie où on coupe les mains, les pieds où toutes les libertés sont confisquées ? A-t-on véritablement intérêt à créer une Côte d’Ivoire où personne n’est libre, où les enlèvements d’Occidentaux seront des pratiques commerciales ?

Personne ne doit se réjouir d’une nouvelle déstabilisation de la Côte d’Ivoire ou de tout autre pays de la sous-région. Pendant plus de dix ans qu’auront duré les troubles, qu’ont-ils pu poser comme acte positif pour porter plus haut et plus loin le flambeau légué par le Président Félix Houphouët Boigny ? Rien. Seulement des maisons en ruines, des routes dégradées, des morts innombrables, des cœurs meurtris et des populations divisées qui ne finissent pas de se regarder en chiens de faïence.

Cette liaison dangereuse avec les acteurs de la crise malienne peut s’expliquer : le président ivoirien Alassane Dramane Ouattara, président en exercice de la CEDEAO est de ceux-là qui, à travers leur action forte et énergique, ont contraint le capitaine malien et ses "potes" à revoir leur ambition à la baisse. C’est aussi celui-là qui a transformé en cauchemar, le rêve douillet de Gbagbo et ses partisans. Et comme selon la pensée populaire, « les mêmes peines unissent mille fois plus que les mêmes joies », la connexion entre les deux bords semble avoir été vite établie contre « l’ennemi commun ».
Quant au rapprochement avec les islamistes, le rapport onusien stipule que cette option vise la mobilisation de mercenaires pour, le moment venu, déstabiliser toute la sous-région ouest-africaine. Pour la reconquête du pouvoir, rien n’est de trop pour les partisans de Laurent Gbagbo. Pourtant, jusqu’à la publication de ce rapport, ce sont les mêmes qui, à chaque intervention, disaient se démarquer de toute idée d’agression ou de déstabilisation de la Côte d’Ivoire.

A l’allure où vont les choses, il est à craindre que la zone Afrique de l’Ouest ne devienne dans les jours à venir, un terrain de jeu pour barbus et mercenaires de tous horizons. Face à la très grande soif de pouvoir et de vengeance des partisans de l’ancien Président ivoirien, la sous-région risque de connaître en effet des moments difficiles les jours à venir. On savait déjà les rebelles, islamistes, mercenaires et autres très dangereux. Maintenant qu’ils peuvent bénéficier d’un bras financier doté de moyens colossaux prélevés dans les caisses de l’Etat ivoirien ou générés par toutes sortes de trafics, il y a vraiment de quoi éviter le sommeil profond.

C’est dire également que la CEDEAO, avec le soutien ou l’accompagnement de la communauté internationale doit œuvrer à déloger les malfaiteurs du Nord-Mali. Plus le temps passe, plus le taux de nuisance des mouvements armés prend de l’ampleur. Aussi, les autorités du Ghana et du Liberia doivent jouer franc jeu en empêchant que leur pays ne servent de base arrière à des politiciens en mal de pouvoir et des rebelles à la moralité bien douteuse. Dans un cas comme dans l’autre, la seule raison de conquête ou de reconquête du pouvoir reste la poursuite des intérêts égoïstes. Rien de plus. Et même si les partisans de Laurent Gbagbo parvenaient à reconquérir le pouvoir par les armes, vont-ils attaquer les geôles du CPI pour libérer leur mentor ?

Aussi, dans une Côte d’Ivoire où les armes ont longtemps crépité et où certains combattants des FRCI se sentent floués dans le partage du gâteau, il faut redouter à tous moments, certains mouvements d’humeur d’individus incontrôlés selon l’expression consacrée. La sous-région a longtemps souffert des turpitudes politiciennes ou mafieuses ces dernières années. Place à la paix. Que les perdants acceptent la vérité des urnes et se remobilisent pour une conquête démocratique du pouvoir. Trop de morts, trop d’intérêts égoïstes, trop de haine, trop de retard pris dans la construction d’un espace meilleur conforme aux attentes des populations,… Trop c’est trop ! Force doit rester à la démocratie, au dialogue, au règlement pacifique des différends.

Rabankhi Abou-Bâkr ZIDA (rabankhi@yahoo.fr)

Sidwaya

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